Intervention de Jean-Michel Baylet

Réunion du 28 novembre 2012 à 9h30
Loi de finances pour 2013 — Participation de la france au budget de l'union européenne

Photo de Jean-Michel BayletJean-Michel Baylet :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous constatons tous les jours que l’Europe est en crise. Cette crise est à la fois une crise financière, économique, une crise de la dette et désormais, malheureusement, elle est même une crise institutionnelle.

Par un hasard du calendrier, le débat sur l’article 44 du projet de loi de finances pour 2013 a lieu au moment où les événements se bousculent sur l’agenda communautaire.

L’attribution à l’Union européenne du Prix Nobel de la paix, qui lui sera solennellement remis le 10 décembre prochain, ne doit pas masquer les impasses dans lesquelles nous mène la gouvernance actuelle de l’Europe.

Lors du Conseil européen des 22 et 23 novembre dernier, les chefs d’État et de gouvernement des États membres ne sont pas parvenus à s’entendre sur le cadre financier pluriannuel pour les années 2014 à 2020 ; ils se retrouveront au début de l’année prochaine pour tenter d’arracher un accord, s’il est possible.

Par ailleurs, à l’heure où nous débattons de l’évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de notre participation au budget de l’Union européenne, la Commission européenne, le Parlement européen et le Conseil européen ne sont même pas parvenus à s’accorder sur le périmètre de ce budget.

Le Parlement européen a même bloqué les négociations, le trou dans le budget de l’année 2012 n’ayant pas été comblé. Cette situation laisse planer le doute sur la viabilité du programme de bourses étudiantes Erasmus ou sur le Fonds social européen, ce qui n’est tout de même pas rien.

Mes chers collègues, c’est dans ce contexte pour le moins incertain que le Sénat débat de la participation de la France au budget de l’Union européenne.

L’article 44 du projet de loi de finances pour 2013 fixe à 19, 6 milliards d’euros le prélèvement sur nos recettes au profit du budget de l’Union européenne. Cette somme est en nette hausse par rapport à l’année dernière : elle augmente de 3, 81 %, ce qui représente un accroissement de 720 millions d’euros.

Cet effort de la France n’est pas négligeable, même si la trajectoire de la participation au budget européen est désormais fixée par l’accord européen sur les perspectives financières et par les stipulations du traité de Lisbonne.

Alors que l’ensemble du projet de loi de finances pour 2013 est caractérisé par un objectif de maîtrise des dépenses publiques, nous tenons nos engagements à l’égard de nos partenaires.

Comme l’indique le rapport de nos collègues Marc Massion et Jean Arthuis, le montant de notre participation au budget de l’Union européenne a été multiplié par cinq en vingt ans en valeur absolue.

Relativement à celle des autres États membres, la contribution de la France est restée stable au cours de la période récente : autour de 16, 5% du budget de l’Union européenne, sauf en 2009 où elle a été un peu supérieure.

Second contributeur de l’Union européenne, la France reste le premier destinataire des aides du budget européen, même si, malheureusement, la balance entre ce que notre pays verse à l’Europe et ce qu’il en reçoit est désormais largement déficitaire.

Je partage l’avis de nos deux rapporteurs spéciaux, MM. Arthuis et Massion : une réflexion s’impose sur la réforme de la gouvernance de la zone euro et de l’Union européenne. À cet égard, je crois, comme vient de le dire Jean Arthuis, qu’il est nécessaire de mettre en place une gouvernance budgétaire européenne.

Certes, des progrès ont été réalisés depuis l’élection de François Hollande à la présidence de la République, notamment en ce qui concerne l’union bancaire, les project bonds et la Banque européenne d’investissement ; mais il est évident que nous devons aller beaucoup plus loin.

Dans le schéma actuel, l’élaboration du budget de l’Union européenne résulte d’une série de compromis entre la Commission européenne, le Parlement européen et les chefs d’État et de gouvernement réunis en Conseil européen.

Or une situation de blocage absolu existe à l’heure actuelle entre ces différentes institutions, s’agissant de la préparation du budget pour 2013. À ce sujet, M. le ministre pourrait peut-être apporter au Sénat un certain nombre d’éléments d’information sur l’avancée des négociations entre les États membres et les institutions communautaires, et la recherche d’un consensus sur le budget pour 2013.

La question se pose également du contenu de notre participation au budget de l’Union européenne.

En effet, alors que les textes communautaires prévoyaient initialement que le budget de l’Union européenne serait financé par des ressources propres, la participation de la France est aujourd’hui composée, pour environ 70 %, d’une part assise sur notre revenu national brut et, pour 13 %, d’une part provenant très indirectement de la ressource assise sur notre TVA ; le reste est constitué de droits de douane, de prélèvement agricoles et de cotisations sur le sucre.

Ce système cache assez mal que l’autonomie du financement de l’Union européenne est en réalité une illusion. En d’autres termes, les prétendues ressources propres de l’Union européenne ne lui sont pas vraiment propres.

La nécessaire réforme du mode de financement de l’Union européenne passe par la création d’une véritable fiscalité européenne.

À cet égard, le projet de création d’une taxe sur les transactions financières destinée à alimenter le budget européen est un premier pas, même si nous mesurons bien les réticences qu’une telle initiative a fait naître dans certains États membres.

Nous proposons donc une remise à plat de l’ensemble du financement de l’Union européenne, notamment du calcul de la « correction britannique », et la mise en place de véritables « impôts européens ». Ce système aurait l’avantage de la lisibilité, et les citoyens pourraient constater quelle partie de leurs impôts finance les institutions et les politiques communautaires.

Cette proposition s’approche des propositions formulées dans le Paquet sur les ressources propres de la Commission européenne, qui plaide en faveur d’une suppression progressive des rabais dont profitent certains pays, de la mise en place d’une taxe sur les transactions financières et de la création d’une nouvelle ressource assise plus directement sur la TVA.

M. Marc Massion, rapporteur spécial, préconise pour sa part la création d’un impôt harmonisé sur les sociétés. C’est une autre piste tout aussi intéressante et pertinente, même si nous sommes conscients des obstacles à sa mise en œuvre.

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