Je n’ignore rien des débats qui ont souvent eu lieu ici sur le CNC. Nous avons la chance d’avoir un cinéma performant, qui se porte bien et qui réalise de nombreuses entrées en salle. C’est d’ailleurs le seul, avec le cinéma indien, qui puisse résister – un peu – à Hollywood.
En Europe, les cinémas « fondateurs » ou de référence – je pense notamment à ceux de l’Espagne et de l’Italie – ont décroché complètement. Nous, nous avons su mettre en place un système vertueux, y compris pour le financement du CNC, au travers d’une taxe sur les billets d’entrée dans les salles. Plus notre cinéma se développe et plus nous avons besoin de ces financements pour le soutenir.
Cependant, on ne peut empêcher certains de nos collègues de s’interroger : puisque ce fonds de roulement augmente, c’est là qu’il faudrait taper, disent-ils ! Pourtant, cela reviendrait à s’attaquer à un marché et à une économie qui cherchent à se développer. On réduirait les possibilités de création et d’investissement, car tout va à la création !
Bien entendu, des économies doivent être réalisées et le Gouvernement, dans le cadre d’un budget contraint, vient prélever 150 millions d’euros. Où les prend-il ? Dans un fonds de roulement, dont la voilure va se réduire d’autant, qui finance le plan de numérisation destiné, entre autres, aux archives et au référencement. Or cet archivage, cette possibilité de numérisation du patrimoine audiovisuel français, constitue un enjeu majeur à l’époque de la révolution numérique ! Il y a, dans tout le pays, des œuvres d’art qui sont en train de mourir et qui, demain, ne pourront plus être restaurées.
Le Gouvernement demande 150 millions d’euros et le CNC assume cet effort. Mais en allant au-delà, mes chers collègues, nous mettrions en péril des programmes d’intérêt général, qui sont essentiels pour une économie qu’il ne faut pas affaiblir.
Nous représentons l’excellence dans ce domaine. Le processus de numérisation fait appel à des savoir-faire typiquement français, notamment dans la photochimie. Si le nombre de contrats se réduisait encore, nous risquerions de voir couler cette petite industrie, donc disparaître des savoirs, qui ne seraient plus transmis. À un moment où l’on s’efforce de mettre en œuvre un redressement productif, ce ne serait pas une bonne nouvelle.
Ne chargeons pas trop la barque pour la seule raison que nous nous trouvons face à un secteur qui a du succès. Il faut au contraire consolider ce dernier, parce qu’il fait notre fierté dans le monde.