Un dernier mot sur cette affaire… Je remercie M. le ministre de ses explications. Celles-ci cependant ne me convainquent pas, car on peut toujours poursuivre sur la base de l’abus de droit. Par ailleurs, s’agissant des conditions de prise en compte du passif, vous auriez à mon sens pris moins de risques en maintenant le statu quo législatif.
Je voudrais simplement vous citer un exemple en matière de biens professionnels et de passif.
Une société commerciale a acquis, il y a dix ans, une société civile immobilière qui détenait le siège social de la société commerciale. Il y a cinq ans, cette société commerciale, compte tenu de son développement, a acquis un autre immeuble qui est devenu son siège social, mais elle n’a pas cédé la filiale immobilière. L’ancien siège est loué à un tiers et les loyers permettent de rembourser le solde de l’emprunt.
On suppose que la société civile immobilière a une valeur de 1 million d’euros et que le solde de l’emprunt contracté pour l’acquisition de l’immeuble est de 550 000 euros. Si le chef d’entreprise avait réalisé l’opération dans son patrimoine personnel, il devrait déclarer à l’actif de son ISF 1 million d’euros et au passif 550 000 euros ; il serait donc taxé sur 450 000 euros. Or, selon l’article 9 du projet de foi de finances pour 2013, le chef d’entreprise devra déclarer 1 million d’euros, sans tenir compte des 500 000 euros restant dus par la société.
De ce fait, l’entreprise va être pénalisée par rapport à ce qu’eût été la situation du particulier. À mon avis, c’est un effet pervers auquel vos services n’ont probablement pas songé, mais je pense qu’un certain nombre de situations de cette nature vont se produire.
En guise de conclusion, je voudrais examiner, encore à titre d’exemple, le traitement des contrats d’assurance-vie en unités de compte.
La valeur des actifs sous-jacents de ces contrats fluctue et les détenteurs de ces derniers n’ont aucune garantie sur leur valeur finale. Tant que le contrat n’est pas dénoué, la valeur de rachat reste soumise à l’aléa de la valeur des sous-jacents et la plus-value ou la moins-value reste non seulement latente mais provisoire.
Il serait extravagant, et je pèse mes mots, que des plus-values provisoires d’actifs sous-jacents dans des contrats d’assurance-vie ou autres puissent de fait être taxées au titre de la réduction ou de la suppression du bénéfice du plafonnement, alors qu’elles ne sont pas prises en compte en cas de détention directe de ces actifs.
Il y a là une dissymétrie qu’il convient de souligner : les variations annuelles à la hausse comme à la baisse de ces actifs entraîneraient une très grande instabilité de la matière imposable au titre de l’ISF. Dans une année de baisse, la perte en capital sur ces actifs pourrait même être supérieure aux autres revenus du contribuable, ce qui réduirait à zéro son revenu de référence, alors que, les années de hausse, le revenu de référence pourrait entraîner la disparition de ses droits au plafonnement. Dans un cadre annuel, la même plus-value pourrait être taxée plusieurs fois.
Bref, monsieur le ministre, il me semble que vos services vous ont mal inspiré §en sortant de leurs tiroirs des suggestions qui auraient sans doute pu être présentées à tout ministre siégeant au sixième étage de Bercy. Je crois sincèrement que vous allez essuyer des mécomptes sérieux avec cette affaire, et je pense ici non seulement à l’illustre institution de la rue de Montpensier, mais aussi, ce qui est peut-être aussi grave, au public des épargnants et des patrons de PME.
J’ai donné à plusieurs reprises des indications concrètes et précises sur des situations qui vont se produire. Il était de mon devoir, me semble-t-il, de les expliciter. Maintenant, il appartient à la Haute Assemblée de trancher !