Je rappellerai, ici, non pas la position de notre groupe à l’époque, mais celle qui a été exprimée à l’occasion du récent Congrès des maires.
Si l’on en croit André Laignel, ancien ministre et actuel président du Comité des finances locales, la réforme de la taxe professionnelle a, de fait, été payée par les ménages, puisque le transfert de fiscalité n’a pas manqué de se produire à leur détriment : la facture de 7, 5 milliards d’euros d’allégements a pris les formes autorisées de la taxe d’habitation, du foncier bâti, ou encore, plus discrètement, de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.
Un autre phénomène a été oublié en route : l’absence de mesure des conséquences d’un pouvoir local de plus en plus limité dans la fixation de l’impôt, la taxe professionnelle ayant été remplacée par la contribution économique territoriale, que nous avions qualifiée en son temps de « mariage de la carpe et du lapin », associant une sorte de résurgence de l’antique patente et une majoration de la taxe sur la valeur ajoutée.
Ne pouvant plus agir que sur la seule cotisation foncière des entreprises, les élus locaux se sont retrouvés à devoir voter des taux d’imposition sans disposer des éléments permettant une mesure effective de leurs choix. Cela a été rappelé voilà quelques instants par M. le ministre ainsi que par M. le rapporteur général.
C’est un peu comme si on avait demandé aux élus de voter les yeux bandés, dans une sorte de colin-maillard fiscal. Certaines entreprises ont été gagnantes, M. Rebsamen a eu raison de le rappeler : ce fut le cas pour 80 % d’entre elles ; quelques autres, les 20 % restantes, ont malheureusement été pour le moins perdantes.
L’évaluation de la réforme de la taxe professionnelle n’a pas encore été tout à fait réalisée et accomplie. Si l’industrie et un grand nombre de PME et d’ETI ont vu leur contribution se réduire, il n’en a pas été de même de nombreuses autres.
Pour certaines entreprises, la douloureuse surprise fut de constater une hausse des cotisations, conduisant à devoir payer trois, quatre, cinq fois plus qu’auparavant, au point de mettre en question leur survie, elles qui sont déjà particulièrement sensibles à la stagnation du pouvoir d’achat de leur clientèle.
On peut effectivement comprendre leur colère, comme on doit aussi bien comprendre sinon l’embarras, en tout cas la situation des élus locaux, qui n’ont pas envisagé les conséquences de leurs décisions, faute d’éléments d’appréciation suffisamment fiables, fournis en temps et en heure par les services fiscaux.
Il est donc écrit dans l’amendement que faculté va être laissée aux collectivités locales de revenir sur leurs délibérations, en vue de faire des sommes d’ores et déjà versées des acomptes pour les années à venir.
Il s’agit, dirais-je, d’une solution de moindre mal, que nous soutiendrons par solidarité avec nos collègues désarmés devant des situations pour certaines ubuesques, mais qui nous enseignent pour le moins l’essentiel.
Même si cet amendement n’est qu’une sorte de « faute de mieux », nous ne pourrons que le voter, en attendant que rendez-vous nous soit enfin donné pour une vraie réforme de la fiscalité locale, à l’occasion – pourquoi pas ? – de l’acte III de la décentralisation.