Monsieur le ministre, sur cette question, les enjeux, loin d’être purement techniques, sont vraiment économiques : ils concernent plus spécialement le monde de la petite et moyenne entreprise.
Derrière cette nouvelle rédaction proposée pour l’article 885 O ter du code général des impôts se cache une innovation qui va durcir sensiblement le régime d’exonération du patrimoine professionnel.
Cette mesure peut en effet avoir des conséquences très significatives pour de nombreux dirigeants de PME qui, par précaution, « laissent » dans leur entreprise les bénéfices dont ils n’ont pas besoin pour vivre afin de pouvoir faire face aux aléas économiques.
Cette disposition concerne directement une population de plusieurs dizaines de milliers de personnes disséminées sur l’ensemble du territoire, constituée pour l’essentiel de patrons de PME. Elle fait disparaître toute incitation à conserver les bénéfices en réserve et pousse à les distribuer, ce qui va clairement à l’encontre des objectifs qu’affiche le Gouvernement.
Le nouveau dispositif méconnaît la structure de financement type des PME et ouvre à l’administration fiscale un nouveau « permis de redresser » : le passage à une réintégration des actifs eux-mêmes conduira à une augmentation quasi automatique de la fréquence des redressements. Il suffira désormais à l’administration de partir de la lecture directe des postes de l’actif sur les liasses fiscales pour pouvoir faire une notification, dès lors qu’elle estimera qu’un poste n’est pas indispensable à l’exploitation. La charge de la preuve contraire incombera au chef d’entreprise.
Le régime actuel est moins automatique, parce qu’il nécessite de se livrer à une estimation de la valeur des actions, exercice plus complexe qui requiert davantage de nuances.
Il faudra s’attendre, mes chers collègues, à beaucoup d’erreurs et de contestations.
En pratique, dans les sociétés non financières, les redressements vont en effet porter typiquement sur deux types d’actifs.
En premier lieu, ils viseront la trésorerie jugée excédentaire. Du point de vue des chefs d’entreprise, le sujet est potentiellement explosif, tout d’abord parce que ces redressements signifieront que l’administration juge, à leur place, de la marge de sécurité qu’ils peuvent conserver pour faire face à une éventuelle baisse d’activité ;…