Intervention de Philippe Marini

Réunion du 24 novembre 2012 à 14h30
Loi de finances pour 2013 — Article 12

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini :

En cet instant, je voudrais attirer votre attention sur la situation de l’industrie automobile française et sur les risques liés au dispositif du malus tel qu’il nous est ici proposé.

Il est inutile, mes chers collègues, de rappeler les très graves difficultés que connaissent les marchés automobiles européens, dont les tendances sont de plus en plus inquiétantes : perte de 4 millions de voitures en cinq ans et effondrement des marchés d’Europe du Sud, sans compter les risques induits pour les sites industriels français.

Pour l’année 2013, nous pouvons nous attendre à une nouvelle phase de baisse des immatriculations tant sur le marché européen, profondément déprimé, que sur le marché domestique. Les constructeurs considèrent que les surcapacités européennes seraient de l’ordre de 20 %, ce qui entraîne un climat d’intense guerre des prix et une extrême sensibilité des consommateurs aux signaux qui leur sont adressés. Dans un tel contexte, mes chers collègues, j’estime que la forte hausse du malus automobile ici proposée tombe vraiment très mal. Elle peut même être considérée comme un signal fiscal dissuasif.

Nous connaissons tous les difficultés du groupe PSA et leurs effets sur l’emploi. Nous savons que la fabrication de certains véhicules ne permet de dégager que des marges très faibles. Les véhicules émettant moins de 155 grammes de dioxyde de carbone, au sens de l’article 12, correspondent au « cœur de gamme » de la production dudit groupe en France. Les ressauts de malus sur l’échelle des tranches, en particulier sur les tranches comprises entre 150 grammes et 155 grammes d’émission de dioxyde de carbone et entre 155 grammes et 175 grammes, peuvent avoir des conséquences économiques tout à fait significatives. Le présent projet de loi de finances prévoit cependant un quasi doublement du malus par rapport à l’année précédente, avec des ressauts, pour chacune des tranches citées, allant respectivement de 500 euros à 1 000 euros et de 750 euros à 1 500 euros.

Or ce sont bien ces deux tranches qui affectent le plus directement les véhicules produits sur les sites français qui se trouvent sur des segments extrêmement sensibles au signal-prix et sur lesquels les arbitrages des consommateurs, en vue de la décision finale d’achat, s’effectuent souvent à quelques centaines d’euros près.

Selon les constructeurs et les spécialistes, d’une manière générale, ce durcissement pourrait provoquer en 2013 la non-réalisation sur le marché français d’une vingtaine de milliers de ventes de véhicules particuliers – pour la majeure partie construits sur notre sol –, dont 7 000 compris dans les deux tranches les plus sensibles précitées.

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, avant de voter l’amendement de suppression que M. de Montgolfier présentera au nom de notre groupe, je voulais vous livrer ces réflexions et, peut-être, faire infléchir le dispositif qui nous est proposé. Si nous n’y parvenions pas lors de l’examen du projet de loi de finances initiale, peut-être faudrait-il que ce dossier soit mieux traité dans le projet de loi de finances rectificative de fin d’année. Il pourrait s’agir, par exemple, de lisser la progression des malus affectant les tranches les plus sensibles. Il pourrait s’agir aussi de geler l’application du malus pendant une période d’observation au cours de l’année 2013, de manière à évaluer le coût réel des bonus annoncés au mois de juillet dernier, en particulier celui d’entre eux relatif aux véhicules purement électriques. En effet, la demande pour ce type de voiture est demeurée très faible : elle ne représente qu’environ 5 000 ventes sur les neuf premiers mois de l’année.

Mes chers collègues, je crois qu’il est utile de développer de manière cohérente notre approche tant fiscale qu’économique : il y va de la défense de l’emploi sur les sites français de l’industrie automobile.

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