La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement.
J’informe le Sénat que la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire m’a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats qu’elle présente à cette commission mixte paritaire.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l’article 12 du Règlement.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2013, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 147, rapport n° 148).
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen, au sein de la première partie du projet de loi de finances, des dispositions relatives aux ressources.
PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
II . – RESSOURCE S AFFECTÉES (suite)
D. – Autres dispositions
Le Sénat va examiner l’article 44 relatif à l’évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne.
La parole est à M. Marc Massion, rapporteur spécial.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la deuxième année consécutive, Jean Arthuis et moi-même rapportons devant le Sénat la contribution française au budget communautaire dans le projet de loi de finances, contribution qui prend la forme d’un prélèvement sur les recettes de l’État.Cette année présente cependant une particularité : au terme du rapport, nous ne parvenons pas, Jean Arthuis et moi, à la même conclusion.
L’article 44 du projet de loi de finances pour 2013 évalue ainsi ce prélèvement, voté chaque année en loi de finances, à 19, 6 milliards d’euros, soit une augmentation assez marquée par rapport au montant voté pour 2012 : la hausse est en effet de 720 millions d’euros, soit 3, 8 %. L’année dernière, déjà, la hausse était de 646 millions d’euros, soit 3, 5 %.
Je commencerai mon exposé en évoquant la négociation budgétaire communautaire pour l’année 2013, qui a échoué récemment à la suite de l’incapacité du comité de conciliation à trouver un compromis.
L’échec de cette réunion, le vendredi 9 novembre, reflète les tensions importantes qui existent entre les États membres, y compris au sujet du budget modificatif pour 2012. La rallonge de 9 milliards d’euros demandée par la Commission européenne au titre de 2012 pose problème. Or il n’y aura pas de vote sur 2013 tant qu’il n’y aura pas d’accord sur le budget 2012 en cours d’exécution.
Malgré l’échec des négociations, je vais tout de même vous rappeler, mes chers collègues, le contenu de la négociation budgétaire communautaire pour 2013, qui s’est déroulée tout au long de l’année 2012.
Ainsi, et comme à l’accoutumée, l’avant-projet de budget a été présenté par la Commission européenne le 25 avril dernier. La Commission a proposé une augmentation de 2 % des crédits d’engagement par rapport à 2012, soit 150, 9 milliards d’euros. Les hausses concernent surtout la rubrique 1a « compétitivité ». Les crédits de paiement affichent quant à eux une hausse de 6, 8 % pour atteindre 137, 9 milliards d’euros.
Le projet de budget adopté par le Conseil en juillet 2012 se veut plus rigoureux, ce qui est habituel. Cependant, pour la deuxième année consécutive, cette pratique prend un sens encore plus significatif dans le contexte des efforts exigés en matière d’assainissement des finances publiques nationales et de stratégies de retour à l’équilibre budgétaire.
Ainsi, des coupes importantes sont réalisées en crédits d’engagement, avec une baisse de 1, 2 milliard d’euros, ce qui conduirait tout de même à une augmentation de 2, 8 % par rapport à 2012, et, surtout, en crédits de paiement, qui sont diminués de 5, 2 milliards d’euros, ramenant la hausse pour 2013 à 2, 8 % par rapport à 2012.
Ces coupes ont principalement pour origine la préoccupation exprimée par de nombreux États membres, dont la France, d’une discipline budgétaire renforcée. Le Conseil européen de juillet dernier a en effet été l’occasion pour huit États membres, dont la France, de rendre publique une déclaration demandant l’absence de toute hausse supplémentaire dans le budget 2013.
Enfin, je souligne que le Parlement européen a voté en séance plénière, le 23 octobre 2012, un budget assez éloigné du projet du Conseil mais très proche des propositions initiales de la Commission. Il propose ainsi, pour 2013, une hausse de 2, 2 % des crédits d’engagement et de 6, 8 % des crédits de paiement.
Il va sans dire que la proposition d’augmentation des crédits formulée par nos collègues députés européens rend plus difficiles encore les négociations entre les deux branches de l’autorité budgétaire.
La phase de conciliation prévue par le traité de Lisbonne n’ayant pas pu aboutir, la Commission a établi un nouveau projet de budget le 26 novembre, quasi-identique à celui qu’elle avait formulé en avril dernier.
Un trilogue rassemblant la Commission, le Conseil et le Parlement doit se tenir aujourd’hui même, mercredi 28 novembre, pour examiner ce projet.
Une telle procédure avait également été nécessaire pour le budget 2011 puisque le comité de conciliation n’était pas parvenu à obtenir un accord. En cas de conflit persistant conduisant à l’absence de budget voté d’ici à la fin décembre – et c’est un scénario que l’on ne peut exclure à l’heure actuelle –, les premiers mois de l’exercice budgétaire seront assurés par le système des douzièmes provisoires.
Les difficultés rencontrées dans ces négociations sur le budget 2013 sont aggravées par les désaccords sur le budget rectificatif 2012 mais aussi par les négociations qui se poursuivent depuis plus d’un an sur la future programmation 2014-2020. C’est à ce sujet que les tensions entre les États membres, la Commission et le Parlement européen sont les plus grandes et que des compromis devront rapidement être trouvés. À défaut, une grave crise politique pourrait paralyser l’Union européenne.
Je m’inquiète à cet égard de l’absence de résultats de la réunion du Conseil européen des 22 et 23 novembre 2012. L’Allemagne a estimé que la discussion pourrait être relancée au début de l’année 2013. Monsieur le ministre, pourrez-vous nous dire à quelles conditions la France peut-elle reprendre l’initiative ?
Par ailleurs, monsieur le ministre, je déplore que les crédits du programme européen d’aide aux plus démunis, le PEAD, reconduits mais en diminution en 2012 et en 2013, ne disposent pas de base juridique dans la future programmation 2014-2020. Je souhaite ici relayer la préoccupation de nombreux élus et d’associations : l’enveloppe allouée au titre du PEAD doit être conservée.
Avant d’en arriver à ma conclusion, je voudrais formuler quelques remarques sur le montant du prélèvement qui est l’objet de notre débat aujourd’hui ainsi que sur l’évolution de notre solde net.
Le projet de loi de finances pour 2013 évalue le prélèvement sur recettes au profit du budget de l’Union européenne à 19, 6 milliards d’euros, soit une hausse de 3, 8 % en un an. Je souligne que ce montant a été multiplié par cinq en vingt ans.
Nous savons d’expérience que, au terme de l’exécution 2013, des ouvertures nouvelles en crédits de paiement seront intervenues et que, entre le montant du prélèvement affiché dans le projet de loi de finances et le montant réel final, il y aura des écarts, favorables ou défavorables au demeurant.
J’appelle en effet votre attention sur les écarts considérables constatés entre la prévision et l’exécution du prélèvement : en 2007, le prélèvement inscrit en loi de finances initiale avait ainsi été surestimé de plus de 1, 5 milliard d’euros ; en 2008, est apparue une sous-estimation de 300 millions d’euros ; pour 2009, la sous-estimation a été nettement plus importante, s’élevant à plus de un milliard d’euros : 20 milliards d’euros en exécution alors que le vote du Parlement portait sur 18, 9 milliards ; en 2010, le prélèvement a été à l’inverse surestimé de 556 millions d’euros ; en 2011, l’exécution a été plus conforme aux prévisions, avec une légère surestimation de l’ordre de 5 millions d’euros.
En 2012, la sous-estimation du prélèvement devrait être assez élevée. L’annexe jaune « Relations financières avec l’Union européenne » au PLF 2013 contient une estimation à 170 millions d’euros, mais Jean Arthuis et moi-même avons appris du directeur du budget de la Commission européenne, lors d’un récent déplacement à Bruxelles, que le budget rectificatif pour 2012 devait demander l’ouverture de près de 9 milliards d’euros de crédits de paiement supplémentaires.
Ce montant a effectivement été demandé, monsieur le ministre, et cela rend plus complexe encore le débat en cours sur le budget 2013. Une telle hausse sur l’exercice 2012 pourrait conduire pour la France à un écart en exécution de 1, 5 milliard d’euros par rapport à la prévision votée en loi de finances pour 2012 !
Monsieur le ministre, quel serait l’impact précis de ce projet de budget rectificatif pour 2012, s’il est voté conformément à ce que propose la Commission européenne ?
Mes chers collègues, je vous ai rappelé ces données sur les exécutions constatées pour vous dire que l’estimation du prélèvement soumise au vote du Parlement doit être plus précise et plus fiable. Je fais part de cette exigence au Gouvernement et je compte sur lui pour faire valoir cette demande auprès de la Commission européenne et pour la traduire dans les documents transmis au Parlement.
L’annexe jaune « Relations financières avec l’Union européenne » au projet de loi de finances doit être plus complète, plus fidèle à la réalité et plus rigoureuse. Il n’est pas de bonne prévision et de bonne gestion qu’un besoin de couverture en paiement de près de 9 milliards d’euros de crédits de paiement soit révélé en fin d’exercice !
J’en viens à quelques remarques sur l’évolution de notre solde net.
La France devrait demeurer en 2013 le deuxième contributeur au budget communautaire derrière l’Allemagne et devant l’Italie, le Royaume-Uni et l’Espagne, la part de sa contribution représentant 16, 7 % du total des ressources de l’Union européenne, part qui semble se stabiliser enfin.
La France reste le premier pays bénéficiaire en recevant un peu moins de 12 % des dépenses de l’Union européenne, mais cette situation qui se dégrade est très fragile puisqu’elle ne résulte que du poids de la politique agricole commune. En effet, 75 % des crédits européens consommés en France sont des dépenses agricoles. Si l’on rapporte notre contribution aux dépenses, l’évolution de la situation est préoccupante.
Notre solde net se dégrade et a été multiplié par seize en dix ans. Il dépasse ainsi la barre des 6 milliards d’euros par an, faisant de notre pays le vingtième bénéficiaire des dépenses de l’Union européenne en retours par habitant !
En conclusion, et sous réserve de ces différentes observations, je vous recommande, mes chers collègues, au nom de la majorité de la commission des finances, d’adopter sans modification l’article 44 du projet de loi de finances pour 2013. Le refus de notre contribution serait un manquement à la parole de la France. §
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je remercie Marc Massion, qui a rappelé les aléas qui affectent le budget 2013 de l’Union européenne. Je précise que je partage la plupart des observations qu’il a formulées. J’y apporterai cependant quelques nuances, et je n’en arriverai pas à la même conclusion que lui. Je veux tenter, mes chers collègues, de vous en donner les raisons afin que, peut-être, je puisse emporter la conviction de certains d’entre vous.
Je ferai d’abord une remarque sur la structure du budget communautaire. Il s’agit pour caricaturer, et comme nous l’a indiqué à Bruxelles, voilà environ un mois, le président de la commission des budgets du Parlement européen, Alain Lamassoure, de la même structure d’ensemble depuis trente ans, en recettes comme en dépenses.
Et le pire est que l’on compte continuer cette partie de poker pour la programmation 2014-2020, avec la reconduction, en gros, de la politique agricole commune, des fonds structurels, des rabais et des corrections, chaque État membre défendant ses positions habituelles en fonction de ses intérêts financiers bien compris… Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes !
Au moment où la dépense publique doit plus que jamais répondre de son efficacité, une telle inertie est folie. Mes chers collègues, le budget européen est devenu une cagnotte, mais distribuer de l’argent ne suffit pas à faire une politique.
Se rend-on bien compte que les subventions versées au titre de la PAC tendent à transformer certains de nos agriculteurs en « rentiers de la terre » et vont à l’encontre d’une politique cohérente entre les différentes filières de nos productions agricoles ?
Nous allons importer 40 % de la volaille consommée en France, 35 % de la viande porcine et 20 % de la viande bovine. Qu’est-ce à dire sinon que l’élevage connaît une diminution de sa production et qu’on va le délocaliser, comme le seront aussi, par voie de conséquence, les activités agroalimentaires, avec les emplois qui s’y attachent ! Ce processus est engagé. Est-ce le résultat que nous attendons de la PAC ? La flambée du prix des céréales et les conditions dans lesquelles sont attribuées les subventions conduisent à cet état de fait, manifestement contraire à nos objectifs de cohésion sociale et de développement économique.
Se rend-on bien compte que les fonds structurels sont des « activateurs de dépense publique » en raison de leur fonctionnement par cofinancement des États membres ? La politique de cohésion a contribué au surendettement de nombreux États membres, dont la Grèce et l’Espagne !
Se rend-on bien compte que le système actuel des ressources propres n’est pas que complexe ? Il est opaque et injuste, avec le rabais britannique, les rabais sur ce rabais, les corrections sur la ressource propre TVA et, enfin, les chèques forfaitaires annuels.
Le chèque britannique avait peut-être, à un moment donné, une justification par rapport à la PAC. Mais est-on conscient de ce que capte la Grande-Bretagne du fait de ses activités financières à la City ? Qu’est-ce qui justifie le maintien d’un tel chèque ?
Ce système est, convenons-en, anti-communautaire ! Il perpétue des logiques nationales, au détriment de toute intégration politique.
Telles sont les remarques que je tenais à formuler au sujet de la structure du budget communautaire.
Permettez-moi maintenant d’évoquer la programmation budgétaire pour la période 2014-2020.
Je rappelle que cette question est encore en débat puisque le Conseil européen des 22 et 23 novembre dernier n’a pas permis d’aboutir à un accord. Je note d’ailleurs que ce dernier était annoncé comme décisif parce qu’il avait précisément pour objectif d’en finir avec les négociations, en vue de parvenir – enfin ! – à un compromis.
J’indique que les propositions de la Commission européenne sont, selon moi, inacceptables ; Marc Massion et moi-même en étions d’ailleurs déjà convenus voilà un an : alors que les propositions de la Commission étaient alors de 972 milliards d’euros de crédits de paiement sur sept ans, elles ont été portées, après avoir été actualisées le 6 juillet dernier pour tenir compte, essentiellement, de l’adhésion à venir de la Croatie à l’Union européenne, à 988 milliards d’euros au titre des crédits de paiement et à 1 025 milliards d’euros au titre des crédits d’engagement.
Ces propositions ne sont pas sincères.
En usant d’un premier artifice dans sa présentation, la Commission européenne minore les crédits qui seront mobilisés : elle communique en effet en euros constants, alors que seule une présentation en euros courants permettrait d’apprécier l’impact réel des propositions sur les contributions nationales. Ainsi, la réalité de l’augmentation de la dépense qui, chaque année, devra être réévaluée de l’inflation est volontairement masquée.
J’observe que tous les États membres calculent leurs contributions en euros courants et qu’ils font de même avec leurs programmations pluriannuelles quand ils en élaborent.
J’ajoute que, par un second artifice, la Commission européenne dissimule les tensions importantes que sa programmation exercera sur les finances des États membres : elle multiplie ainsi les débudgétisations incompréhensibles qui dégonflent artificiellement son projet.
Non seulement sont maintenus hors budget général de l’Union européenne et hors cadre financier pluriannuel le Fonds européen de développement, le FED, avec 30 milliards d’euros prévus pour la période 2014-2020, ainsi que les mécanismes de stabilisation financière, mais, surtout, passeraient hors budget des politiques pourtant communautaires financées sous plafond dans le cadre actuel, comme le projet ITER ou le programme GMES.
En euros courants, si l’on considère le périmètre classique de financement de l’Union européenne, auquel on ajouterait le FED et d’autres politiques débudgétisées, le total de la dépense serait de 1 191 milliards d’euros au titre des crédits de paiement et de 1 231 milliards d’euros au titre des crédits d’engagement, soit environ 200 milliards d’euros de plus que le projet initial de la Commission européenne.
À cet égard, mes chers collègues, je vous invite à regarder le graphique éloquent qui figure dans le rapport de la commission des finances.
Bref, par des artifices de présentation et par des débudgétisations inacceptables, la Commission européenne formule un projet de programmation pour 2014-2020 qui constitue une entorse au principe de sincérité budgétaire.
En outre, le niveau de dépenses proposé est tout simplement insoutenable, et il contredit notre stratégie de retour à l’équilibre.
Or, contrairement à ce que laisse penser le travail de la Commission européenne, l’Europe ne peut pas se placer en dehors des efforts exigés en matière d’assainissement des finances publiques – monsieur le ministre, ce n’est pas vous qui me démentirez… Elle doit plus que jamais dépenser mieux. À cet égard, je recommande un renforcement de la mise en œuvre vigilante du principe de subsidiarité, au regard duquel devraient être systématiquement examinés le budget, le fonctionnement et les politiques de l’Union européenne.
Pour finir de vous convaincre, mes chers collègues, j’élargirai mon propos en parlant de la gouvernance de la zone euro.
Dire que « le pire est passé », comme l’a affirmé il y a quelques semaines le Président de la République, François Hollande, relève de l’erreur d’appréciation ou, pis, d’une sorte de malhonnêteté.
Quoi qu’il en soit, c’est crier victoire un peu trop vite !
Le mécanisme européen de stabilité n’est pas un dispositif suffisant ; il appelle une gouvernance appropriée. Marc Massion l’a rappelé, l’union bancaire est un progrès prometteur. Mais, au moment où la Banque centrale européenne commence à se comporter en banque fédérale, elle attend son interlocuteur politique !
Le 6 mars dernier, j’ai remis un rapport au Premier ministre, dans lequel j’ai formulé quelques propositions, notamment la création d’un poste de ministre de l’économie et des finances, qui puisse prendre appui sur un véritable Trésor public européen, ainsi que la mise en place d’une capacité budgétaire de la zone euro. Nous ne pourrons pas éluder indéfiniment ces questions.
En matière de contrôle prudentiel, il serait bon, monsieur le ministre, d’aller voir ce qui se passe du côté de Chypre. Peut-être aurons-nous quelques surprises : ce pays a demandé, au mois de juin dernier, une assistance financière. Soyons donc attentifs à ce qui nous attend.
Pour le moment, on s’en tient à une sorte de window dressing, à de l’habillage de dispositions déjà adoptées, à l’image du plan de 120 milliards d’euros du Pacte pour la croissance et l’emploi annoncé par le Conseil européen le 29 juin 2012.
En la matière, ma position est divergente de celle de Marc Massion : tout cela est très bien sur le plan rhétorique, mais, sur le fond, rien, strictement rien, n’a changé, monsieur le ministre !
L’euro a été jusqu'à aujourd’hui un anesthésiant, mais une monnaie ne suffit pas à faire un projet politique ! Jusqu’à quand allons-nous continuer à entretenir une illusion d’Europe ?
Nous vivons sous sédatif, et si nous renonçons à reprendre sérieusement en main le projet politique européen, le réveil risque fort d’être très douloureux !
Il y a un an, lors du même débat, je vous avais fait part, mes chers collègues, de mon incompréhension à l’égard de la Commission européenne et du Conseil, qui ont laissé filer la Grèce dans une politique de trucage et de maquillage de ses comptes, transformant ainsi le pacte de stabilité et de croissance en un pacte de tricheurs et de menteurs.
Nous n’avons pas encore apporté de réponses politiques à ces errements ! Il y avait pourtant urgence ! Eh bien l’urgence est toujours là : le projet politique européen a besoin d’hommes pour le porter.
Pour conclure mon intervention, je plaiderai en faveur du rôle des parlements nationaux.
Dans le système communautaire actuel, les parlementaires nationaux se limitent à autoriser un prélèvement sur les recettes de l’État. Nous ne débattons pas, mes chers collègues, du niveau de ce prélèvement, pas plus que de l’usage qui en sera fait au travers des dépenses de l’Union européenne. Convenons-en, une telle situation n’est pas satisfaisante.
Un budget dont les dépenses sont arrêtées par les autorités communautaires, mais dont 85 % des ressources restent dépendantes de décisions des parlements nationaux, porte atteinte au principe du consentement à l’impôt, essentiel dans une démocratie.
Une plus grande reconnaissance du rôle des parlements nationaux paraît donc nécessaire. Nous devons, mes chers collègues, prendre toute notre place dans la réflexion en cours sur la réforme du budget communautaire et dans la coordination des finances publiques des États membres.
Je propose, par exemple, que nous soyons appelés à voter dans le cadre de la loi de finances initiale non seulement notre contribution au budget communautaire, mais aussi la totalité de nos engagements à l’égard de la zone euro, à l’instar de notre contribution au mécanisme européen de stabilité, directement par apports en capital ou par « engagements hors bilan », soit respectivement 16, 3 milliards d’euros et 126, 4 milliards d’euros pour la France, pour un total de 142, 7 milliards d’ici à 2016, ce qui représente 20 % du total des contributions.
Lorsque survient un sinistre au sein de la zone euro, lorsqu’un État membre est en difficulté, c’est non pas le budget de l’Union européenne qui participe, mais les États membres qui inscrivent, dans leur loi de finances, leurs contributions respectives. Ce niveau de solidarité est sans commune mesure avec ce qui existe entre les membres de l’Union européenne. C’est pourquoi il nous faut une véritable gouvernance économique, financière et budgétaire de la zone euro.
Je suggère aussi que les parlementaires nationaux de la zone euro soient représentés : ce serait l’amorce d’une seconde chambre dans l’Union européenne, qui aurait pour mission de surveiller et de contrôler la gouvernance de la zone euro.
Il vient un moment où il faut savoir dire « non » ! Mes chers collègues, ce moment est venu ! Aussi, je vous invite à rejeter l’article 44 du projet de loi de finances pour 2013.
Au moment où l’Union européenne reçoit le prix Nobel de la paix, elle devient le maillon faible de la croissance mondiale. Son budget et sa gouvernance doivent lui permettre d’assurer un rôle stratégique dans la guerre économique, afin de nous aider ainsi à sortir de la crise.
Je voterai contre cette contribution, tout en sachant que cela ne changera rien : l’exercice auquel nous sommes conviés est parfaitement formel ! Toutefois, nous devons exprimer au moins nos ressentiments, nos attentes et notre impatience. §
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’articulerai mon propos autour de trois sujets : la place de notre pays dans l’Union européenne, la dégradation de notre solde net budgétaire, c'est-à-dire la différence entre notre contribution budgétaire et les versements de l’Union européenne, et l’avenir de la politique agricole commune.
Pour ce qui concerne la place de la France dans l’Union européenne, je ne vous le cacherai pas, monsieur le ministre, je suis extrêmement inquiet : le spectacle offert par le dernier Conseil européen des 22 et 23 novembre dernier montre une certaine marginalisation de notre pays.
En effet, j’ai le sentiment que le couple franco-allemand se délite…
… et que la France s’affiche de plus en plus comme l’État qui prendrait la tête d’un groupe des États du Sud, soit la tête de ceux qui « décrochent » …
… ou qui risquent d’être en situation de décrochage.
Enfin, j’observe que nous nous opposons frontalement à la Grande-Bretagne, notamment dans le débat sur la politique budgétaire européenne ; nous n’avons aucun souci de dialoguer avec elle, alors que nous aurions sans doute des intérêts communs à défendre, au moins sur certains sujets.
En somme, mes chers collègues, je tiens à dire à cette tribune mon sentiment que la voix de la France s’affaiblit.
De surcroît, ce phénomène se produit à un moment où notre contribution au budget de l’Union européenne ne cesse de s’alourdir. Je suis d’ailleurs un peu surpris que l’on ne commente pas beaucoup les chiffres en la matière.
En effet, notre solde net, c’est-à-dire notre contribution nette au budget de l’Union européenne, qui représentait moins de 400 millions d’euros en 1999, s’est élevé à 6, 4 milliards d’euros en 2011, ce qui correspond à une multiplication par seize en dix ans.
Alors que la situation se dégrade année après année, est-ce un tabou dans la classe politique française, à gauche ou à droite ?
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ou au centre !
Sourires.
Est-ce un tabou ? Pourquoi ne pas regarder le problème en face ?
Le projet de loi de finances prévoit que notre contribution brute au budget de l’Union européenne s’établira à 19, 6 milliards d’euros en 2013 ; par comparaison, les dépenses de l’Union européenne sur notre territoire représentent un peu plus de 13 milliards d’euros.
Dans ces conditions, monsieur le ministre, ne serait-il pas temps que la France fasse d’un rééquilibrage une vraie priorité politique ?
En d’autres termes, plutôt que de critiquer par principe l’approche britannique, ne serait-il pas conforme à nos intérêts d’exiger nous aussi : « we want our money back ! »
Songez, mes chers collègues, que notre pays n’est que le vingtième bénéficiaire des dépenses de l’Union européenne rapportées au nombre d’habitants. Oui, le vingtième !
En effet, les dépenses de l’Union européenne en France représentent seulement 202 euros par habitant. Or savez-vous à combien s’élève ce montant au Luxembourg – un pays pour lequel Jean Arthuis et moi-même avons beaucoup de considération et que nous mentionnons souvent dans nos commentaires ?
Chaque habitant du Grand-Duché perçoit 3 065 euros, contre seulement 202 euros pour chaque Français !
De même, la France n’est plus que le huitième bénéficiaire de la politique agricole commune rapportée au nombre d’habitants, alors qu’elle en était encore le cinquième bénéficiaire il y a un an.
Figurez-vous, mes chers collègues, que la France perçoit 152 euros par habitant de dépenses agricoles, alors que l’Irlande bénéficie de 382 euros par habitant ! Dire que l’Irlande est un champion du dumping fiscal en Europe et que la France, bon élève toutes catégories confondues, exerce sur les entreprises une pression fiscale que je qualifierai, monsieur le ministre, …
… de très raisonnable !
… d’assez substantielle. Elle est en tout cas beaucoup plus élevée qu’en Irlande, ce qui visiblement nous pose un petit problème de compétitivité.
Mes chers collègues, permettez-moi de vous présenter, pour terminer, quelques observations au sujet de la politique agricole commune.
Le 30 juin 2011, nous avons pris connaissance des propositions de la Commission européenne, consistant à stabiliser le budget de la PAC en euros courants ; ce serait, à la rigueur, un minimum acceptable pour la France.
Seulement voilà : le 13 novembre 2012, le président du Conseil européen a proposé d’amputer de plus de 25 milliards d’euros les dépenses agricoles européennes.
Certes, nous avons obtenu que cette diminution soit limitée à 17 milliards d’euros ; mais il s’agit tout de même d’une baisse de 17 milliards d’euros !
Qu’en pense la France ? Quelle position prend-elle ? Le Président de la République a déclaré ceci : « je ne suis pas le leader de la politique agricole commune, même si je m’inscris dans une tradition française ». Comme toujours, ce sont des propos élégamment tournés, mais qui n’engagent pas beaucoup !
Il me semble que, en agissant ainsi, nous refusons d’assumer nos responsabilités et nous manquons de pugnacité dans la défense de nos intérêts. Pourquoi donc ?
Par ailleurs, je tiens à formuler une remarque plus qualitative sur le contenu de la politique agricole commune.
Dans les années soixante-dix, une approche fondée sur les excédents de production a conduit à délaisser, d’ailleurs avec retard, le soutien à la production.
C’est l’esprit qui a présidé à la mise en place des quotas laitiers en 1984 puis à la réforme Mac Sharry en 1992, à la suite de laquelle on a mis en place des aides directes calculées sur la base de facteurs fixes – les surfaces et les rendements historiques –, avec une obligation de mise en jachère.
En 2003, on est allé encore plus loin dans cette direction en mettant en place un système de paiement unique – les fameuses aides découplées – qui a rompu tout lien entre les aides versées et l’acte de produire.
Aujourd’hui, il serait question d’encourager davantage encore le développement rural et de privilégier une politique agricole environnementaliste ; bref, de faire de nos agriculteurs non plus prioritairement des producteurs, mais des gardiens du paysage – rôle au demeurant estimable.
Sans doute, monsieur Gattolin, mais les besoins alimentaires mondiaux ne disparaissent pas pour autant – vous-même nous le rappelez assez souvent.
Mes chers collègues, je suis de plus en plus convaincu que cette orientation de la politique agricole commune est, dans l’ensemble, une erreur.
MM. Jean Bizet et Jean-Paul Emorine acquiescent.
La volatilité des prix agricoles et les besoins croissants à l’échelle mondiale plaident pour une politique agricole européenne visant à produire plus et mieux. Malheureusement, je constate que le Gouvernement ne formule aucune proposition dans ce sens.
Peut-être le Gouvernement a-t-il quelques légères difficultés à réunir les fractions qui le soutiennent ? Même si on ne saurait lui en faire le reproche, le fait est que, comme l’illustre bien la situation actuelle au Sénat, la majorité est plurielle et qu’elle est traversée par des contradictions fortes.
Il faudrait pourtant mettre des propositions sur la table ! Qui le fera si la France, leader naturel de la politique agricole commune, n’assume pas son rôle économique et historique ?
Monsieur le ministre, vous qui êtes l’élu d’un département agricole, comme la plupart d’entre nous, vous allez sans doute nous présenter votre vision de la situation. Étant à présent habitué aux hésitations et aux changements de cap successifs du Gouvernement dont vous êtes l’un des membres les plus valeureux, je souhaite vivement que vous puissiez éclairer le Sénat.
En tout cas, je pense que, cette année encore, le débat sur la contribution de la France au budget de l’Union européenne sera utile ; cette question représente pour tous les groupes, sans doute plus au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, une véritable priorité politique.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP . – M. Jean Arthuis, rapporteur spécial, applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous constatons tous les jours que l’Europe est en crise. Cette crise est à la fois une crise financière, économique, une crise de la dette et désormais, malheureusement, elle est même une crise institutionnelle.
Par un hasard du calendrier, le débat sur l’article 44 du projet de loi de finances pour 2013 a lieu au moment où les événements se bousculent sur l’agenda communautaire.
L’attribution à l’Union européenne du Prix Nobel de la paix, qui lui sera solennellement remis le 10 décembre prochain, ne doit pas masquer les impasses dans lesquelles nous mène la gouvernance actuelle de l’Europe.
Lors du Conseil européen des 22 et 23 novembre dernier, les chefs d’État et de gouvernement des États membres ne sont pas parvenus à s’entendre sur le cadre financier pluriannuel pour les années 2014 à 2020 ; ils se retrouveront au début de l’année prochaine pour tenter d’arracher un accord, s’il est possible.
Par ailleurs, à l’heure où nous débattons de l’évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de notre participation au budget de l’Union européenne, la Commission européenne, le Parlement européen et le Conseil européen ne sont même pas parvenus à s’accorder sur le périmètre de ce budget.
Le Parlement européen a même bloqué les négociations, le trou dans le budget de l’année 2012 n’ayant pas été comblé. Cette situation laisse planer le doute sur la viabilité du programme de bourses étudiantes Erasmus ou sur le Fonds social européen, ce qui n’est tout de même pas rien.
Mes chers collègues, c’est dans ce contexte pour le moins incertain que le Sénat débat de la participation de la France au budget de l’Union européenne.
L’article 44 du projet de loi de finances pour 2013 fixe à 19, 6 milliards d’euros le prélèvement sur nos recettes au profit du budget de l’Union européenne. Cette somme est en nette hausse par rapport à l’année dernière : elle augmente de 3, 81 %, ce qui représente un accroissement de 720 millions d’euros.
Cet effort de la France n’est pas négligeable, même si la trajectoire de la participation au budget européen est désormais fixée par l’accord européen sur les perspectives financières et par les stipulations du traité de Lisbonne.
Alors que l’ensemble du projet de loi de finances pour 2013 est caractérisé par un objectif de maîtrise des dépenses publiques, nous tenons nos engagements à l’égard de nos partenaires.
Comme l’indique le rapport de nos collègues Marc Massion et Jean Arthuis, le montant de notre participation au budget de l’Union européenne a été multiplié par cinq en vingt ans en valeur absolue.
Relativement à celle des autres États membres, la contribution de la France est restée stable au cours de la période récente : autour de 16, 5% du budget de l’Union européenne, sauf en 2009 où elle a été un peu supérieure.
Second contributeur de l’Union européenne, la France reste le premier destinataire des aides du budget européen, même si, malheureusement, la balance entre ce que notre pays verse à l’Europe et ce qu’il en reçoit est désormais largement déficitaire.
Je partage l’avis de nos deux rapporteurs spéciaux, MM. Arthuis et Massion : une réflexion s’impose sur la réforme de la gouvernance de la zone euro et de l’Union européenne. À cet égard, je crois, comme vient de le dire Jean Arthuis, qu’il est nécessaire de mettre en place une gouvernance budgétaire européenne.
Certes, des progrès ont été réalisés depuis l’élection de François Hollande à la présidence de la République, notamment en ce qui concerne l’union bancaire, les project bonds et la Banque européenne d’investissement ; mais il est évident que nous devons aller beaucoup plus loin.
Dans le schéma actuel, l’élaboration du budget de l’Union européenne résulte d’une série de compromis entre la Commission européenne, le Parlement européen et les chefs d’État et de gouvernement réunis en Conseil européen.
Or une situation de blocage absolu existe à l’heure actuelle entre ces différentes institutions, s’agissant de la préparation du budget pour 2013. À ce sujet, M. le ministre pourrait peut-être apporter au Sénat un certain nombre d’éléments d’information sur l’avancée des négociations entre les États membres et les institutions communautaires, et la recherche d’un consensus sur le budget pour 2013.
La question se pose également du contenu de notre participation au budget de l’Union européenne.
En effet, alors que les textes communautaires prévoyaient initialement que le budget de l’Union européenne serait financé par des ressources propres, la participation de la France est aujourd’hui composée, pour environ 70 %, d’une part assise sur notre revenu national brut et, pour 13 %, d’une part provenant très indirectement de la ressource assise sur notre TVA ; le reste est constitué de droits de douane, de prélèvement agricoles et de cotisations sur le sucre.
Ce système cache assez mal que l’autonomie du financement de l’Union européenne est en réalité une illusion. En d’autres termes, les prétendues ressources propres de l’Union européenne ne lui sont pas vraiment propres.
La nécessaire réforme du mode de financement de l’Union européenne passe par la création d’une véritable fiscalité européenne.
À cet égard, le projet de création d’une taxe sur les transactions financières destinée à alimenter le budget européen est un premier pas, même si nous mesurons bien les réticences qu’une telle initiative a fait naître dans certains États membres.
Nous proposons donc une remise à plat de l’ensemble du financement de l’Union européenne, notamment du calcul de la « correction britannique », et la mise en place de véritables « impôts européens ». Ce système aurait l’avantage de la lisibilité, et les citoyens pourraient constater quelle partie de leurs impôts finance les institutions et les politiques communautaires.
Cette proposition s’approche des propositions formulées dans le Paquet sur les ressources propres de la Commission européenne, qui plaide en faveur d’une suppression progressive des rabais dont profitent certains pays, de la mise en place d’une taxe sur les transactions financières et de la création d’une nouvelle ressource assise plus directement sur la TVA.
M. Marc Massion, rapporteur spécial, préconise pour sa part la création d’un impôt harmonisé sur les sociétés. C’est une autre piste tout aussi intéressante et pertinente, même si nous sommes conscients des obstacles à sa mise en œuvre.
Les résultats du Conseil européen sur les perspectives financières 2014-2020 et les blocages autour du budget pour 2013 ont non seulement des conséquences économiques, du fait de l’incertitude de cette période, mais également des effets politiques dramatiques – il faut le souligner.
Le spectacle des marchandages des différents acteurs est de nature à apporter des arguments à tous les eurosceptiques. Je regrette qu’ils soient nombreux, et j’ai même parfois l’impression qu’ils le sont malheureusement de plus en plus !
L’Union européenne apparaît comme prisonnière des enjeux nationaux ou – disons-le ! – des égoïsmes nationaux.
Partisans d’une véritable Europe fédérale, les sénateurs radicaux de gauche sont favorables à plus d’intégration, plus d’harmonisation, ...
... plus de clarté. Cela passe également par une mutualisation des investissements d’avenir : croissance verte, recherche et développement, infrastructures européennes...
Mais nous débordons du cadre du débat qui nous réunit aujourd’hui et du temps imparti !
Permettez-moi de conclure en précisant qu’au sein du groupe RDSE les sénateurs radicaux de gauche s’accordent avec les conclusions de la commission des finances et sont favorables à l’adoption, sans modification, de l’article 44 du projet de loi de finances. Mais, vous l’aurez compris, ils attendent beaucoup plus, en particulier beaucoup plus d’Europe !
C’est le rôle de la France d’œuvrer pour que naisse cette Europe puissante, seule solution pour maîtriser la mondialisation et pour peser dans ce monde globalisé. §
Monsieur le président, permettez-moi de commencer mon intervention en rendant hommage à un grand homme de presse qui nous a quittés hier, Erik Izraelewicz, directeur du journal Le Monde.
Je le fais avec d’autant plus d’émotion que j’ai eu l’occasion, au cours de ma carrière professionnelle, de travailler avec lui. C’était un grand journaliste économique, l’un des rares à se passionner pour les débats qui rassemblent dans cet hémicycle, un matin comme l’an passé, un si petit nombre d’entre nous...
Je voudrais témoigner toute ma sympathie et toute ma solidarité à sa famille, aux membres de sa rédaction et à l’ensemble de la classe journalistique, celle qui honore la qualité du travail accompli à ce propos dans notre pays.
J’en viens maintenant au sujet qui nous occupe, disant d’emblée que le groupe écologiste votera naturellement l’article qui correspond à la contribution nationale au pot commun européen.
Comme cela a été rappelé plusieurs fois, la contribution de la France équivaudra en 2013 à environ 19, 6 milliards d’euros. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle se situe dans la continuité ! L’augmentation de 2, 9 % par rapport à l’an passé s’inscrit dans une tendance à la hausse qui ne s’est jamais démentie au cours des trente dernières années.
Je le dis, je trouve assez étonnants, pour ne pas dire hallucinants, certains des propos qui ont été tenus précédemment. Qu’avez-vous fait les années précédentes pour bloquer ce qui, tout à coup, vous paraît surréaliste ? Monsieur Jean Arthuis, j’ai beaucoup de respect pour vos propositions sur l’Europe, mais, en la matière, je ne comprends pas votre position !
J’ai qualifié les propos d’ « hallucinants », mais les circonstances nous poussent à être non pas hallucinés, mais plutôt inquiets, j’irai même jusqu’à dire révoltés !
Tout autant que la réalité des chiffres, la qualité de cette contribution reste également comparable à ce qu’elle était pour 2012. J’avais, l’an passé, souligné qu’un tel prélèvement pouvait être jugé à la fois trop faible et trop élevé...
Trop faible, car le budget global de l’Union européenne paraît d’année en année bien étriqué par rapport aux missions qu’on lui confie, sans parler de celles qui devraient lui échoir !
Trop élevé, parce que ce prélèvement correspond à une agrégation de revenus de natures très différentes et remplace des ressources propres au budget européen devenues à peu près inexistantes au fil du temps, alors qu’il ne devait, au départ, que les compléter à la marge.
Cette contribution recouvre à la fois la part de la TVA réservée au financement de l’Union européenne et la ressource attribuée en fonction du revenu national brut de notre pays, c’est-à-dire deux types de recettes ne renvoyant pas à la même réalité et naturellement pas au même calcul en termes d’évolution dans les années à venir.
Surtout, elle devrait être relativement moins importante dans le budget de l’Union européenne. Ce dernier est réputé autonome, mais la réalité nous démontre que les États membres détiennent toujours le dernier mot.
C’est particulièrement vrai aujourd’hui, alors que le Conseil européen de la semaine passée n’a pas permis de trouver un accord...
... sur le prochain cadre financier pluriannuel qui doit déterminer les grandes orientations budgétaires de l’Union européenne pour les sept années à venir.
Cet échec – espérons-le provisoire ! – est inquiétant, car, dans ce cadre financier à l’horizon de l’année 2020, se joue la question des moyens mis en œuvre pour des politiques communautaires aussi capitales que la politique de cohésion et les aides sociales, la politique de recherche et d’innovation, la politique agricole commune, la transition énergétique...
Face à l’ampleur de ces chantiers, quel sens y aurait-il à ne réfléchir qu’en termes de retour direct sur investissement et de contribution nette, État par État ? C’est justement cette politique qui est à l’origine des situations que nous connaissons, situations dans lesquelles les interlocuteurs qui contestent aujourd’hui l’approche européenne du Gouvernement et de l’ensemble de la Communauté sont ceux-là-mêmes qui critiquent en même temps les passe-droits acquis au fil du temps par la Grande-Bretagne et d’autres pays.
Quel sens voulons-nous donner au projet européen ? Quel sens ce dernier pourrait-il avoir sans l’appui d’un budget ambitieux ?
Il y a quelque chose de rageant quand l’échec des négociations au Conseil se résume à un différend portant seulement sur 30 milliards d’euros que le Royaume-Uni voudrait à tout prix retirer de l’enveloppe proposée pour le budget de l’Union pour la période 2014-2020 ! Je dis « seulement », car ces 30 milliards d’euros ne correspondent qu’à 0, 04 % du produit intérieur brut de l’Union européenne sur la période considérée.
Il y a quelque chose de rageant aussi quand on voit que l’Allemagne ainsi que la France – je dois le dire ! – souhaitent que l’enveloppe en question n’excède pas 960 milliards d’euros, soit 13 milliards de moins que la proposition avancée par M. Herman Van Rompuy, elle-même inférieure de 75 milliards à la proposition de la Commission européenne, alors que nous discutions, voilà quelques semaines, pour savoir si des programmes aussi capitaux qu’Erasmus ne risquaient pas de se retrouver en faillite !
Nous avions une belle unanimité pour nous insurger et nous questionner à ce sujet !
Il y a quelque chose de rageant toujours quand Angela Merkel refuse que la taxe sur les transactions financières permette d’abonder directement le budget communautaire et s’oppose aux demandes des pays européens les plus en difficulté, alors qu’on croyait l’Allemagne favorable à une Europe politique renforcée, alors qu’on croyait que la politique visait précisément à assurer, sinon à instaurer, une cohésion sociale digne de ce nom.
Il y a quelque chose de rageant enfin, quand on nous demande de sacrifier les investissements dans la transition énergétique, la recherche et l’innovation pour préserver la seule politique agricole commune, que l’on tarde en même temps à réformer. Pour résumer à l’extrême, nous aurions le choix d’assurer notre alimentation immédiate ou d’assurer l’avenir de notre alimentation... Quel dilemme !
Devant l’importance de ces défis, nous devons à mon avis nous fixer quelques principes simples.
D’abord, la France doit évidemment se conformer à ses obligations, en particulier s’agissant de la contribution qu’elle doit verser au pot commun.
Ensuite, la France doit faire du budget européen le pendant des missions prioritaires qu’elle se fixe à l’échelle nationale. Il serait insensé, par exemple, que l’éducation soit une mission prioritaire dans l’Hexagone, mais pas au niveau européen, ne serait-ce que parce que des programmes comme Erasmus doivent être préservés et étendus à de nouvelles catégories de la population. C’est d’ailleurs le vœu qu’a exprimé à plusieurs reprises le Premier ministre.
Cela veut dire que le Gouvernement devra a minima refuser tout compromis qui aboutirait pour la période 2014-2020 à un budget inférieur au budget prévu pour l’exercice 2013.
Je sais que le Gouvernement travaille déjà sur un certain nombre de pistes en matière de renforcement. C’est la question capitale des ressources propres qui sont fondées sur des recettes à la fois nouvelles et dynamiques pour abonder directement le budget de l’Union européenne. Il y a la taxe sur les transactions financières, bien sûr, mais aussi la fiscalité écologique, l’idée d’une fiscalité plancher au niveau européen sur les entreprises ou encore une taxe sur le trafic portuaire de marchandises.
Dans la recherche d’un difficile équilibre entre attribution de moyens suffisants à l’Union et consolidation des finances publiques, cette politique européenne pourrait bien, à terme, conduire à augmenter le budget européen tout en diminuant les contributions nationales.
L’idée de demander au budget de l’Union européenne, qui est de toute façon en équilibre, de procéder à une politique de rigueur équivalente à celle qui est menée au niveau national et dans nos collectivités territoriales est quelque chose d’aberrant. D’où viendront la relance économique et la dynamique européenne ?
En tout cas, si nous parvenions à augmenter le budget européen tout en diminuant les contributions nationales, ce serait une avancée bienvenue vers une nouvelle façon de penser les relations entre gouvernements et institutions communautaires. Il y a, en la matière, une véritable urgence ! §
Monsieur le ministre, imaginez !
Imaginez que le budget européen soit alimenté au moins à 60 % par des ressources propres, comme ce fut le cas par le passé.
Imaginez que l’on ait décidé que les recettes du budget européen seraient essentiellement constituées par le produit de taxes européennes créées ou transférées en partie à cet échelon : la taxe sur les transactions financières certes, mais aussi une partie de la TVA – d’une vraie TVA ! –, des taxes sur le tabac, sur les alcools, une partie du produit des enchères de quota d’émission de CO2, une taxe sur l’énergie, une taxe sur les jeux en ligne, une taxe sur le commerce des armes, par exemple.
Imaginez que les chefs d’État et de gouvernement aient compris qu’il est erroné, s’agissant du budget, de raisonner de la même façon aux niveaux européen et national. Imaginez que chaque nation endettée songe prioritairement à réduire sa dette, mais que l’Europe, qui ne l’est pas, puisse et doive donner la priorité à une vraie politique de relance et de croissance.
Imaginez que les chefs d’État et de gouvernement aient compris qu’en acceptant de transférer ou de créer une série de taxes au niveau européen ils acquerraient des marges de manœuvre supplémentaires pour lutter contre leurs dettes souveraines, puisque leurs cotisations au budget européen en seraient diminuées d’autant.
Imaginez que les chefs d’État et de gouvernement ayant compris tout le parti que l’on pouvait tirer d’un budget à ressources propres aient décidé de doubler le budget européen d’ici à 2020, passant de 1 % – à vrai dire 1, 3 % si l’on rebudgétise toutes les dépenses – à 2 % du RNB quand l’étage fédéral aux États-Unis est à 23 %.
Imaginez que l’Europe soit désormais autorisée à emprunter dès lors qu’elle s’appliquerait à elle-même les règles du TSCG.
Imaginez, monsieur le ministre, que l’Europe cesse d’être un club de cotisants passant son temps à vouloir diminuer les contributions, à ne raisonner que selon la théorie du « juste retour » et à se disputer sur des montants de rabais.
Imaginez que les peuples d’Europe comprennent tout à coup que, face à la mondialisation, c’est en étant plus européens qu’ils pourront rester souverains.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je dois l’avouer, ce débat sur la participation de la France au budget de l’Union européenne prend ces jours-ci un relief assez particulier.
Il intervient quasiment au terme de la discussion d’un projet de loi de finances qui vise notamment à consacrer la progression de la participation de notre pays, première étape d’une hausse qui ira de pair, soulignons-le, avec une réduction du prélèvement sur recettes effectué en direction des collectivités locales.
Il est évident que cette progression de la contribution française va au-delà de la simple prise en compte de l’apparition prochaine d’un vingt-huitième invité à la table européenne, à savoir nos amis de la République de Croatie. La part de la population de ce pays et celle de son PIB ne représentent respectivement, dans le cadre de l’Union européenne, qu’à peine 0, 8 % et 0, 7 %, soit bien moins que la progression de notre contribution.
Clairement, il existe donc d’autres raisons pour lesquelles la contribution de la France est amenée à croître, quand bien même l’adhésion de la République de Croatie, au demeurant actuellement gouvernée par une alliance de centre gauche, devrait se traduire pour ce pays par un versement d’aides communautaires supérieur à son propre apport au budget.
Le problème est que la nécessaire mise à plat du mode de financement de l’Union européenne, même si nous ne doutons pas de la volonté du Gouvernement de peser dans un certain sens en la matière, se déroule dans le cadre d’une négociation intergouvernementale où tout se passe plutôt mal. De fait, on aurait pu croire que, dans le contexte de crise économique et sociale aggravée que connaît l’Europe depuis 2008 – la situation antérieure n’était, à la vérité, guère meilleure –, la solidarité entre les États prendrait le pas sur toute autre considération. Ce n’est pas tout à fait le cas, chacun ici en conviendra aisément.
M. Cameron, Premier ministre britannique, veut absolument garder son « chèque », jadis négocié par Margaret Thatcher et qui permet au Royaume-Uni de ne pas payer ce qu’il devrait payer. Mme Merkel souhaite que le budget connaisse une inflexion à la baisse plus marquée, et en profite pour s’attaquer à certaines dépenses d’action sociale et caritative, notamment, nous l’avons vu, aux aides alimentaires. Quelques-uns des pays du Sud, ces éternels dépensiers aux yeux de certains de nos partenaires européens peu charitables, se battent pour maintenir à peu près à flot une politique agricole commune dont leurs agricultures ont le plus grand besoin.
Au cœur de la crise, donc, et alors même que semblent s’accumuler les nuages les plus sombres sur le devenir des économies européennes, que le concours d’austérité qui s’est déclenché de Gibraltar à la Carélie et du Donegal au Dodécanèse fait de l’Union européenne un objet de risée ou d’inquiétude, ou des deux à la fois, pour les autres économies du monde, prime une fois encore le chacun pour soi, très loin de l’indispensable solidarité qui devrait prévaloir en son sein, mais très près, à l’inverse, des principes de concurrence libre et non faussée inscrits au cœur même de ses traités.
Concours d’austérité, disais-je. Hélas ! car aucun signe ne semble pouvoir soustraire le moindre pays de l’Union à cette logique mortifère appliquée aux objectifs généreux et généraux de la construction européenne.
Aujourd’hui, quel que soit le pays considéré, les recettes appliquées sont un peu trop souvent les mêmes : hausse de la fiscalité indirecte, réduction des dépenses publiques, baisse des prestations sociales, mise en cause des salaires et des éléments de rémunération des agents du service public, privatisation des entreprises publiques dans certains cas. Toute la palette des politiques d’austérité se dévoile et se déploie, sans le moindre résultat concret.
L’euro, la monnaie sur laquelle beaucoup fondaient quelques espoirs, est en difficulté, perdant des points face au dollar ou au franc suisse, devenant l’objet d’une spéculation souvent menée à partir des plateformes boursières situées sur le territoire même de l’Union, comme celles de Londres ou de Luxembourg. Il est temps de changer d’ère en Europe !
Plus que d’un budget européen, les peuples de l’Union ont désormais besoin d’un projet facilitant la pleine expression des compétences et des potentiels de chaque pays et permettant des avancées sociales, économiques et environnementales, l’harmonisation fiscale serait également la bienvenue, le Vieux continent en a besoin.
Nous ne voterons pas l’article de prélèvement européen en l’état, les attendus de la politique menée par la Commission européenne et les lobbies bruxellois ne répondant aucunement aux attentes des peuples européens. §
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre débat de ce jour est un débat rituel. Il clôt la première partie du projet de loi de finances et marque l’interpénétration budgétaire entre la France et l’Union européenne. Je me dois de le rappeler, il s’agit d’une initiative prise par le président Poncelet en 1989.
Ce débat intervient cette année dans un contexte de grande négociation budgétaire. Je soulignerai quelques données avant d’évoquer mes espoirs et mes appréhensions.
Le premier élément de contexte est bien sûr la crise économique et budgétaire des États membres. L’Europe peut-elle se dispenser des efforts réalisés par les États eux-mêmes en matière budgétaire ? Deux logiques s’affrontent. Il est clair que la relance sera européenne ou ne sera pas. Par conséquent, il faut des moyens budgétaires à l’Union. Mais il est tout aussi évident que cet argent, si nécessaire, est prélevé pour l’essentiel sur les recettes fiscales des États membres.
Ainsi, 85 % de la participation française est issue de ces prélèvements nationaux, qui atteignent cette année 19 milliards d’euros, soit 300 euros par habitant et par an. Il s’agit de l’une des plus fortes participations par habitant de l’Union. Une part importante du financement d’autres États provient en effet des droits de douane aux frontières de l’Union, ce qui fausse un peu les comparaisons.
Une telle situation résulte d’une décision sur les ressources propres datant de 2007. À cette époque, nous avions sauvé la PAC dans le cadre financier pluriannuel 2007-2013, mais cette victoire avait été payée par une décision qui augmentait grandement notre contribution, laquelle est passée de 15, 4 milliards d’euros en 2007 à 19, 5 milliards d’euros cette année.
L’évolution est plus spectaculaire encore si l’on considère notre contribution nette, puisque notre solde est passé de moins 3 milliards d’euros en 2007 à moins 6, 4 milliards d’euros en 2011. Je connais et partage les arguments opposables à ce décompte, mais lorsqu’il s’agit de débattre du budget européen, il n’est pas déplacé de rappeler ces chiffres.
Le contexte budgétaire est donc celui d’une participation accrue, en brut et en net, au budget européen. Une telle situation explique que se soit exprimée une demande de rigueur dans les affaires de l’Union. Dans une négociation budgétaire, les États comptent, trop, sans doute, mais c’est la règle du jeu suivie par tous.
D’ailleurs, la négociation, qui peut être très dure – on l’a vu la semaine dernière –, s’accompagne de quelques lueurs d’espoir.
L’avancée à mon sens la plus prometteuse concerne le financement du budget. En 2005, le Conseil européen s’était engagé à évoquer ce sujet. En 2011, le Parlement européen avait fait monter la pression pour débattre du financement. La Commission a fait ses propositions. Toutes ne seront pas retenues, mais ce qui restera me paraît fondamental. Je veux parler, bien sûr, de la taxe sur les transactions financières défendue par la France depuis longtemps. En effet quelques États s’engagent dans une coopération renforcée, c’est-à-dire autour d’un noyau dur d’États membres qui veulent aller plus loin dans l’intégration européenne. C’est un pas considérable, qui ouvre la voie à d’autres coopérations en matière fiscale, voire budgétaire, puisque le président Van Rompuy a même évoqué un budget spécifique pour la zone euro. Si cette coopération renforcée avance – je souhaite que tel soit le cas –, ce sera sans nul doute une étape importante pour la construction européenne.
Mais tout ne prête pas à satisfaction. Je pense même que la France ne s’engage pas dans la négociation budgétaire européenne avec les meilleurs atouts.
Pour notre pays, tout commence en décembre 2010, lorsque le Président de la République cosigne une sorte de lettre de cadrage demandant à la Commission une stabilisation du budget sans indexation sur l’inflation. La procédure suit son cours avec la présentation, en juin 2011, de la proposition de la Commission, révisée en juillet 2012. Une première proposition de conciliation de la présidence chypriote intervient en octobre 2012, et une seconde, du président Van Rompuy, en novembre 2012.
Parallèlement, les États se sont positionnés. Deux camps s’opposent : celui des amis du better spending, ou « dépenser mieux », mené par l’Allemagne, et celui des amis de la cohésion, mené cette fois par la Pologne, qui veulent surtout garder les fonds structurels. La paix budgétaire issue du cadre financier qui sera adopté est préparée par une série de crispations, voire une quasi-guerre budgétaire, que se livrent entre eux les États membres. C’est assez classique : chaque État défend ses positions et, en réalité, défend surtout ce qu’il a. Tous les États sont d’accord pour couper dans les crédits, mais surtout dans les crédits des autres. Il s’agit d’une procédure habituelle, toutes les négociations se déroulant de la même façon.
Je suis globalement confiant dans l’avenir, puisque j’ai la quasi-certitude que le Conseil parviendra à un accord à l’unanimité, soit dans les semaines qui viennent, c’est-à-dire en décembre, soit début 2013, vraisemblablement en janvier. Il est très probable que, comme à l’accoutumée, l’accord final se fera sur une base très proche de la position initiale des contributeurs nets. Il comprendra, hélas ! quelques dérogations, qui permettront aux États les plus réticents de signer l’accord.
Si je suis confiant sur l’accord global, je suis en revanche plus inquiet en ce qui concerne la position française. Dans une négociation budgétaire, l’avantage est toujours à celui qui a une stratégie, un objectif. Les Anglais veulent garder leur rabais, ils l’auront. Les Allemands veulent un budget correspondant à 1 % du revenu national brut, leur position est claire. Il faut admettre que la France a toujours eu une position plus ambiguë.
Voilà un an, notre pays s’était fixé deux objectifs : ne pas augmenter le budget global et maintenir le budget de la PAC. La nouvelle majorité a fixé des objectifs légèrement différents puisque l’on continue à privilégier un budget restrictif, tandis que les déclarations officielles clament aussi la nécessité de maintenir la part de la PAC dans le budget, de soutenir les fonds structurels – en particulier en France, bien sûr –, et de renforcer les politiques de compétitivité.
Nous avions hier deux objectifs, ce qui n’était déjà pas simple. Maintenant, nous en avons quatre, ce qui complique singulièrement les choses. C’est même la quadrature du cercle ! La lisibilité des revendications de la France en est très lourdement entachée.
On ne peut pas demander plus d’argent pour la PAC, la cohésion et la compétitivité, et, en sous-main, se ranger derrière l’Allemagne pour obtenir une baisse du budget. C’est la première faiblesse. Nous faisons preuve d’une sorte d’hypocrisie budgétaire, qui n’est pas à notre honneur.
Notre seconde faiblesse concerne le budget de la PAC. L’ancien Président de la République s’était prononcé pour le maintien du budget « à l’euro près » ; le nouveau Président s’est engagé à maintenir la part de la PAC dans le budget, ce qui n’est pas tout à fait la même chose, car lorsque le budget d’ensemble diminue, le montant qui revient à la PAC diminue également. C’est très probablement ce qui va se passer. La Commission avait fait une proposition sérieuse prévoyant 386 milliards d’euros sur sept ans sur la rubrique 2, ce qui revenait à reconduire le budget de la PAC à son niveau de 2013 sans l’indexer sur l’inflation. Ainsi, l’engagement de l’ancienne majorité était satisfait. Mais, dans la proposition de conciliation du président Van Rompuy, le budget de la PAC perd 22 milliards d’euros. Ce serait autant de moins pour nos agriculteurs. L’engagement de maintenir la part de la PAC dans le budget global sera respecté, mais – l’artifice est là – le volume diminuera. C’est une vérité que l’on doit aux Français.
Applaudissements sur les travées de l'UMP . – M. Jean Arthuis, rapporteur spécial, applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au préalable, je tiens à exprimer mon regret que, dans ce débat, la commission des affaires européennes ne dispose pas d’un temps de parole spécifique. Il me semble qu’il ne serait pas inutile de l’entendre en tant que telle lorsque le Sénat délibère sur le prélèvement au profit du budget européen. De fait, j’interviens au nom de mon groupe.
Le contexte de ce débat est difficile, pour ne pas dire empoisonné. Nous l’avons senti dans certaines interventions. Il l’est, d’abord, parce que la signification du vote que nous émettons n’est pas claire. Nous autorisons un prélèvement qui, en réalité, est une obligation découlant à la fois des traités et des décisions sur les ressources propres du budget européen. Nous avons approuvé, en leur temps, ces traités et ces décisions. Nous serions donc incohérents en refusant de remplir cette obligation.
À cet égard, je suis triste et déçu de la position qu’a adoptée l’un des deux rapporteurs spéciaux, notre collègue Jean Arthuis, qui appelle à voter contre cet article, tout en nous expliquant que, de toute façon, ce vote sera inopérant. Pour quelqu’un qui a toujours défendu des positions favorables à l’Europe dans cette enceinte, c’est quelque peu décevant.
Sourires.
Mon cher collègue, vous exprimez votre point de vue, nous exprimons le nôtre ; nous respectons votre position, respectez la nôtre !
Mais ce qui empoisonne surtout le débat budgétaire européen, qu’il s’agisse du budget annuel ou du cadre financier pluriannuel, c’est la controverse permanente sur le solde net de chaque État.
Cette controverse dure depuis près de trente ans. Il y a eu le rabais britannique, puis le « rabais sur le rabais » accordé à quatre pays, puis le plafonnement du rabais pour tenir compte de l’élargissement de l’Union.
À force de ravaudage, nous sommes arrivés à un système aussi complexe qu’injuste : le Royaume-Uni bénéficie désormais d’un traitement de faveur puisque sa contribution nette au budget européen est inférieure à celle de la France ou de l’Italie, ce dernier pays étant pourtant moins prospère. On ne peut pas continuer ainsi. Raisonner en termes de solde net, monsieur Arthuis, c’est nier tout ce que la construction européenne apporte ou pourrait apporter à chacun des pays membres. Les négociations budgétaires apparaissent comme un jeu à somme nulle où chaque gouvernement veut apparaître plus habile que les autres pour défendre des intérêts nationaux entendus dans le sens le plus étroit.
M. François Marc s’exclame.
Imaginons ce que serait la discussion budgétaire dans notre pays si le sujet principal était ce que chaque région donne au budget de l’État et ce qu’elle en reçoit !
M. André Gattolin applaudit.
La négociation du budget pour 2013 est empêtrée dans un conflit entre le Conseil et le Parlement européens. Celle qui porte sur le cadre financier pluriannuel n’a pas abouti lors du Conseil européen extraordinaire qui vient de se tenir.
Parallèlement, la situation de la Grèce appelle des décisions qui vont peser, d’une manière ou d’une autre, sur l’endettement des pays de la zone euro.
Tout est là pour que nous perdions de vue ce qui nous réunit et ce que nous récoltons en agissant ensemble.
On ne peut pas quantifier en termes budgétaires ce qu’a apporté la construction progressive du marché unique européen. Mais qui peut penser que, sans lui, les entreprises européennes auraient su s’adapter à la mondialisation ? Qui peut penser, en particulier, que la Grande-Bretagne aurait pu réussir son redressement sans sa participation au marché unique ?
Souvenons-nous de l’état de l’économie britannique à l’époque où elle restait en dehors de l’Union européenne !
On ne peut résumer l’Europe à une contribution et à un « retour » budgétaire. J’ai déjà eu l’occasion de le dire à cette tribune : la politique de cohésion coûte certes cher à la France. Toutefois, m’exprimant devant une assemblée qui compte en son sein de nombreux élus locaux et qui représente les collectivités locales de notre pays, je pose la question suivante : sans cette politique, que resterait-il de la politique d’aménagement du territoire ? Et quelle serait aujourd’hui la situation de nos départements d’outre-mer ?
À cet égard, nous avons voté à l’unanimité, ce qui ne leur en a donné que plus de force, deux propositions de résolution européenne, voilà une dizaine de jours. Je crois savoir que, lors du dernier Conseil européen, des avancées se sont fait jour en la matière, ce qui est positif.
C’est pourquoi, pour ma part, contrairement à notre collègue Jean Bizet, je suis reconnaissant au Gouvernement d’avoir rééquilibré la position française en cessant de considérer la politique de cohésion comme une variable d’ajustement. C’était d’autant plus nécessaire au vu de la proposition du commissaire Johannes Hahn de créer la catégorie des « régions en transition », création que le Sénat a soutenue par le vote, là encore unanime, d’une proposition de résolution européenne. La création de cette catégorie permettrait aux régions métropolitaines les moins développées de recevoir des moyens accrus, sans que cela diminue, j’y insiste, l’enveloppe des autres régions françaises.
De même, où en serait aujourd’hui l’agriculture européenne sans la politique agricole commune ? Je n’ignore pas les injustices et les carences de cette politique commune, qui privilégie à l’excès les grandes cultures au détriment des autres productions, notamment les productions méditerranéennes – la vigne, les fruits et légumes –, et ce alors même que les cours mondiaux sont élevés, mais reconnaissons aussi ce que cette politique représente pour la sécurité alimentaire de l’Europe et l’entretien de son territoire.
Si nous avions fait confiance aux marchés internationaux pour notre approvisionnement, comme le voulaient les Britanniques, que se serait-il passé lors de la crise de 2007 ? L’Europe n’aurait pu s’approvisionner, à grands frais, qu’au détriment des pays d’Afrique et d’Asie les plus pauvres. Est-ce vraiment le rôle que nous voulons lui voir jouer ? Je pourrais continuer cet exercice d’« Europe fiction ».
À cet égard, je veux dire que j’ai beaucoup apprécié l’intervention de notre collègue Pierre Bernard-Reymond, que j’ai trouvée juste. Je ne doute pas que, un jour, ses propos se traduiront dans la réalité.
Il est de bon ton aujourd’hui de s’interroger sur la monnaie unique, mais imaginons l’Europe avec des monnaies nationales lors de la crise de 2008-2009 ! Nous aurions vu certaines d’entre elles s’effondrer tandis que d’autres se seraient trouvées complètement surévaluées ; le marché unique serait alors devenu une fiction.
Il faut donc arrêter de ramener l’Europe à une bonne – ou mauvaise – opération comptable et plutôt se demander ce que nous attendons d’elle, quelles orientations nous voulons retenir pour la construction commune et définir ensuite quels sont les moyens nécessaires pour les traduire.
Je ne surprendrai personne en disant que je soutiens les deux grandes orientations défendues par le Président de la République, « l’intégration solidaire » et le soutien à la croissance. Mais je crois – en tout cas, je l’espère – que ce n’est pas par esprit partisan, car il me semble que ces orientations doivent pouvoir recueillir une large adhésion, au-delà des clivages politique nationaux. Lorsqu’il s’agit de l’Europe, ces clivages ne sont pas l’alpha et l’oméga et nous devons être capables de les dépasser.
Nous avons besoin de plus d’intégration. Nous savons désormais que la zone euro ne pourra fonctionner dans la durée sans une coordination bien plus étroite des politiques économiques et budgétaires.
Nous savons qu’il est indispensable de réaliser l’union bancaire pour ne pas retomber dans une crise analogue à celle dont nous subissons aujourd’hui les séquelles.
Et, sans relancer les controverses idéologiques, il faudra bien tirer les conséquences institutionnelles de cette exigence d’intégration renforcée.
Je voudrais à cet égard rappeler que, pour nous, tant le Parlement européen que les parlements nationaux doivent pouvoir jouer pleinement leur fonction de contrôle, y compris par des dispositifs interparlementaires appropriés.
Nous sommes tous d’accord sur ce point.
Plus d’intégration doit aller de pair avec plus de solidarité.
Dès lors que nous partageons de plus en plus nos souverainetés, les uns ne peuvent réussir au détriment des autres. Cela suppose que nous avancions dans la mutualisation de la dette ainsi que dans l’harmonisation fiscale et sociale.
Avec le Fonds européen de stabilité financière et le Mécanisme européen de stabilité, nous avons déjà fait un pas considérable en termes de solidarité au sein de la zone euro, mais cette solidarité ne doit pas seulement se manifester pour les sauvetages : elle doit être la reconnaissance par les pays membres qu’ils réussiront ensemble ou qu’ils échoueront ensemble.
Enfin, nous attendons de l’Union qu’elle ouvre des perspectives de croissance à une Europe en stagnation. La nécessaire rigueur doit être contrebalancée par un soutien européen à l’activité. Cela peut passer dans certains cas par l’approfondissement du marché unique – je pense par exemple au brevet communautaire, cher à notre collègue Richard Yung, ou à la sécurisation du commerce électronique. Cela passe aussi – et surtout – par le soutien à l’investissement prévu dans le pacte de croissance, qu’il faut concrétiser plus rapidement.
Bon gré mal gré, la crise financière nous a fait entrer dans une nouvelle phase de la construction européenne. L’intégration solidaire et le retour à la croissance lui donneront un sens aux yeux des citoyens, parfois tentés d’en revenir aux égoïsmes nationaux. C’est dans cet esprit que, avec mon groupe, je voterai le prélèvement au profit du budget de l’Union européenne.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la crise des dettes souveraines que nous traversons nous rappelle chaque jour à quel point l’Europe est le meilleur bouclier de notre prospérité et du développement de notre continent. Il n’y a pas d’Europe forte sans un budget européen solide ; pour autant, un budget européen ne se mesure pas tant à l’évolution des crédits qui y sont alloués qu’à celle des dépenses qui y sont inscrites.
Avec nombre de nos collègues ici présents, je ne peux que m’insurger contre les dérives et les cafouillages qui entachent les négociations relatives au prochain budget pluriannuel de l’Union.
Le mal dont souffre l’Union européenne est propre à celui des grandes organisations. Nous privilégions trop, au niveau européen, les dépenses de fonctionnement et insuffisamment les investissements stratégiques.
J’évoquerai un investissement stratégique : Erasmus. En tant que vice-président de la commission des affaires étrangères et membre suppléant de la délégation française à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe ainsi que membre de la délégation française à l’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l’OSCE, je voyage fréquemment et rencontre beaucoup de monde. Chaque fois que je m’entretiens avec des spécialistes des affaires internationales, qui portent un regard acéré sur le monde, je leur demande quel est le problème du monde aujourd’hui. Et chaque fois, à ma grande surprise, leur réponse est la même : ce n’est ni le problème israélo-palestinien, ni la mondialisation, ni la montée en puissance de la Chine, de l’Inde et du Brésil, c’est le manque d’éducation, c’est la rupture entre ceux qui sont formés et ceux qui ne le sont pas.
Pendant des décennies, le programme d’échanges Erasmus a permis à des centaines de milliers d’étudiants européens de voyager et de découvrir différents pays membres de l’Union. Le pilier de ce programme volontariste, ce sont les bourses d’études. Or ces dernières sont de plus en plus difficiles à financer et leur tarissement menace à moyen terme la survie du programme.
On pourrait se dire tout simplement que, si ce programme disparaît, c’est que la demande n’était plus au rendez-vous. Après tout, pourquoi voyager si l’on a Internet ? Pardonnez-moi ce trait d’ironie, mes chers collègues. Le tableau est bien différent. En France, le fossé se creuse de plus en plus entre ceux qui ont la possibilité de voyager et les autres.
Mes collègues de l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche, dont j’ai été membre, n’ont produit aucun rapport sur ce sujet, mais, chaque fois que je les interroge, ils me disent que là est le fossé, entre ceux qui peuvent voyager, qui maîtrisent les langues étrangères, et les autres.
Ce fossé existe dans tous les milieux sociaux et s’observe ensuite à tous les échelons du marché du travail, que ce soit au sein des entreprises, qui recrutent de plus en plus de membres de leur personnel dirigeant à l’étranger, ou dans l’administration – d’où mon intervention destinée à contester l’article 8 du présent projet de loi de finances –, où il est impensable de présenter un concours de catégorie A sans une solide formation et une riche expérience d’une langue étrangère.
Depuis son lancement opérationnel en 1993, Erasmus a contribué à tisser des liens d’amitié entre des millions de citoyens européens, entre des millions de familles. Un an après l’adoption par la France du traité de Maastricht, une véritable révolution était en marche, peut-être plus profonde et plus déterminante encore que la création de l’euro : je songe évidemment à la naissance d’une citoyenneté européenne qui soit véritablement vécue, ressentie et revendiquée comme telle, au-delà d’une simple mention sur un passeport.
À ce titre, je rappelle le constat que je viens de dresser : en France, ce fossé est profond, et Erasmus le comble en partie. Il faut le savoir, 100 % des étudiants qui passent par les grandes écoles se rendent à l’étranger et y suivent des stages, tandis que seul 1 % des étudiants de l’université bénéficient du programme Erasmus. C’est, avec la politique agricole commune, un des enjeux fondamentaux du budget européen !
Parallèlement, Vitor Caldeira, le président de la Cour des comptes européenne, dénonce les gabegies gestionnaires des institutions de l’Union, au premier rang desquelles le Parlement européen.
Mes chers collègues, vous connaissez les budgets du Sénat et de l’Assemblée nationale. Le budget du Parlement européen, c’est 1, 2 milliard d’euros de frais de fonctionnement ! Cette assemblée croule sous l’argent et ne fait aucun effort de gestion. Je l’ai déjà dit bien des fois, et je le répète.
Construire le fédéralisme européen, ce n’est pas abandonner toutes les responsabilités à Bruxelles en se contentant de geindre et de se plaindre face aux décisions européennes ! Le fédéralisme européen, au sens où l’entendent les sénateurs du groupe UDI-UC, c’est laisser à chacun la juste place qui lui revient et sa juste compétence.
Le fédéralisme est donc à la fois un outil de simplification et de responsabilisation. Dans un système fédéraliste, chacun trouve sa juste place en accomplissant ce que lui seul peut faire.
Je vous parle du fédéralisme parce que je considère que ces dysfonctionnements, que trahit le budget européen, ont une seule et unique cause : en dépit de nos vœux pieux, nous freinons des quatre fers dès lors que l’on aborde la logique fédéraliste.
La politique de basse cuisine qui se joue parfois entre les États au niveau du Conseil ou de la Commission, par commissaires interposés, peut aboutir à des aberrations gestionnaires en termes de politiques publiques.
À ce titre, je ne citerai qu’un seul exemple. Depuis le 1er janvier 2009 et l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, l’Union européenne a adhéré formellement à la Convention européenne des droits de l’homme qui, en un demi-siècle, est parvenue à créer le plus fantastique espace de protection des droits et des libertés fondamentales que l’histoire ait sans doute jamais connu.
Or, dans le même temps, et du fait du Conseil de l’Europe, il aura suffi que l’Autriche réclame une action spécifique de l’Union sur la question des droits de l’homme pour qu’apparaisse une agence des droits de l’homme – dont le siège est à Vienne – et un nouveau commissaire européen, le tout pour un coût de presque 100 millions d’euros, si mes chiffres sont exacts.
Évidemment, ce volume budgétaire semble négligeable au regard de la masse financière globale, mais toutes ces vétilles mises bout à bout nous renvoient aux insuffisances propres au pilotage stratégique du budget de l’Union européenne. L’Europe a besoin d’un budget plus solide, mieux construit et mieux employé. Le chantage auquel nous contraint David Cameron au nom du sacro-saint rabais britannique est un scandale politique.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes à la croisée des chemins. L’Europe est au bord du saut fédéral que, sur les travées centristes, nous appelons de nos vœux depuis des décennies.
Jusqu’à présent, les institutions fédérales de l’Union ont été le meilleur pare-feu à la crise. La Banque centrale européenne – celle-ci nous a peut-être sauvés ; Mario Draghi nous a peut-être sauvés – a joué son rôle en matière de politique monétaire fédérale. C’est désormais au Conseil, à la Commission et au Parlement européen d’assumer leurs responsabilités en matière budgétaire.
Le budget fédéral optimal pour l’Union européenne est évalué, par de nombreux économistes, à 5 % du PIB continental : or, le budget stagne actuellement à 1 % du PIB européen. Nous ne pourrons parvenir à cette masse critique qu’en apurant les pratiques budgétaires de l’Union des kystes gaspilleurs qui ne font qu’alimenter l’euroscepticisme de nos concitoyens.
À long terme, nous devons mener une réflexion plus large quant aux ressources de l’Europe. Il est normal que les États participent au budget communautaire, mais cet étrange système de « retour sur investissement » via les fonds structurels et les subventions accordées doit être repensé.
À ce titre, je m’adresse au gouvernement socialiste, qui adore créer de nouveaux impôts : à court terme, il faudra bien que nous instaurions un impôt européen. Sur ce dossier, les centristes vous soutiendront ! Vous pourrez créer toutes les nouvelles taxes possibles et imaginables, quoi qu’il en soit, l’impôt européen apparaîtra, en définitive, comme une nécessité.
Mes chers collègues, nous ne pouvons plus nous comporter en contempteurs et en débiteurs de la politique budgétaire européenne. Cette dernière doit être responsabilisée, avant de pouvoir être véritablement fédéralisée et de devenir un levier du développement économique de notre continent.
Tous les trois ans, la branche publique de la CIA, le National Intelligence Council, ou NIC, publie un rapport intitulé Global Trends, consacré aux perspectives stratégiques du monde à vingt ans d’échéance.
Ce rapport, dans lequel les États-Unis évoquent l’Europe, constate les difficultés qu’éprouve l’Union à devenir une entité fédérale, non pour les déplorer mais bien pour s’en réjouir ! De fait, les Américains considèrent que l’incapacité des Européens à s’unifier n’est certainement pas une catastrophe pour eux.
Lisez ce document – ce rapport n’est pas encore traduit en français, il est simplement cité dans un article de la revue France Forum, écrit par M. Adler –, qui est très intéressant.
À mon sens, nous, Français, devons prouver que l’Europe peut se construire. Ainsi, nous ferons mentir les Américains, qui considèrent qu’elle ne doit pas advenir, dans la mesure où elle contrarierait leur système de déstabilisation de l’ensemble du monde.
Mme Sylvie Goy-Chavent et M. Vincent Delahaye applaudissent.
M. Thierry Foucaud remplace M. Jean-Claude Carle au fauteuil de la présidence.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 44 du présent projet de loi de finances, évaluant le montant du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au profit du budget de l’Union européenne, est soumis aujourd’hui à notre examen.
L’analyse du prélèvement européen permet une ouverture sur les finances publiques de l’Union. Il conduit également à faire le point sur les engagements budgétaires européens et sur la contribution des différents États membres de l’Union européenne.
Cet examen a lieu dans un contexte de crise, la Commission européenne ayant en effet présenté, le 26 novembre dernier, une nouvelle proposition pour le budget 2013. Identique à 99 % au texte pourtant rejeté il y a deux semaines, ce document nous fait courir le risque de raviver les tensions qui ont conduit à l’échec des négociations lors du Conseil européen des 22 et 23 novembre dernier, au titre du projet de budget européen prévu dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020.
C’est dans cette perspective de négociation du budget et dans l’objectif d’un compromis final que le Sénat souhaite rappeler au Gouvernement les grandes priorités qui doivent être défendues à Bruxelles par les autorités françaises.
La contribution de la France au budget de l’Union européenne est évaluée, par l’article 44 du présent projet de loi de finances, à 19, 6 milliards d’euros.
Ce montant – en hausse de 2, 9 % par rapport à 2012 – comprend 4, 049 milliards d’euros de ressources TVA – dont 1, 1 milliard d’euros au titre de la correction britannique – et 15, 6 milliards d’euros de contribution « RNB ». Dans le contexte actuel de redressement des finances publiques, un tel effort est difficilement compatible avec la stratégie adoptée par la France en vue d’un retour à l’équilibre.
De nombreux pays, comme la France ou l’Allemagne, grands contributeurs au budget européen, souhaitent voir ce débit contenu dans des limites raisonnables, tout en appelant de leurs vœux une politique ambitieuse pour l’Europe.
Personne sur les travées de notre Haute Assemblée ne souhaite que l’on abandonne la politique agricole commune. Il est impératif de ne pas réduire le soutien économique aux agriculteurs européens, confrontés à une forte volatilité des prix agricoles sur les marchés internationaux.
Personne ne souhaite que les fonds structurels, qui ont déjà vu leurs montants fortement diminués, délaissent les régions de France.
Personne ne se prononcera non plus contre une politique de croissance, d’innovation et de recherche, contre une politique culturelle ambitieuse.
Il convient de donner à l’Union européenne les moyens de déployer sa stratégie Europe 2020, d’assumer ses nouvelles compétences issues du traité de Lisbonne, notamment en matière de citoyenneté, de justice et d’action extérieure, tout en relevant les défis internationaux que constituent l’aide au développement, la politique de voisinage, la lutte contre le changement climatique ou l’aide humanitaire.
La commission des affaires européennes du Sénat a présenté trois propositions de résolution européenne devenues, par la suite, résolutions du Sénat. La première a trait aux propositions de règlements relatifs à la politique européenne de cohésion 2014-2020. La deuxième porte sur le mécanisme pour l’interconnexion en Europe. La troisième a pour objet « Erasmus pour tous », qui serait le nouveau programme de l’Union européenne pour l’éducation, la formation, la jeunesse et le sport. C’est sur ce dernier point que je souhaite insister.
Concernant les investissements d’avenir, nous souhaitons que le Gouvernement affirme son soutien à l’augmentation des crédits proposée pour le nouveau programme « Erasmus pour tous », de manière à permettre à ce dispositif, qui contribue à forger la conscience européenne et à préparer l’avenir, d’atteindre sa pleine efficacité. À cet égard, nous plaidons pour que les engagements pris au titre de ce programme pour 2014-2020 se traduisent annuellement en crédits de paiement suffisants, afin que ce programme ne souffre pas à l’avenir des sous-financements que nous avons hélas ! pu déplorer en cette fin d’année 2012.
Pour mémoire, le programme Erasmus, créé en 1987, a permis à près de trois millions d’étudiants de trente-trois pays d’étudier à l’étranger tout en conservant le bénéfice des droits sociaux acquis dans leur pays d’origine. Erasmus a été mis en images avec humour par Cédric Klapisch dans L’Auberge espagnole.
Désormais, ce programme devrait s’intituler « Erasmus pour tous », et s’ouvrir à d’autres catégories : Comenius pour les écoles, Leonardo da Vinci pour l’enseignement technologique et la formation professionnelle, Gruntvig pour l’éducation des adultes. Ce dispositif regrouperait l’ensemble de ces programmes, qui s’ajouteraient au dispositif Erasmus, destiné aux études supérieures.
Ainsi, le programme « Erasmus pour tous » deviendrait plus visible et développerait la conscience européenne à tous les niveaux.
Au cours de l’année scolaire 2012-2013, 270 000 étudiants peuvent bénéficier de ce programme, grâce à un budget annuel de 450 millions d’euros. En France, l’État y a consacré 52 millions d’euros en 2012 et 31 000 étudiants de notre pays y ont participé.
Ce programme est essentiel pour l’avenir. Il assure l’équivalence des diplômes, l’émulation des universités, la mobilité et l’intégration culturelle européenne au meilleur niveau : celui de la jeunesse. C’est un instrument incontournable dans la perspective de la réalisation des objectifs « Europe 2020 », suscitant l’adhésion des citoyens autour du projet européen. Il s’agit là d’un dispositif dont on pourrait regretter qu’il soit, à l’avenir, remis en cause. À cet égard, je déplore que la France fasse partie des sept États membres qui refusent l’augmentation du budget demandée par la Commission, pour l’année 2013.
De fait, les États contributeurs refusent de fournir de nouveaux crédits pour combler le déficit des 8, 9 milliards d’euros manquant au titre du budget 2012.
Même si ce refus ne vise pas spécifiquement le programme Erasmus, il nous faut veiller à ce que l’avenir ne soit pas une fois de plus sacrifié à des considérations budgétaires, notamment dans la négociation du projet de budget pluriannuel pour la période 2014-2020.
Le groupe UMP se prononce en faveur de l’adoption de l’article 44 du projet de loi de finances pour 2013. Toutefois, cet avis favorable à l’adoption du prélèvement européen est indissociable de l’appel à une véritable réforme du système actuel de ressources propres.
À plus long terme, il faut envisager une réforme plus profonde qui mettra un terme aux contributions nationales et aux rabais qui, aujourd’hui, ne sont plus justifiés. Cette réforme instaurerait enfin des sources de financement en rapport avec les politiques de l’Union.
De fait, l’architecture financière de l’Union européenne est aujourd’hui à bout de souffle, au moment même où les dirigeants des États membres ont échoué à s’entendre sur un projet de budget pluriannuel pour la période 2014-2020, lors du Conseil européen des 22 et 23 novembre dernier. §
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n’exprimerai pas devant vous aujourd’hui un point de vue strictement financier et technique. Je voudrais plutôt évoquer quelques éléments plus politiques, qui pour moi s’imposent dans le contexte actuel avec la force de l’évidence, mais qui permettront, me semble-t-il, de cadrer ce débat, lequel a des aspects techniques complexes, mais surtout une dimension politique forte.
Concrètement, nous sommes ici, ce matin, pour débattre de l’article 44 du projet de loi de finances pour 2013, plus communément appelé prélèvement européen. Cet article dispose que le montant du prélèvement effectué sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne est environ de 20 milliards d’euros.
Mes chers collègues, il y a là bien plus que le simple énoncé d’un chiffre. Derrière ces milliards se cache en effet une vision, une certaine conception de la construction européenne. C’est bien cela qui, en réalité, mérite d’être débattu, au-delà des chiffres qui nous sont présentés.
Nous serons cet après-midi amenés à voter les ressources, afin de pouvoir ensuite, peut-être, parler des dépenses. Cependant, à l’inverse du budget français, voté par la représentation nationale, le budget européen n’est pas entièrement débattu par le Parlement européen. Les députés de Strasbourg s’expriment uniquement sur les dépenses, tandis que les ressources, d’origine nationale, sont débattues au niveau intergouvernemental lors de réunions du Conseil plus ou moins extraordinaires, souvent peu ordinaires en tout cas.
Ainsi, selon la décision du Conseil du 7 juin 2007 relative au système des ressources propres, les États membres versent au budget de l’Union européenne des ressources dites « traditionnelles » – droits de douanes, prélèvements agricoles et cotisations diverses –, une partie de leur TVA ainsi qu’un prélèvement appelé revenu national brut, c’est-à-dire, en l’occurrence, pour la France, environ 20 milliards d’euros pour 2013.
A priori, tout comme nos collègues députés européens, nous ne pouvons argumenter sur cette somme, qui est destinée à assurer l’équilibre du budget européen pour 2013. Ce débat nous permet néanmoins de vous interpeller, monsieur le ministre, et d’échanger avec l’ensemble des groupes politiques qui composent cet hémicycle sur les moyens de rendre ce budget européen plus efficace, mais aussi plus solidaire et d’éviter les périls auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés.
Comme cela a été dit, ce débat sur le budget 2013 s’inscrit effectivement dans un contexte de crise très important : crise économique et financière, crise écologique, mais aussi crise institutionnelle entre le Conseil, la Commission et le Parlement européen, crise, enfin, au sein même du Conseil entre les différents États membres.
Crise institutionnelle, car le budget européen de l’année 2012 n’est pas définitivement réglé. Crise institutionnelle, car les négociations sur le budget européen 2013 se sont soldées par un échec le 13 novembre dernier. Crise institutionnelle, enfin, car, parallèlement à ces tensions, les négociations qui ont eu lieu le week-end dernier sur le nouveau cadre financier pluriannuel pour 2014-2020 n’ont pas abouti non plus.
Mes chers collègues, nous pouvons le dire, « l’Europe budgétaire » est aujourd’hui dans une grande impasse. Son passé n’est pas soldé, son présent est incertain et son futur est préoccupant.
En ce qui concerne le passé, le budget pour l’année 2012, qui pourtant devrait être aujourd’hui derrière nous, demeure d’actualité puisqu’une dizaine de programmes européens avaient déjà utilisé, au mois d’octobre, entre 95 % et 100 % des fonds alloués pour l’année budgétaire en cours. Il manque ainsi une rallonge de 9 milliards d’euros pour la recherche, la croissance et l’emploi, l’enseignement, la santé, l’aide alimentaire et l’aide humanitaire. En pratique, il manque par exemple 90 millions d’euros pour les seules bourses Erasmus. Certains pays comme l’Espagne sont à court d’argent et incapables de verser leurs bourses à leurs étudiants. Une situation dramatique pour l’avenir d’un dispositif dont on sait pourtant l’importance dans l’émergence d’une citoyenneté et d’une conscience européennes.
Aucun accord n’a été conclu sur ce point : le Parlement insiste pour qu’une solution soit trouvée sur le paiement des factures de 2012 et fait pression en bloquant les négociations sur le budget 2013. Cette pression du Parlement européen est, à mon sens, d’autant plus nécessaire que ce n’est pas la première fois que les crédits accordés à l’Union européenne ne permettent pas de tenir l’année. En effet, fin 2011, le budget européen s’était déjà retrouvé dans une situation similaire, car le budget alors adopté était nettement sous-évalué. La Commission avait donc dû reporter à 2012 environ 5 milliards d’euros de factures, qui ont par conséquent amputé ledit budget 2012 d’autant. D’ailleurs, lors de l’adoption de ce budget, le commissaire européen avait prévenu que les montants adoptés étaient sous-évalués et « ne permettraient pas de couvrir les besoins ».
Nous sommes donc face à une situation endémique, qui se reproduira certainement l’an prochain, le manque augmentant chaque année du fait du report du déficit d’un exercice budgétaire sur l’autre.
Le présent budget n’est guère plus encourageant. Le budget 2013 se révèle en effet être dans l’impasse. Le Conseil, confronté à des États membres divisés entre une augmentation et une stabilisation budgétaire, a revu à la baisse le projet de la Commission, qui prévoyait une hausse de 9 milliards d’euros par rapport au budget de l’année qui se termine.
En réalisant un grand nombre de coupes budgétaires, le Conseil a donc davantage écouté les États membres qui demandent une discipline budgétaire renforcée que ceux qui sollicitent une augmentation. Il a tenu à souligner le paradoxe qu’il y a « à autoriser au niveau européen une progression des dépenses publiques qui est interdite à la majorité des États membres au niveau national ».
En réalité, mes chers collègues, il s’agit là non pas uniquement d’un arbitrage budgétaire, mais d’un choix économique et politique. À l’austérité des pays s’ajouterait désormais l’austérité de l’Union, quand la France plaide, elle, pour un budget raisonnable et orienté vers la croissance et l’emploi. La France souhaite en effet un budget qui s’inscrit dans la ligne de la réorientation engagée par le Conseil européen des 28 et 29 juin dernier, et des priorités fixées par le Pacte pour la croissance et l’emploi. Rappelons que nous avions alors obtenu une réaffectation de 55 milliards d’euros de fonds structurels et une recapitalisation de la Banque européenne d’investissement à hauteur de 10 milliards d’euros.
La commission des budgets du Parlement européen s’est cependant opposée aux réductions voulues par le Conseil et a voté, en séance plénière le 23 octobre dernier, un budget très proche de celui qui avait été initialement proposé par la Commission. Un bras de fer s’engage donc sur la table de l’Europe entre, d’un côté, le Conseil et, de l’autre, la Commission et le Parlement, qui plaident pour un budget qui soit « un instrument privilégié de relance et de croissance économique ».
C’est donc en quelque sorte Keynes contre Friedman et, faute d’aboutir à un consensus impossible, les eurodéputés se préparent à ce que le budget 2013 ne soit pas voté et que, à défaut, le système des douzièmes provisoires soit appliqué.
Comment, dans ces conditions, envisager sereinement le futur budgétaire de l’Union ? Déjà, lors des négociations concernant le cadre financier 2007-2013, Tony Blair, alors Premier ministre du Royaume-Uni, avait dit : « si on ne change pas nos méthodes, la prochaine fois, il y aura des morts entre nous ! » Il fallait voir dans cette remarque comme une prémonition, car le Conseil extraordinaire des 22 et 23 novembre dernier est bien en passe de faire une première victime : l’Europe elle-même.
Tout le monde s’aperçoit en fait que, ce qui se joue à l’occasion de ces négociations, c’est bien l’avenir de l’Europe. Car construire un budget, fût-il européen et pluriannuel, ne relève pas du simple exercice comptable, mais constitue un acte politique. Et c’est précisément sur les contours de ce projet politique européen que portent, et que doivent porter les débats. Aux tenants d’une Europe du progrès économique et de la justice sociale, d’une Europe qui dispose des moyens financiers nécessaires pour soutenir une politique résolue en matière d’investissement et de croissance, s’opposent en effet les tenants d’une Europe minimale, simple variable d’ajustement budgétaire dans un contexte économique difficile pour ses États membres.
Je considère, pour ma part, que nous ne pouvons pas laisser se compromettre le destin européen dans les eaux glacées des calculs égoïstes. Sinon, comme l’a rappelé le Président de la République, François Hollande, à l’occasion de son déplacement en Pologne, « c’est une Europe au rabais qui se prépare, où chacun viendra chercher son chèque », quand le projet européen vise, au contraire, à sublimer les intérêts nationaux.
Dès lors, mes chers collègues, les négociations pluriannuelles 2014-2020 doivent être l’occasion d’engager un vrai débat, à la fois sur le niveau et l’origine des ressources budgétaires de l’Union Européenne et sur le ciblage des dépenses et des priorités. Du côté des ressources, la Commission européenne proposait, par exemple, de revoir les différents rabais dont disposent certains États membres, mais également de trouver des ressources budgétaires propres à l’Union, afin d’éviter que cette dernière ne dépende presque exclusivement des seules contributions nationales, aujourd’hui si âprement négociées. Je souscris évidemment à cette orientation. Ces ressources budgétaires propres pourraient être constituées, au-delà des ressources propres traditionnelles, par la taxe sur les transactions financières, par une taxe carbone ou encore par la création d’un impôt européen.
Je sais que cette perspective n’est pas populaire dans le contexte d’aujourd’hui, mais, par exemple, un impôt sur les sociétés, même faible, et harmonisé au niveau européen, permettrait notamment de lutter contre le dumping fiscal auquel se livrent les pays de l’Union pour renforcer l’attractivité de leur territoire. §
J’ajoute que la création de cet impôt européen, qui prendrait place aux côtés des impôts strictement nationaux, permettrait par ailleurs « d’ouvrir une brèche dans la citadelle de la souveraineté nationale », pour reprendre une expression de Jean Monnet, et constituerait de mon point de vue un pas important vers une Europe fédérale.
Telles sont les réflexions que je souhaitais vous soumettre ce matin, mes chers collègues.
Quoi qu’il en soit, je voterai bien évidemment, avec mon groupe, en faveur de cet article 44 de la loi de finances, qui concerne la participation de la France au budget de l’Union.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste . – MM. André Gattolin, Robert Tropeano et Pierre Bernard-Reymond applaudissent également.
Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget de l’Union européenne est financé par trois types de ressources : des ressources propres, dites « traditionnelles », collectées par des États membres pour le compte de l’Union – droits de douanes et cotisations sur le sucre –, une ressource assise sur une assiette de TVA harmonisée et une ressource qui est en fonction du revenu national brut de chaque État membre.
La contribution de la France au budget européen prend la forme d’un prélèvement sur recettes, évalué en projet de loi de finances pour 2013 à un peu moins de 20 milliards d’euros, 19, 598 milliards d’euros pour être précis.
Il est prévu de soumettre au Parlement un prélèvement sur recettes en hausse de 720 millions d’euros par rapport à 2012, une augmentation qui marque l’attachement de la France à un budget européen consistant.
Cette hausse de 3, 8 % s’inscrit toutefois dans la trajectoire de redressement de nos finances publiques, puisque ce prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne, comme le prélèvement sur recettes en faveur des collectivités, fait partie du champ de la norme « zéro valeur ».
L’effort réalisé au profit du budget européen s’est donc accompagné d’un effort important de maîtrise de la dépense publique dans les autres ministères. Toute augmentation qui irait au-delà de celle qui est envisagée dans ce projet de loi de finances devra être compensée à due concurrence par une maîtrise des dépenses ou des économies dans d’autres domaines.
La contribution de la France en fait le deuxième pays contributeur, avec 17, 7 % du budget européen, derrière l’Allemagne, qui contribue à hauteur de 19, 9 %. Le solde net de la France, constitué de l’écart entre les fonds européens perçus et la contribution au budget de l’Union, est négatif et s’élève à 6, 5 milliards d’euros en 2010, ce qui place notre pays au troisième rang des contributeurs nets, derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni.
Le prélèvement sur recettes qui vous est présenté permet de financer la contribution de la France au budget 2013, mais également de prendre en compte les budgets rectificatifs au budget 2012.
Le budget 2013 de l’Union Européenne n’a pas encore été déterminé. Comme vous le savez, des négociations difficiles sont en cours, et ce budget résultera d’une procédure de « trilogue » entre la Commission, le Conseil et le Parlement, qui n’a pas encore abouti.
La Commission a présenté en avril 2012 un projet de budget pour 2013 s’élevant à 151 milliards d’euros en crédits d’engagement et 138 milliards d’euros en crédits de paiement, soit, par rapport au budget 2012, une augmentation de 2 % en crédits d’engagement et de 6, 8 % en crédits de paiement.
Le Conseil a arrêté sa position le 24 juillet. Jugeant la position de la Commission trop élevée et incompatible avec les contraintes budgétaires des États membres, il a proposé une hausse du budget ramenée à 2, 79 % pour les crédits de paiement, soit 132, 7 milliards d’euros.
Le Parlement européen a, pour sa part, adopté le 23 octobre une position qui revient sur les montants proposés par la Commission.
Pour établir le présent projet de loi de finances, le Gouvernement a retenu une progression du budget 2013 de 2, 79 %, correspondant à la position du Conseil.
Cette proposition d’un budget à 132, 7 milliards d’euros permet d’assurer les objectifs du budget européen, suivant les rubriques suivantes, que vous connaissez bien.
Les crédits regroupés au sein de la rubrique 1a « Compétitivité pour la croissance et l’emploi » s’élèvent à 11, 7 milliards d’euros. Ces crédits contribuent à la croissance et à l’emploi en Europe, cette rubrique intégrant notamment les programmes-cadres de recherche et développement technologique, le programme Erasmus d’échanges européens, ou des grands projets comme ITER ou Galileo.
À cet égard, sachez, monsieur Arthuis, que le programme ITER est aux yeux de la France un programme essentiel pour conduire des projets d’avenir structurants. Ces programmes sont intégrés dans le budget européen sous cette rubrique « Compétitivité pour la croissance et l’emploi ».
C’était un point majeur pour la France. En effet, la Commission européenne voulait, à l’inverse, les placer hors cadre, ce qui risquait à moyen terme de remettre en cause leur financement.
De la même manière, je veux rassurer M. Pozzo di Borgo : la continuité du programme Erasmus n’est pas menacée, ni pour 2013, ni au-delà, dans le prochain cadre financier.
En 2012, la Commission européenne a d’ailleurs demandé dans son budget rectificatif 90 millions d’euros pour ce programme. La France a d’ores et déjà donné son accord ; elle le rappellera lors des négociations qui s’engageront avec le Parlement européen dans les prochains jours.
Les crédits de la sous-rubrique 1b « Cohésion pour la croissance et l’emploi » s’élèvent à 47, 4 milliards d’euros. La vocation de la politique de cohésion, deuxième poste de dépense au sein du budget communautaire, est de renforcer la cohésion économique et sociale au sein de l’Union européenne, en réduisant les disparités de développement entre les régions.
Monsieur le rapporteur spécial Marc Massion, le programme européen d’aide aux plus démunis a fait l’objet d’une proposition de la part de la Commission européenne dans la rubrique 1b. Le montant envisagé était de 2, 5 milliards d’euros, somme réduite à 2, 1 milliards d’euros dans la proposition du président Van Rompuy. La France entend œuvrer avec détermination pour la reconduction de ce programme, qui est essentiel, mais, nous le savons, contesté par plusieurs de nos partenaires, dont l’Allemagne, du moins à ce stade des discussions.
Les crédits de la rubrique 2 « Conservation et gestion des ressources naturelles » sont de 57, 5 milliards d’euros. Cette rubrique regroupe les crédits de la politique agricole commune, la PAC, avec ses deux piliers, le premier étant constitué des mesures dites « de marché », ou aides directes, le second correspondant à la politique de développement rural. La France a bénéficié de 9, 9 milliards d’euros de retours au titre de la PAC, qui constitue plus de 70 % des retours français.
Monsieur le rapporteur spécial Jean Arthuis, vous avez exprimé votre attachement à l’enveloppe de la PAC. Vous le savez, la France demande, avec d’autres partenaires, que l’Union européenne conserve son indépendance alimentaire, essentielle dans un contexte de très forte volatilité, notamment du marché des matières premières alimentaires. Nous voulons aussi que s’engagent les réformes nécessaires de cette politique, par la convergence progressive des aides entre les États membres et par le « verdissement », démarche certes ancienne, mais que la France souhaite approfondir.
Les crédits de la rubrique 3 « Citoyenneté, liberté, sécurité et justice » sont de 1, 5 milliard d’euros.
La rubrique 4 « L’Union européenne en tant que partenaire mondial » regroupe les actions extérieures de l’Union. Ses crédits sont de 6, 3 milliards d’euros.
Enfin, les crédits de la rubrique 5 « Administration » s’élèvent à 8, 4 milliards d’euros. Cette rubrique assure le fonctionnement des institutions européennes. Et, on le sait, de très nombreux États souhaitent que les frais de fonctionnement soient mieux maîtrisés. D’ailleurs, il serait surprenant que la Commission, alors qu’elle demande à un certain nombre d’États membres de réaliser des économies et de veiller à ce que la progression des frais de fonctionnement ne soit pas déraisonnable, ne donne pas elle-même l’exemple en prouvant par son action qu’elle est également capable de maîtriser ses dépenses, au sein de ses propres services.
Après avoir évoqué le budget pour 2013, je dois aborder les budgets rectificatifs pour 2012.
La Commission a présenté deux budgets rectificatifs au mois d’octobre. Le budget rectificatif n° 5, d’un montant de 670 millions d’euros, prévoit un renforcement du fonds de soutien de l’Union européenne au profit de l’Italie au titre du tremblement de terre intervenu en Émilie-Romagne. Le budget rectificatif n° 6, d’un montant de près de 9 milliards d’euros, couvrira les besoins de crédits de paiement de fin d’année, principalement sur les fonds structurels.
Le budget rectificatif n° 5 ne posait pas de difficulté et a été adopté. En revanche, il n’en va pas de même du budget rectificatif n° 6. Son importance le rend inacceptable à plus d’un titre. D’une part, il a été annoncé extrêmement tardivement, alors que ses effets en paiement seraient massifs : plus de 1 milliard d’euros pour la France. D’autre part, son adoption placerait le budget 2012 au-delà de la proposition initiale de la Commission, donnant le fort sentiment d’un non-respect en exécution des arbitrages rendus sur le budget 2012.
La conciliation n’a pas permis d’aboutir à un compromis sur ce budget rectificatif, qui reste, à ce stade, sur la table des négociations. La France travaille à la recherche d’un compromis compatible avec les efforts budgétaires auxquels s’astreignent l’ensemble des États membres.
Voyons maintenant quelles sont les perspectives financières 2014-2020. Au-delà de la question du prélèvement sur recettes 2013, celle de la négociation en cours sur le cadre financier pluriannuel pour 2014-2020 doit aussi être évoquée.
Le Conseil européen des 22 et 23 novembre a été un Conseil européen « d’étape ». C’est ainsi que préfère le qualifier le Gouvernement, marquant ainsi son espérance de voir déboucher les discussions, qui, à ce stade, n’ont pas encore pu être conclusives.
Comme en 1998 et en 2005, il s’est révélé nécessaire d’avoir une première discussion au niveau des chefs d’État et de gouvernement, en vue d’un accord au début de l’année 2013.
Ce Conseil européen a été utile, à supposer que certains aient pu en douter. Il a permis de faire des progrès et de mieux comprendre les priorités de chacun. Un accord nous semble désormais possible, et nous sommes prêts à y contribuer.
La France a réaffirmé à l’occasion de ce sommet trois priorités.
Premièrement, nous avons exprimé le souhait d’un budget européen qui soit consistant et qui donne la possibilité de financer les politiques européennes. La proposition de M. Van Rompuy se situe au bon niveau de dépense globale, soit 1 % du RNB.
Deuxièmement, la répartition des dépenses doit être revue. Le niveau des crédits de la PAC doit permettre d’assurer à la fois la compétitivité de l’agriculture et, en même temps, le développement rural indispensable.
C’est incontestablement une politique de croissance que la France défend.
Les propositions relatives aux politiques de cohésion et de croissance ont évolué, même si, nous le savons, les discussions devront se poursuivre d’ici au prochain sommet, afin que celui-ci devienne conclusif.
Troisièmement, la France continuera de défendre une révision des modes de calcul des rabais, ristournes et chèques ou, plus exactement, continuera à demander que tous les pays contribuent au paiement de ces rabais, y compris ceux qui les touchent et qui en bénéficient donc.
C’est le paradoxe d’une situation où des contributeurs nets se voient remboursés alors même que leur situation en termes de prospérité ne devrait pas les conduire à bénéficier de ces reversements. Il serait logique qu’ils participent eux aussi au financement des autres rabais. Tel est le moyen privilégié par la France pour arriver à ce qui nous semble être une mesure de justice indispensable.
Le prochain Conseil européen consacré aux perspectives financières se réunira au début de l’année prochaine. D’ici là, le président du Conseil européen et la Commission conduiront des entretiens bilatéraux pour tenter de résoudre les questions en suspens. Un accord nous semble possible, même si la négociation sera difficile.
En tout cas, le Président de la République a, par sa position profondément européenne – elle est bien connue –, placé la France au centre du jeu. Il a eu des échanges approfondis, par des rencontres bilatérales, avec l’Allemagne et le Royaume-Uni. Mais il a également maintenu le lien avec d’autres grands partenaires, comme la Pologne, l’Italie ou l’Espagne, pour que le Conseil européen ne se résume pas à un affrontement entre contributeurs nets et amis de la cohésion. La France entend conserver cette position centrale dans la négociation en vue d’un accord équilibré au début de l’année 2013.
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments que le Gouvernement souhaitait apporter à l’occasion de ce débat sur le prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne. §
Le montant du prélèvement effectué sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne est évalué pour l’exercice 2013 à 19 597 987 000 €.
Je ne suis saisi d’aucun amendement.
La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.
J’ai bien entendu les arguments des différents orateurs qui sont intervenus, ainsi que vos propos, monsieur le ministre.
Vous connaissez mes convictions européennes et mon souhait d’aller vers une Europe qui se fédéralise.
M. David Assouline s’exclame.
Mais, en tout état de cause, et quel que soit notre vote, la participation de la France résulte des traités. Ce débat doit donc avoir pour première vertu de nous permettre d’exprimer nos convictions et nos ressentiments.
En l’occurrence, il ne s’agit pas d’instruire un réquisitoire contre le gouvernement actuel. Voilà des années que l’Europe fonctionne ainsi.
Et c’est vrai que la manière dont la zone euro a été pilotée est franchement scandaleuse ! C’est le kaléidoscope de toutes les faiblesses, de toutes les contradictions des gouvernements, des uns et des autres.
C’est ainsi que l’on a laissé filer les déficits pendant des années, parce que les agences de notation étaient suffisamment aveugles pour considérer que la zone euro était un espace fédéral et que, par conséquent, la Grèce pouvait obtenir des conditions d’emprunt identiques à celles qui étaient consenties à la République fédérale d’Allemagne ou à la France. Tout cela est un fonctionnement insatisfaisant.
Je plaide donc pour que l’Europe se ressaisisse et que, notamment, la zone euro se dote d’un véritable gouvernement économique, financier et budgétaire ; c’est cela, ma préoccupation. À défaut, nous risquons de connaître d’autres déconvenues.
Et c’est parce que ce chantier-là tarde à s’engager que j’émets un vote négatif. La zone euro a laissé faire n’importe quoi, et nous en voyons les résultats aujourd'hui. Et vous verrez ce qui va résulter de l’appel à assistance qu’a récemment lancé Chypre. Là encore, il y a eu lacune de surveillance de la part de la Commission et de la part des institutions européennes. On ne peut pas continuer ainsi !
Le jour où on a décidé de partager une monnaie, on a mis un pied dans le partage de souveraineté, et on n’en a pas tiré les conséquences. On n’a pas constitué le gouvernement correspondant à ce partage de souveraineté. Ce que j’appelle de mes vœux, c’est que l’on se dote enfin de telles institutions et que les parlements nationaux participent à un contrôle, à une surveillance de la gouvernance de la zone euro.
Voilà pourquoi je vais émettre un vote négatif. C’est ma manière à moi d’exprimer mes convictions européennes et mon impatience de fédéraliser la zone euro. Ce n’est pas une scission entre les dix-sept et les vingt-sept, bientôt vingt-huit, puisque les vingt-huit auront vocation à rejoindre la zone euro.
L’article 44 est adopté.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à onze heures cinquante.
Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement.
La liste des candidats établie par la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire a été affichée conformément à l’article 12 du règlement.
Je n’ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : M. Raymond Vall, Mmes Laurence Rossignol, Odette Herviaux, MM. Michel Teston, Gérard Cornu, Alain Houpert et Henri Tandonnet ;
Suppléants : MM. Jean-Jacques Filleul, Pierre Camani, Mme Évelyne Didier, MM. Ronan Dantec, Charles Revet, Louis Nègre et Hervé Maurey.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2013, adopté par l’Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de la première partie du projet de loi de finances, à l’article 31.
C. – Dispositions relatives aux budgets annexes et aux comptes spéciaux
Sous réserve des dispositions de la présente loi, les affectations résultant de budgets annexes créés et de comptes spéciaux ouverts antérieurement à la date d’entrée en vigueur de la présente loi sont confirmées pour l’année 2013. –
Adopté.
I. – Le II de l’article 302 bis K du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ces tarifs annuels, fixés par arrêté conjoint du ministre chargé du budget et du ministre chargé de l’aviation civile, entrent en vigueur pour les vols effectués à compter du 1er avril de l’année. » ;
2° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les entreprises de transport aérien qui ont déclaré au cours de l’année précédente un montant de taxe égal ou inférieur à 12 000 € sont admises à souscrire, à compter du premier trimestre civil de l’année qui suit, des déclarations trimestrielles indiquant le nombre de passagers et la masse de fret et de courrier embarqués au cours du trimestre précédent pour les vols effectués au départ de France. Ces déclarations trimestrielles doivent être souscrites au plus tard le dernier jour du mois qui suit le trimestre au titre duquel elle est établie. Lorsque le montant de la taxe déclarée au terme des quatre trimestres civils consécutifs de l’année dépasse le montant de 12 000 €, l’entreprise doit souscrire mensuellement ses déclarations dans les conditions fixées au septième alinéa ; dans ce cas, l’obligation court à compter du premier mois qui suit l’année de dépassement. » ;
3° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Ces déclarations, mensuelles ou trimestrielles, accompagnées du paiement de la taxe due, sont adressées aux comptables du budget annexe “Contrôle et exploitation aériens”. »
I bis
– Le début de la première phrase du 1 du IV du même article 302 bis K est ainsi rédigé : « Les déclarations visées au II sont contrôlées par...
le reste sans changement
II. – Le IV de l’article 1609 quatervicies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les entreprises de transport aérien qui ont déclaré au cours de l’année précédente un montant de taxe égal ou inférieur à 12 000 € sont admises à souscrire, à compter du premier trimestre civil de l’année qui suit, des déclarations trimestrielles indiquant le nombre de passagers et la masse de fret et de courrier embarqués au cours du trimestre précédent pour les vols effectués au départ de chaque aérodrome. Ces déclarations trimestrielles doivent être souscrites au plus tard le dernier jour du mois qui suit le trimestre au titre duquel elle est établie. Lorsque le montant de la taxe déclarée au terme des quatre trimestres civils consécutifs de l’année dépasse le montant de 12 000 €, l’entreprise doit souscrire mensuellement ses déclarations dans les conditions fixées au treizième alinéa ; dans ce cas, l’obligation court à compter du premier mois qui suit l’année de dépassement. » ;
2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Ces déclarations, mensuelles ou trimestrielles, accompagnées du paiement de la taxe due, sont adressées aux comptables du budget annexe “Contrôle et exploitation aériens”. »
III. – L’article 1647 du code général des impôts est complété par un XVII ainsi rédigé :
« XVII. – Pour frais d’assiette et de recouvrement, l’État prélève 0, 5 % des sommes recouvrées au titre de la majoration au profit du fonds de solidarité pour le développement de taxe de l’aviation civile du VI de l’article 302 bis K, ainsi que sur le montant de la taxe d’aéroport et de sa majoration mentionnées à l’article 1609 quatervicies et sur le montant de la taxe sur les nuisances sonores aériennes mentionnée à l’article 1609 quatervicies A.
« Les sommes prélevées en application du premier alinéa du présent XVII par les agents comptables du budget annexe “Contrôle et exploitation aériens” mentionnés au V de l’article 302 bis K sont affectées au budget annexe précité. »
2° §(Supprimé)
L'article 32 est adopté.
I. – L’article 49 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est ainsi modifié :
1° §(nouveau) Après le mot : « amende, », la fin du a du 2° du A du I est ainsi rédigée : « les dispositifs de prévention de sécurité routière ainsi que les dépenses de la trésorerie du contrôle automatisé liées à son activité de recouvrement, pour lesquelles le ministre chargé de la sécurité routière est l’ordonnateur principal ; »
2° §(nouveau) Le dernier alinéa du b du 2° du B du I est ainsi modifié :
a) Aux deux premières phrases, le montant : « 160 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 170 millions d’euros » ;
b) À la deuxième phrase, les montants : « 100 millions d’euros » et « 60 millions d’euros » sont, respectivement, remplacés par les montants : « 106 millions d’euros » et « 64 millions d’euros » ;
3° Le II est ainsi rédigé :
« II. – Le produit des amendes forfaitaires perçues par la voie de systèmes automatiques de contrôle et sanction est affecté au compte d’affectation spéciale “Contrôle de la circulation et du stationnement routiers” dans la limite de 409 millions d’euros. Ce produit est affecté successivement à hauteur de 239 millions d’euros à la première section “Contrôle automatisé”, puis à hauteur de 170 millions d’euros à la deuxième section “Circulation et stationnement routiers”.
« Le solde de ce produit est affecté à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France. »
II
L'amendement n° I-79 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, C. Bourquin, Fortassin, Barbier, Baylet, Bertrand et Collombat, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4
Remplacer le nombre :
par le nombre :
II. - Alinéa 5
1° Remplacer le nombre :
par le nombre :
2° Remplacer le nombre :
par le nombre :
III. - Alinéa 7
1° Première phrase
Remplacer le nombre :
par le nombre :
2° Dernière phrase
Remplacer le nombre :
par le nombre :
IV. - Pour compenser la perte de recettes résultant des I à III ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Robert Tropeano.
L’article 33 a été modifié à l’Assemblée nationale afin notamment de permettre aux collectivités territoriales de bénéficier du fort dynamisme du produit des amendes de radars.
Le présent amendement prévoit de renforcer encore cette logique en majorant de 10 millions d’euros la fraction du produit de ces amendes affectée aux collectivités, pour donner à ces dernières quelques marges de manœuvre supplémentaires dont elles ont grandement besoin.
Lors de l’examen de l’article 33, l’Assemblée nationale a majoré de 10 millions d’euros la part des amendes de radars affectée aux collectivités territoriales. Le groupe RDSE propose d’augmenter à nouveau de 10 millions d’euros ce prélèvement. Au total, ce sont donc 20 millions d’euros qui seraient ponctionnés sur le budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF.
Il est vrai que les amendes de radars rapportent beaucoup – certains s’en réjouissent, d’autres non. Leur produit a en effet augmenté de 16 % entre 2011 et 2012, et on pourrait légitimement considérer qu’une part plus importante revienne aux collectivités locales.
Au fond, le RDSE nous demande de choisir, mes chers collègues, entre une majoration de 10 millions d'euros des recettes des collectivités et une diminution de 10 millions d'euros des crédits de l’AFITF.
La commission des finances s’en remet à la sagesse de notre assemblée sur ce point.
Monsieur Tropeano, le Gouvernement n'est pas favorable à votre amendement. Vous le savez, le produit des amendes radars représente plus de 1 milliard d'euros. Vous le savez également, sur ce produit, à partir du compte d'affectation spéciale, le « CAS Radars », c’est près de 680 millions d'euros qui sont redirigés vers les collectivités locales. Cela est tout à fait normal. Je me souviens avoir œuvré à l'Assemblée nationale, lorsque j'étais président de la commission des finances, pour que, à partir du « CAS Radars », un financement satisfaisant s’opère en faveur des collectivités locales, dont je comprends très bien l’esprit.
À l’Assemblée nationale, en première lecture, 10 millions d’euros ont déjà été soustraits à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France au profit des collectivités locales, le Gouvernement ne s’étant pas opposé à l’amendement afférent. Vouloir soustraire encore 10 millions d'euros à l’AFITF me paraîtrait excessif, d’autant que cette agence a pour mission de financer des infrastructures terrestres auxquelles les élus locaux sont tous attachés, du moins celles qui concernent leur région, leur département ou leur bassin de vie et d'élection.
Je voudrais tout de même rappeler qu’un nombre considérable d’infrastructures ont été inscrites au programme de l’AFITF, laquelle est financée par des subsides de l'État de l’ordre de 1 à 2 milliards d'euros par an. Si l'ensemble des infrastructures devait être réalisé, il faudrait entre un siècle et demi et deux siècles et demi à l’Agence, à moyens de fonctionnement constants, pour toutes les financer ! C'est dire à quel point le programme d'investissement de l’AFITF est excessif au regard des financements dont elle dispose.
Ces financements vont-ils être majorés de manière massive dans les années qui viennent ? Bien sûr que non, pour les raisons que vous connaissez ! La budgétisation de l’Agence va d'ailleurs être réduite puisque cette dernière devrait bénéficier, à compter du milieu de l'année prochaine, du produit de la taxe « poids lourds », cette taxe dont la mise en œuvre a déjà quelques années de retard et dont on peut espérer qu'elle sera enfin effective en 2013.
Mais la chose n'est pas garantie et, donc, soustraire encore des ressources à cette agence reviendrait à compromettre davantage encore la réalisation d'investissements auquel tous les élus, au premier rang desquels les sénateurs, sont sensibles.
Par conséquent, je souhaiterais, monsieur le sénateur, que vous acceptiez de retirer votre amendement. Ces 10 millions d'euros, qui ne représentent que l'épaisseur du trait au regard de ce que le « CAS Radars » permet déjà de financer pour les collectivités locales – je l’ai dit : un peu moins de 700 millions d'euros –, ne sont pas significatifs.
En revanche, cette mesure pourrait être déstabilisante pour l'AFITF, qui, en tant qu'opérateur, peut, à partir de ses ressources propres, s’endetter de façon infra-annuelle pour financer certains investissements ou pour garantir la bonne fin des investissements.
Le système imaginé par l'Assemblée nationale est, me semble-t-il, équilibré. Le remettre en cause comme vous souhaiteriez le faire me paraîtrait préjudiciable à l’intérêt même que vous défendez, c'est-à-dire la bonne marche des collectivités locales et la bonne fin des investissements qu’elles veulent voir réalisés pour le plus grand bonheur de leurs administrés.
Je comprends très bien l'esprit dans lequel nos collègues du groupe RDSE ont déposé cet amendement qui tend à majorer, davantage que cela a été fait à l'Assemblée nationale, la fraction du produit des amendes affectée aux collectivités territoriales.
Cela étant, comme l'ont très bien dit tant M. le rapporteur général que M. le ministre, c'est autant d'argent en moins pour l’Agence de financement des infrastructures de transport de France.
Or on sait très bien que l’enveloppe consacrée, dans le présent projet de loi de finances, à cette agence a été diminuée de 300 millions d’euros au motif que l’écotaxe « poids lourds » sera créée en cours d’année et entrera probablement en vigueur au 1er juillet prochain.
Par conséquent, si l’on avait la certitude que l’écotaxe sera bien créée au 1er juillet prochain et qu’elle apportera bien à l’AFITF les 400 millions d’euros qui lui sont nécessaires pour permettre de continuer à moderniser au moins 1 000 kilomètres de lignes ferroviaires par an, nous pourrions à la limite accepter de voter l’amendement de nos collègues du RDSE.
Cela étant, comme l’a très bien dit M. le ministre, 10 millions d’euros pour l’ensemble des collectivités, c’est une petite somme.
Dans ces conditions, il me semble préférable de s’en tenir, pour l’instant, à la solution de sagesse retenue par nos collègues députés. Sans vouloir exercer de pression sur nos amis du RDSE, je crois que l’équilibre peut être trouvé sur la base de ce qui a été décidé à l’Assemblée nationale.
Je le maintiens, monsieur le président. En effet, compte tenu des difficultés qu’elles rencontrent actuellement, les collectivités locales ont grandement besoin d’une nouvelle majoration de la fraction du produit des amendes radars qui leur est affectée.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-317, présenté par M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Vincent Placé.
Cet amendement vise à revenir à la version initiale du projet de loi de finances, telle que présentée par le Gouvernement à l’Assemblée nationale.
En ma qualité de rapporteur spécial des crédits de la mission « Sécurité », je suis particulièrement vigilant sur les moyens humains et matériels dévolus à notre police et à notre gendarmerie.
Si l’on constate une légère hausse de leurs crédits globaux et de leurs effectifs, on sait que la police et la gendarmerie rencontrent des difficultés très fortes, tant dans leur fonctionnement que dans leurs capacités d’investissement. Les contraintes budgétaires qui pèsent sur elles sont extrêmement lourdes.
Aussi, vous comprendrez que la commission des finances a toujours eu une position équilibrée sur la question de la vidéosurveillance, que d’aucuns appellent « la vidéoprotection ».
Cet amendement n’est donc pas idéologique. Il part du principe qu’il vaut mieux essayer de prioriser, dans les crédits de la police et de la gendarmerie, des investissements particulièrement utiles, que d’accorder 10 nouveaux millions d’euros à l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des changes, l’ACSÉ, pour abonder le Fonds interministériel de prévention de la délinquance, le FIPD, au titre du financement de la vidéosurveillance.
On le sait, l’efficacité des dispositifs de vidéosurveillance fait l’objet de débats. À cet égard, la proposition initiale du Gouvernement était équilibrée.
Notre amendement vise donc à supprimer ces crédits supplémentaires, qui, je le rappelle, ne figuraient pas dans le projet de loi de finances initial.
M. André Gattolin applaudit.
L’amendement vise à supprimer les 10 millions d’euros qui ont été affectés au FIPD, au titre du financement de la vidéoprotection.
La commission des finances est défavorable à cet amendement.
En effet, l’Assemblée nationale a transféré 10 millions d’euros du produit des amendes vers le FIPD, dans le but très précis de financer les projets de vidéoprotection déjà engagés dans plusieurs communes.
L’amendement adopté par nos collègues députés ne vise pas à renforcer à tout crin la vidéoprotection. Il permet simplement d’apporter une solution de financement à des collectivités en difficulté, compte tenu de la diminution inattendue des crédits du FIPD qui lui sont consacrés. En cela, il offre une forme de compensation et de rattrapage à des communes qui avaient engagé des travaux pour améliorer la sécurité. Il ne va pas plus loin !
Dès lors, il nous semble opportun de maintenir ces 10 millions d’euros supplémentaires.
Monsieur Placé, le Gouvernement est défavorable à votre amendement.
Comme vous le savez, les moyens du FIPD consacrés à la vidéoprotection sont passés de 60 % à 20 %. Cette réduction tout à fait sensible s’est faite, à due concurrence, au profit de la prévention et de la réinsertion, par des actions de politique sociale.
En réalité, ce que vous souhaitez faire, c’est diminuer à ce point les moyens consacrés à la vidéoprotection que plus aucun projet ne pourrait être engagé et que ceux qui le sont déjà souffriraient d’un manque de financement compromettant leur finalisation.
Par conséquent, monsieur le sénateur, le Gouvernement ne peut pas vous suivre. D’abord, parce que les projets qui ont été commencés doivent être finalisés. Ensuite, parce que certains projets qui sont programmés devront être réalisés. S’il est hors de question – c’est une rupture avec la politique du gouvernement précédent – de s’en remettre intégralement à la vidéoprotection pour garantir sécurité civile et paix publique dans un certain nombre de territoires, nier le rôle que peut jouer cette technique n’est pas davantage lucide.
Maire de Villeneuve-sur-Lot, je pourrais, si vous le souhaitez, témoigner des effets très positifs de l’installation de la vidéoprotection dans le centre-ville d’une commune, dès lors qu’elle est accompagnée d’une politique de réinsertion, de prévention, de rénovation urbaine, de réfection d’un certain nombre de commerces, bref, dès lors qu’elle s’insère et dans un choix de revitalisation et dans des politiques visant à prévenir toute forme de délinquance ou d’incivilité.
Le Gouvernement est donc très attaché à ce que l’enveloppe consacrée à la vidéoprotection à la suite du vote de l’Assemblée nationale soit maintenue et invite le Sénat à rejeter votre amendement, monsieur Placé.
En dépit des explications données par le ministre, nous maintenons cet amendement.
La raison en est simple : aider des collectivités territoriales en difficulté pour l’installation d’équipements de vidéosurveillance revient à remplir le tonneau des Danaïdes.
En effet, il ne s’agit pas simplement de les aider à mettre en place des équipements matériels, qui ont un coût. Pour que la vidéosurveillance soit efficace, il faut engager toute une série de dépenses pour l’entretien des appareils ; il faut du personnel derrière les écrans de contrôle pour surveiller ce qui se passe. Aujourd'hui, ces employés sont très mal payés, en dessous du SMIC. Du reste, – peut-être avez-vous pu le constater si vous avez visité des centres de vidéosurveillance – ils se retrouvent avec vingt à vingt-cinq écrans à regarder, un poste de télévision est parfois allumé, et, souvent, la police n’a pas les moyens d’intervenir.
En outre, une fois que l’État aura aidé les municipalités en difficulté à financer des investissements auxquels elles ne peuvent plus faire face, il ne pourra pas ensuite contribuer au salaire du personnel de surveillance et d’entretien.
Par ailleurs, toutes les études conduites dans le pays où la vidéosurveillance est le plus développée, la Grande-Bretagne, montrent que l’efficacité de ce type de dispositif est faible car les moyens humains nécessaires pour assurer son fonctionnement ne sont pas au rendez-vous. C’est également le constat qu’ont réalisé un certain nombre de chercheurs en France. Ainsi, le chercheur grenoblois Sébastian Roché, qui a longtemps été conseiller auprès du ministre de l’intérieur Jean-Pierre Chevènement, que l’on ne saurait suspecter de tenir un discours antisécuritaire, a produit beaucoup d’analyses et d’études sur la très faible rentabilité de ces équipements en termes de sécurité.
Dès lors, compte tenu de la situation budgétaire du pays, je ne vois pas la nécessité de procéder à de telles dépenses.
Aussi, nous maintenons notre amendement, et nous appelons le Sénat à le voter. §
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 33 est adopté.
L'amendement n° I-184, présenté par Mme Klès, MM. Le Menn et Rebsamen, Mme M. André, MM. Frécon, Miquel, Berson, Botrel et Caffet, Mme Espagnac, MM. Germain, Haut, Hervé, Krattinger, Massion, Patient, Patriat, Todeschini, Yung et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Le Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) est abondé annuellement par une contribution des assurés sur chaque contrat d’assurance de biens et par les entreprises d’assurance dans des conditions définies par décret en Conseil d’État. » ;
2° Après la première phrase du troisième alinéa, sont ajoutés cinq alinéas ainsi rédigés :
« La contribution visée au deuxième alinéa est répartie en trois sections ainsi dénommées :
« - dispositifs humains de médiation sociale pour 65 % de son produit ;
« - dispositifs de prévention en dehors des crédits spécifiques alloués, dispositifs d’accompagnement à la parentalité, d’accueil, d’aide aux victimes et de prévention de la récidive, pour 20 % de son produit ;
« - dispositifs de vidéoprotection pour 15 % de son produit.
« L’excédent non utilisé au 31 décembre sur l’une des trois sections est reversé au Trésor avant le 30 juin de l’exercice suivant. »
II. - L’article L. 422-1 du code des assurances est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le Fonds interministériel de prévention de la délinquance créé par l’article 5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 sur la prévention de la délinquance est abondé annuellement par une contribution des assurés sur chaque contrat d’assurance de biens et par les entreprises d’assurance dans des conditions définies par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Jacky Le Menn.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le nombre d’atteintes aux biens et de faits de dégradations volontaires a atteint un niveau qui représente, pour nombre de nos concitoyens, une préoccupation quotidienne. Le nombre d’atteintes volontaires à l’intégrité physique des individus reste, quant à lui, en augmentation.
Le résultat de ces atteintes aux biens et aux personnes représente un coût très élevé pour la société, au-delà des traumatismes vécus par leurs victimes. Dans ce contexte, il est donc indispensable d’encourager les dispositifs qui ont fait leurs preuves et permettent, d’une part, de lutter efficacement contre les différentes formes de délinquance et, d’autre part, de les prévenir.
L’efficience du Fonds interministériel de prévention de la délinquance, créé par l’article 5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007, doit être améliorée et ses ressources doivent être augmentées ; c’est l’objectif visé au travers de cet amendement.
Cela permettrait de renforcer ses interventions financières, d’une part, vers les dispositifs humains de médiation sociale de terrain – services de prévention-médiation, agents de médiation sociale, médiation de quartier, correspondants de nuit… –, avec un effort particulier en faveur des zones prioritaires de sécurité et à condition que ces dispositifs soient intégrés dans les stratégies locales de sécurité, et, d’autre part, vers les dispositifs de soutien à la parentalité, en complément des crédits destinés notamment à la médiation familiale, à la thérapie familiale et à l’alphabétisation.
Le Fonds pourrait également contribuer au financement de postes de coordonnateurs chargés du suivi des Conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, les CLSPD.
L’amélioration du financement du FIPD pourrait être obtenue, si notre proposition était adoptée, dans des conditions qui seraient arrêtées par décret en Conseil d’État, par une contribution annuelle des assurés sur chaque contrat d’assurance des biens et par des compagnies d’assurances, fixée par la loi de finances. Ce dispositif devrait rapidement permettre un réel retour sur investissement, au profit des acteurs concernés, grâce à une diminution des atteintes aux biens et aux personnes, entraînant, par voie de conséquence, une baisse correspondante des primes d’assurance.
Conformément aux prescriptions de la LOLF, la base de financement doit être en rapport avec les finalités du Fonds. En conséquence, une commission nationale tripartite pourrait être installée, dont l’objet consisterait en particulier à donner un avis conforme sur la répartition des crédits du FIPD, ainsi qu’à en contrôler le bon usage et l’efficience.
En conclusion, il s’agit donc, avec cet amendement, de parfaire le dispositif existant dans l’intérêt de nos concitoyens.
La commission des finances a estimé nécessaire de recueillir l’avis du Gouvernement.
Dans l’ensemble, nous partageons les préoccupations exprimées par les auteurs de l’amendement : il y a lieu aujourd'hui d’améliorer le financement de la prévention de la délinquance.
Pour autant, nous tenons à formuler quelques réserves que nous inspire l’amendement.
Tout d’abord, le financement de la mesure ferait peser un coût supplémentaire sur les assurés et les compagnies d’assurances ; nous devons garder cet élément à l’esprit.
Surtout, les contours de la contribution restent assez flous puisque l’amendement renvoie à un décret en Conseil d’État pour préciser ses conditions. Il est toujours difficile d’apprécier les tenants et les aboutissants d’un amendement qui procède de la sorte. Faute de certains éléments d’information sur, notamment, les montants, la durée ou les limites du dispositif, la commission des finances s’est retrouvée quelque peu démunie pour porter une appréciation à son sujet.
Au final, avant de se prononcer définitivement, ne faudrait-il pas mener une réflexion plus approfondie sur les objectifs du Fonds et sur ses modalités de financement ? Telle est la question que se sont posée les membres de la commission, qui ont tout de même souhaité bénéficier de l’éclairage du Gouvernement.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour trois raisons.
Premièrement, la création d’une nouvelle taxe ne paraît pas opportune dans un projet de loi de finances qui, je le reconnais bien volontiers, n’est déjà pas avare en nouvelles dispositions qui sollicitent nos concitoyens. Un impôt ou une taxe de plus, est-ce bien raisonnable ? Le Gouvernement ne le croit pas.
Deuxièmement, votre amendement tend à figer dans la loi la répartition des sommes affectées au Fonds interministériel de prévention de la délinquance. En vérité, procéder de la sorte, c’est empêcher le pouvoir exécutif de ventiler les crédits au gré des besoins, c’est-à-dire des demandes formulées par les élus locaux. Je pense qu’il faut garder une certaine souplesse dans l’utilisation des moyens affectés à ce fonds. Figer la répartition des crédits dans la loi, c’est se condamner à l’appliquer jusqu’à la prochaine loi de finances, quelles que soient les évolutions des besoins constatés ici ou là.
Troisièmement, comme vous le savez, aujourd’hui, la décision d’affectation de ces crédits est déconcentrée, elle relève de la compétence des préfets ; les auteurs de l’amendement souhaitent réattribuer cette compétence à l’échelon central. Je pense que ce n’est pas une bonne idée. En effet, cette « reconcentration » introduirait un élément de complexité dans la prise de décision qui s’en trouverait ralentie.
Pour ces raisons, le Gouvernement appelle le Sénat à ne pas voter cet amendement, dans l’hypothèse où il serait maintenu.
Si nous souscrivons aux objectifs qui sous-tendent la démarche des auteurs de cet amendement, nous considérons cependant que l’adoption d’une telle mesure présenterait plus d’inconvénients qu’elle ne résoudrait de problèmes.
M. le rapporteur général a très justement rappelé que cette mesure représente un coût supplémentaire non négligeable pour les assurés, de l’ordre de 100 millions d’euros, sans parler du fait que ce prélèvement touchera tous les assurés – parce que si l’on vise « chaque contrat d’assurance sur les biens », tout le monde est concerné. Par ailleurs, il a estimé, comme M. le ministre, que les contours de ce dispositif étaient flous.
Enfin, le système de redistribution de ces sommes n’est manifestement pas clair : la clé de répartition indiquée mentionne 65 % pour les « dispositifs humains de médiation sociale » – comment ce pourcentage est-il fixé, nul ne le sait ! –, ce n’est qu’ensuite qu’est mentionnée la prévention de la récidive. Cette question mérite d’être traitée autrement et suppose que soit organisée une concertation avec les ministères de l’intérieur et de la justice.
Nous voterons donc contre cet amendement.
L’amendement n’est pas adopté.
I. – L’article 54 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 est ainsi modifié :
1° Après le mot : « intitulé : », la fin du premier alinéa est ainsi rédigé : « “Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État”. » ;
2° Après le b du 1°, sont insérés des c et d ainsi rédigés :
« c) Le produit de la cession de l’usufruit de tout ou partie des systèmes de communication radioélectrique des services de l’État, dans les conditions fixées au II de l’article 34 de la loi n° … du … de finances pour 2013 ;
« d) Le produit des redevances d’occupation domaniale résultant d’autorisations d’utilisation de points hauts des réseaux de télécommunication et de transmission des services de l’État, dans les conditions fixées au même II ; »
3° Les c et d du 1° deviennent, respectivement, les e et f ;
4° Le c du 2° est ainsi rédigé :
« c) Les dépenses d’investissement et de fonctionnement destinées à l’acquisition et à la maintenance d’infrastructures, de réseaux, d’applications, de matériels et d’équipements d’information et de communication radioélectriques liées à l’exploitation du réseau ; »
5° Le 2° est complété par un d ainsi rédigé :
« d) Les versements au profit du budget général pour un montant qui ne peut être inférieur à 15 % du produit visé au a du 1°. Ces versements ne s’appliquent pas au produit des redevances acquittées par les opérateurs privés pour l’utilisation des bandes de fréquences libérées par le ministère de la défense jusqu’au 31 décembre 2014 et par le ministère de l’intérieur jusqu’au 31 décembre 2018. »
II. – L’usufruit mentionné au c du 1° de l’article 54 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009, dans sa rédaction issue de la présente loi, peut être cédé par l’État, selon des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé des communications électroniques, dans le cadre d’une convention, après mise en concurrence. Cette convention précise les conditions selon lesquelles est assurée la continuité du service public. Un décret en Conseil d’État fixe la durée maximale de cette cession.
L’utilisation des points hauts des réseaux de télécommunication mentionnée au d du même 1°, dans sa rédaction issue de la présente loi, peut être autorisée par l’État par arrêté des ministres chargés de l’économie et des communications électroniques dans le cadre d’une procédure d’attribution, après appel à la concurrence et pour une durée limitée. Cette attribution permet d’assurer la continuité du service public.
Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’élaboration de la convention et de la procédure d’attribution prévues aux deux premiers alinéas du présent II.
Les procédures de cession de l’usufruit ou d’autorisation d’occupation domaniale mentionnées aux deux premiers alinéas prévoient notamment :
1° Les conditions dans lesquelles l’État conserve les droits d’utilisation des systèmes et des infrastructures nécessaires à l’exécution des missions de service public ;
2° Les modalités de contrôle de l’État sur l’utilisation de ces systèmes et infrastructures ;
3° Les sanctions susceptibles d’être infligées en cas de manquement aux obligations qu’il édicte ;
4° L’interdiction, d’une part, de toute cession de l’usufruit, de son apport sous quelque forme que ce soit ou de toute création de sûretés s’y rattachant et, d’autre part, de toute cession ou transmission du titre d’occupation domaniale qui n’auraient pas été dûment autorisés par l’État.
Est nul de plein droit tout acte qui ne respecterait pas cette interdiction.
Est nul de plein droit tout acte de cession, d’apport ou de création de sûretés portant sur l’usufruit mentionné ci-dessus réalisé sans que l’État ait été mis à même de s’y opposer ou qui est effectué en violation de son opposition ou en méconnaissance des conditions fixées par l’État à la réalisation de l’opération. –
Adopté.
Le 2° du I de l’article 23 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 est ainsi modifié :
1° Après le d, sont insérés des e et f ainsi rédigés :
« e) Une fraction de la dotation générale de décentralisation “Formation professionnelle et apprentissage” en complément des versements effectués à partir du budget général au titre des compétences transférées aux régions en matière d’apprentissage et répartie selon les mêmes modalités que celles retenues pour la compensation financière de l’indemnité compensatrice forfaitaire mentionnée à l’article L. 6243-1 du code du travail et transférée aux régions par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité ;
« f) Le reversement de recettes indûment perçues au titre des années antérieures à l’exercice budgétaire en cours. » ;
2° Au dernier alinéa, les références : « aux a et b » sont remplacées par les références : « aux a, b et e ».
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° I-255 est présenté par M. Patriat et Mme Espagnac.
L’amendement n° I-300 est présenté par M. Reichardt.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. François Patriat, pour présenter l’amendement n° I-255.
Monsieur le ministre, l’Association des régions de France s’est inquiétée de cet article 35. Le présent amendement vise à rétablir l’intégralité de la fraction « Formation professionnelle et apprentissage » de la dotation globale de décentralisation, ou DGD, puisque l’article 35 prévoit le transfert de 250 millions d’euros du budget général vers le compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage », ou FNDMA. Cette somme correspond à des crédits actuellement compris dans la dotation globale de décentralisation versée aux régions.
Cette disposition porte atteinte au principe de non-affectation des recettes, et plus largement au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales. La loi du 27 février 2002 a en effet transféré aux conseils régionaux des compétences, notamment celle du versement aux entreprises des indemnités compensatrices forfaitaires, ou ICF. Cette compétence a été compensée sous forme de dotation ; par principe, cette ressource n’est pas affectée. Or, en procédant à l’extraction de 250 millions d’euros des crédits prévus pour la DGD, l’article 35 les affecte au compte d’affectation spéciale et contrevient donc à ce principe.
Ces 250 millions d’euros ont été évalués unilatéralement par vos services, monsieur le ministre, comme affectés non à l’ICF, mais à d’autres actions en faveur de l’apprentissage. Or les régions tiennent à rappeler que l’ICF est un dispositif triennal et qu’il est nécessaire de tenir compte de cette particularité.
En outre, la décentralisation vise précisément, par la libre administration, à orienter les crédits là où ils sont le plus pertinents pour mieux développer la politique de l’apprentissage. Toutes les régions de France ont signé avec le Gouvernement des contrats d’objectifs et de moyens pour le développement de l’apprentissage en s’engageant à augmenter les moyens qui y sont consacrés.
Pour l’année 2013, monsieur le ministre, vous allez me dire que rien ne change. Mais si, à l’avenir, l’excédent de certaines lignes budgétaires disparaît, l’équilibre futur du compte d’affectation spéciale va se trouver mis à mal à partir de 2014. Tel est l’objet de notre inquiétude et je souhaiterais obtenir quelques éclaircissements de votre part sur ce point.
Vous allez sans doute me répondre que cette mesure poursuit une logique, le regroupement dans un même compte des crédits de l’aide à l’apprentissage, et qu’elle ne menace pas l’équilibre financier du compte ni ne remet en cause les moyens affectés au développement de l’apprentissage. Cependant, si nous maintenions l’article 35 en l’état, les régions n’auraient-elles pas matière à s’inquiéter, à partir de 2014, quant au maintien des moyens consacrés à l’apprentissage ?
Au nom des présidents de région, notre collègue François Patriat s’inquiète du fait que la DGD versée par l’État aux régions au titre du financement de la prime d’apprentissage et des actions de développement de l’apprentissage, qui représente, au total, un montant de 1, 7 milliard d’euros en 2012, sera versée aux régions sur deux lignes différentes en 2013 : 1, 45 milliard d’euros au titre de la mission « Travail et emploi » et 250 millions d’euros via le compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ». L’opération est donc neutre pour les régions, qui percevront toujours le même montant de DGD.
Toutefois, nos collègues présidents de région souhaitent que le Gouvernement leur garantisse la pérennité de ce mode de financement. La commission souhaite donc connaître l’avis du Gouvernement et elle estime que les précisions et les garanties apportées par M. le ministre devraient permettre à nos collègues de retirer leur amendement.
Monsieur le sénateur, vous vous interrogez sur la possibilité ouverte par le projet de loi de finances pour 2013 de verser une fraction de la dotation globale de décentralisation au titre de la formation professionnelle à partir du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».
Il n’y a pas d’inquiétude à avoir quant au financement de la formation et les régions ne seront pas plus sollicitées qu’elles le sont actuellement. En effet, la dotation du compte d’affectation spéciale est suffisante, puisque les recettes attendues en 2013 – environ 700 millions d’euros en provenance de la taxe d’apprentissage et de la contribution supplémentaire à l’apprentissage –, additionnées au report de trésorerie accumulée au titre des années précédentes, pour un montant de 270 millions d’euros, permettront de financer sans difficulté l’ensemble des dépenses.
L’addition des 700 millions d’euros de la taxe d’apprentissage et des 270 millions d’euros de report de trésorerie donne un total légèrement inférieur à 1 milliard d’euros. Or, en 2012, le financement dont vous vous inquiétez a mobilisé 825 millions d’euros. Les sommes que je vous indique excèdent largement les besoins constatés en 2012 et rien n’indique que ces besoins augmentent en 2013 au-delà de la marge de manœuvre de près de 100 millions d’euros que nous constatons.
Il n’y a donc pas matière à s’inquiéter sur le niveau de financement de la formation professionnelle. Dès lors, les régions ne seront pas sollicitées. Je connais l’inquiétude très vive du président de l’Association des régions de France, président de la région Aquitaine, et je voudrais, au nom du Gouvernement, rassurer l’ensemble des présidents de région quant à la volonté du Gouvernement de ne pas transférer les charges que l’État doit assumer vers les budgets régionaux, les chiffres que je viens de citer l’attestent.
Par ailleurs, les centres de formation d’apprentis bénéficieront d’une part croissante du produit de la taxe d’apprentissage. En effet, la part qui leur est versée sera portée à 55 % en 2013, contre 53 % en 2012. Cette programmation est donc cohérente avec la volonté du Gouvernement de développer l’apprentissage et l’insertion professionnelle des jeunes sur le marché du travail. Cet article n’a pas pour objet de mettre davantage à contribution les régions : le Gouvernement a prévu des budgets largement suffisants pour que toute inquiétude soit dissipée sur ce point.
Si, comme je l’espère, je réussis à vous convaincre, monsieur le sénateur, j’apprécierais que vous retiriez votre amendement.
La réponse de M. le ministre est tout à fait adéquate pour 2013. Le report de l’excédent de trésorerie que nous connaissons actuellement va permettre de maintenir l’équilibre de ce compte d’affectation spéciale et de continuer à aider les centres d’apprentissage et les employeurs d’apprentis. Reste que rien ne dit que le même excédent sera enregistré en 2014.
Les régions ne sont pas inquiètes pour 2013, mais si l’excédent disparaît et qu’une somme équivalente n’est pas versée au titre de la DGD, un effort de financement supplémentaire leur incombera.
J’ai bien entendu votre engagement, monsieur le ministre, et j’ai pris note du fait que la part de taxe d’apprentissage versée aux centres d’apprentissage sera plus importante. Si vous pouvez me donner les mêmes garanties pour 2014, j’accéderai bien sûr à la demande de retrait formulée par vous-même et par M. le rapporteur général.
Nous discutons du projet de loi de finances pour 2013 : le principe de l’annualité budgétaire ne me permet donc pas de prendre d’engagement financier au-delà du cadre de cette loi de finances. Pour 2013, les choses sont claires, vous n’avez pas à vous inquiéter.
Pour l’avenir, il demeure néanmoins que vous connaissez les intentions du Gouvernement. Vous savez l’importance que nous attachons au financement de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Je ne vois pas au nom de quoi la politique que le Gouvernement a décidée pour 2013 serait démentie en 2014. La formation professionnelle bénéficiera par conséquent des financements adéquats en 2014, comme en 2013.
J’ajoute que ce gouvernement n’a aucune intention de se défausser sur les collectivités locales, en l’occurrence les régions, comme d’autres gouvernements ont pu le faire. Un dialogue est engagé entre l’État et les collectivités territoriales, entre le Gouvernement et les élus locaux, en particulier les présidents de région. Ce dialogue est caractérisé par une grande qualité, une vraie franchise et une parfaite sincérité.
L’ensemble de ces éléments devrait être de nature à vous rassurer, monsieur le sénateur, quant aux intentions du Gouvernement sur le fond et quant à la méthode utilisée.
Monsieur le ministre, notre amendement avait pour but d’attirer l’attention de l’ensemble des élus et du Gouvernement sur un risque qui pouvait peser sur le financement de la formation professionnelle. Vous me dites, et je vous crois, que la discussion entre le ministère du travail, vos services et les régions se poursuivra dans les mois qui viennent pour assurer la pérennité de ce financement, parce que nous espérons tous que l’apprentissage pourra continuer à se développer et que nous pourrons respecter nos conventions d’objectifs et de moyens. Sur la base de ce dialogue constructif, j’accepte de retirer mon amendement.
L’article 35 est adopté.
À la fin du III de l’article 235 ter ZF du code général des impôts, le montant : « 155 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 200 millions d’euros ».
L’amendement n° I-318, présenté par M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Au IV de l’article 65 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, le montant : « 35 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 57 millions d’euros ».
II. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa de l’article 302 bis ZB, le nombre : « 7, 32 » est remplacé par le nombre : « 7, 62 » ;
2° Au III de l’article 235 ter ZF, le montant : « 155 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 178 millions d’euros ».
La parole est à M. Jean-Vincent Placé.
Ancien vice-président de la région Île-de-France en charge des transports, je sais à quel point le financement du transport collectif est un sujet épineux. Aujourd’hui, les trains « Corail » et trains de nuit « Intercités » rencontrent de graves difficultés financières, cette question concerne d’ailleurs moins la région Île-de-France que les autres régions.
Pour l’année 2013, le montant du budget d’exploitation des trains d’équilibre du territoire est établi à 325 millions d’euros. L’article 36 du projet de loi de finances pour 2013 prévoit de porter le plafond de la taxe sur le résultat des grandes entreprises ferroviaires de 155 millions à 200 millions d’euros, la taxe sur le chiffre d’affaires des entreprises de transport ferroviaire, dite « contribution de solidarité territoriale », reste, quant à elle, évaluée à 90 millions d’euros.
Si cet article est adopté en l’état, la part de financement provenant de la taxe d’aménagement du territoire, payée par les sociétés concessionnaires d’autoroutes, sera toujours de 35 millions d’euros, alors que la part supportée par la SNCF, passera à 290 millions d’euros, soit près de 90 % du financement global.
Sachant qu’outre le financement du déficit d’exploitation des trains d’équilibre du territoire, la SNCF rencontre également des problèmes liés au renouvellement à venir du matériel, dont les besoins sont estimés à près de 3 milliards d’euros sur quinze ans, nous pensons que cet article doit être revu afin de faire porter davantage le surcroît de dépenses sur les sociétés d’autoroutes.
L’objet de cet amendement est donc de rééquilibrer l’effort entre le secteur ferroviaire et les sociétés d’autoroutes, car la répartition est très déséquilibrée.
Les sénateurs écologistes auraient pu déposer un amendement plus offensif tendant uniquement à augmenter la part de financement incombant aux sociétés d’autoroutes. Tenant compte des difficultés que rencontrent les uns et les autres, nous avons choisi l’équilibre et la mesure – cela nous arrive aussi… –, en répartissant l’effort pour moitié sur le secteur ferroviaire et pour moitié sur les sociétés d’autoroutes.
En cas de statu quo, c’est plutôt l’usager des transports collectifs qui sera pénalisé. Or il nous paraît important que le report modal de l’automobile vers les transports collectifs soit vivement encouragé.
Cet amendement pourrait donc, à notre avis, recueillir un avis plus positif de la commission et du Gouvernement.
Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.
Mon cher collègue, il est vrai que les trains d’équilibre du territoire sont aujourd’hui majoritairement financés par des taxes sur le secteur ferroviaire, en premier lieu la SNCF, et, dans une moindre mesure – 35 millions d’euros sur 325 millions d’euros, donc un peu plus de 10 % –, par les sociétés d’autoroute via une fraction de la taxe d’aménagement du territoire.
Par cet amendement, vous proposez de rééquilibrer ce financement en sollicitant davantage la taxe d’aménagement du territoire. Une telle augmentation ne nous est pas parue opportune, car, on le sait, elle serait obligatoirement répercutée sur l’usager par une hausse des péages.
Au surplus, le ministre pourra éventuellement le confirmer, le Gouvernement travaille actuellement sur ce que devrait être le bon niveau de participation des sociétés d’autoroute à l’intérêt général. Dans l’attente de la conclusion de ces travaux, il nous semble préférable de ne pas modifier les prélèvements qui pèsent sur ces sociétés.
C'est la raison pour laquelle nous demandons le retrait de cet amendement.
Le Gouvernement n’est pas favorable à votre amendement, monsieur le sénateur.
Vous proposez de modifier la répartition du financement du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ». Vous envisagez donc de relever la fraction de la taxe d’aménagement du territoire en portant son tarif de 7, 32 à 7, 62 euros.
Le Gouvernement partage votre souci de veiller à l’équilibre optimal du financement intermodal de la politique des transports, et je sais que la SNCF est tout particulièrement attachée à cette préoccupation.
Cependant, l’augmentation de la taxe d’aménagement du territoire payée par les concessionnaires d’autoroute se conclurait, le rapporteur général l’a indiqué, par une augmentation à due concurrence des péages acquittés par les usagers.
Dans le contexte actuel, je ne suis pas certain qu’une telle hausse, qui irait largement au-delà de l’inflation, ne serait pas préjudiciable aux ménages. Or, vous le savez, le Gouvernement a fait le choix de protéger autant que faire se peut le pouvoir d’achat des ménages en 2013 afin de maintenir la consommation.
Cela étant, l’option retenue pour l’année 2013 ne préjuge pas des choix structurels pour les années à venir. Nous connaissons vos préoccupations en la matière, mais, pour l’année prochaine, je le répète, le Gouvernement a fait le choix de privilégier la consommation des ménages.
Dès lors, nous soutenons l’option consistant à faire porter le financement des besoins identifiés du compte par le secteur ferroviaire en relevant la taxe sur le résultat de ces entreprises.
Le Gouvernement appelle donc au rejet de votre amendement.
Cela fait des années que le groupe socialiste demande le rééquilibrage du financement des dépenses liées aux trains d’équilibre du territoire. Je rappelle que, pour sauver ces trains, l’État a signé, voilà deux ans, une convention avec la SNCF qui devrait vraisemblablement être reconduite, puisqu’il n’est heureusement pas question d’ouverture à la concurrence dans un avenir proche…
Que constatons-nous aujourd’hui ?
Le financement des trains d’équilibre du territoire est assuré à 83 % par la SNCF et seulement à 17 % par les sociétés d’autoroute. Or l’article 36 du projet de loi de finances pour 2013 va plus loin, puisqu’il prévoit purement et simplement de relever de 45 millions d’euros le plafond de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires, la TREF, affectée au compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs », exclusivement acquittée par la SNCF. Le déséquilibre entre la participation de la SNCF et celle des sociétés d’autoroute s’en trouvera donc accru.
Alors, quelle que soit la sympathie que l’on puisse avoir par ailleurs pour le travail – immense – réalisé par le rapporteur général et par le ministre du budget, il n’en demeure pas moins difficile de les suivre et de ne pas approuver l’amendement déposé par notre collègue Jean-Vincent Placé.
Aussi, à mon grand regret, monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre, j’invite mes collègues à adopter cet amendement.
Cela étant, j’ai bien noté, monsieur le ministre, que vous n’écartiez pas, à l’avenir, une remise à plat de ce financement prévu jusqu’en 2019. Il va falloir trouver des solutions, parce qu’il est inadmissible que la SNCF assure l’essentiel du financement des trains d’équilibre du territoire. L’intermodalité est nécessaire, et elle exige un rééquilibrage. En tout cas, je plaide ardemment, et depuis des années, pour qu’il en soit ainsi !
Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste, ainsi que sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.
Je me retrouve pleinement dans ce que vient de dire notre collègue. Dans la mesure où les trains d’équilibre du territoire, qui portent bien leur nom, sont très utiles à la desserte de nos territoires, il est évident que nous devons veiller à leurs conditions de financement.
Je soutiens, comme nos deux collègues, qu’il faut rééquilibrer les conditions de financement et qu’il n’est pas bon que la participation de la SNCF soit proportionnellement beaucoup plus importante que celle des sociétés d’autoroute.
À l’époque où les autoroutes relevaient du secteur public, je le rappelle, leurs recettes participaient au financement du ferroviaire. Dans le cadre d’une réflexion sur l’avenir du rééquilibrage modal des transports, nous ferions bien de revoir la situation des autoroutes en France. Je suis plutôt favorable à une renationalisation, mais, sans même aller jusque-là, il serait déjà intéressant d’engager un vrai travail sur le retour financier des autoroutes vers le ferroviaire.
Monsieur le ministre, vous avez raison, l’amendement n° I-318 se traduira automatiquement par l’augmentation des péages, mais, dans l’immédiat, nous le voterons, sachant que nous devrions nous pencher sur une autre forme de participation des sociétés d’autoroutes, cette fois sur leurs résultats annuels, afin que la hausse des péages ne soit plus la seule réponse.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.
L'amendement est adopté.
Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.
I. – Le code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 3211-5, il est inséré un article L. 3211-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3211 -5 -1. – I. – L’aliénation d’un immeuble relevant du patrimoine immobilier bâti de l’État situé sur un terrain mentionné au 1° de l’article L. 211-1 du code forestier, ainsi que de son terrain d’assiette, n’est possible que si cet immeuble satisfait aux conditions suivantes :
« 1° Il ne présente pas d’utilité pour atteindre les objectifs de gestion durable des bois et forêts conformément au chapitre Ier du titre II du livre Ier du code forestier ;
« 2° Il est desservi par l’une des voies mentionnées aux articles L. 111-1 et L. 161-1 du code de la voirie routière ou par un chemin forestier ouvert à la circulation publique.
« Le terrain d’assiette pouvant être ainsi aliéné est limité à la superficie permettant un usage normal de l’immeuble bâti, comprenant notamment la cour, le jardin ou, le cas échéant, le parc qui lui est attaché. Cette superficie peut être complétée par décret lorsque l’aliénation a pour objet de garantir la cohérence de la gestion forestière.
« II. – La vente intervient dans la forme ordinaire des ventes des biens de l’État. La liste des immeubles pouvant être vendus dans les conditions mentionnées au présent article est fixée par décret pris sur le rapport conjoint des ministres chargés des forêts et du Domaine. » ;
2° L’article L. 3211-21 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les bois et forêts de l’État ne peuvent être échangés qu’avec des biens de même nature, après accord du ministre chargé des forêts. L’échange des immeubles mentionnés à l’article L. 3211-5-1 est subordonné aux mêmes conditions que leur aliénation. »
II. – Est autorisée la cession par l’État de la zone d’activité économique incluse dans la zone UX du plan local d’urbanisme de la commune de Velaine-en-Haye (Meurthe-et-Moselle). –
Adopté.
Au début du a du 2° du A du I de l’article 51 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, les mots : « Les pensions versées au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite » sont remplacés par les mots : « Les pensions relevant du régime de retraite des fonctionnaires civils et militaires de l’État ».
La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, sur l’article.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article parachève le transfert de la prise en charge d’une partie des anciens agents des collectivités mahoraises de la Caisse de retraites des fonctionnaires et agents des collectivités publiques de Mayotte vers le service des retraites de l’État.
En effet, une loi du 11 juillet 2001, modifiée, relative à Mayotte avait établi que les agents de la collectivité départementale, des communes et des établissements publics administratifs de Mayotte devaient être intégrés, au plus tard le 31 décembre 2010, dans l’un des corps ou cadres d’emplois des trois fonctions publiques. Ce sera chose faite au 1er janvier 2013, et il est bon que le présent gouvernement tienne enfin cet engagement.
Je profiterai de l’occasion que me donne cet article pour revenir sur le dossier sensible de l’indexation des salaires pour les fonctionnaires exerçant à Mayotte, afin d’aligner leurs revenus sur ceux des départements ultramarins.
J’insiste sur le fait que cette revendication très forte des Mahorais est au cœur des nombreux conflits sociaux en cours. Je citerai, à titre d’exemple, la grève entamée par la Caisse de sécurité sociale de Mayotte il y a maintenant une cinquantaine de jours, qui a pour résultat que le versement de nombreuses prestations sociales n’est plus assuré par cet organisme. Les conséquences socio-économiques, voire sanitaires, sont dramatiques pour la population.
Par une lettre de mission en date du 9 octobre 2012, les ministres de l’économie et des finances, des affaires sociales et de la santé, de l’intérieur, de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique, des outre-mer et du ministre délégué au budget – rien que cela ! – ont mandaté quatre inspecteurs généraux issus de l’Inspection générale de l’administration, de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales, pour rédiger un rapport sur les conditions et modalités de mise en place d’un dispositif de rémunération majorée.
Du 17 au 25 octobre 2012, la mission interministérielle s’est rendue à Mayotte pour auditionner de nombreuses personnes ; ses travaux seront bientôt connus.
Compte tenu de l’état actuel des finances, je suis certain que la mise en place d’une telle indexation des salaires ne sera pas chose facile, mais il s’agit de réparer une discrimination qui ne saurait durer davantage et de compenser la cherté de la vie à Mayotte. Le dispositif prévu dans la loi relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, récemment votée par le Parlement, devrait atténuer la situation sur ce second point.
Quant au conflit au sein de la caisse de sécurité sociale, sa cessation dépend de l’application d’un protocole d’accord auquel le Gouvernement avait donné son agrément le 18 juin 2012 - la date ne s’invente pas ! Ce conflit doit trouver une issue rapide, compte tenu de ses répercussions catastrophiques sur la société.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
L'article 37 est adopté.
I. – Il est ouvert un compte de concours financiers intitulé : « Avances aux organismes de sécurité sociale ».
Ce compte retrace, en dépenses et en recettes, les versements à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale et les remboursements des avances sur le montant des recettes affectées aux caisses et régimes de sécurité sociale en application :
1° Du A du II du présent article ;
2° Du 3° de l’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale.
II. – A. – Pour l’application des articles L. 131-7 et L. 139-2 du code de la sécurité sociale, la compensation intégrale par l’État des mesures définies à l’article L. 241-18 du même code est effectuée, dans des conditions qui en assurent la neutralité financière pour les caisses et les régimes de sécurité sociale concernés, par l’affectation d’une fraction égale à 0, 33 % du montant de la taxe sur la valeur ajoutée nette correspondant aux montants de cette taxe enregistrés par les comptables publics, déduction faite des remboursements et restitutions effectués par les comptables assignataires.
B. – Les caisses et les régimes de sécurité sociale bénéficient chacun d’une quote-part de la fraction mentionnée au A fixée par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale au prorata de leur part relative dans la perte de recettes résultant des mesures d’allègement de cotisations sociales mentionnées au même A. L’Agence centrale des organismes de sécurité sociale est chargée de centraliser le produit de la fraction mentionnée audit A et d’effectuer sa répartition entre les caisses et les régimes de sécurité sociale en application de cet arrêté.
C. – En cas d’écart constaté entre le montant de la recette affectée en application du A et le montant définitif de la perte de recettes que cette affectation doit compenser, cet écart est résorbé par la prochaine loi de finances suivant sa constatation.
III. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
A. – Le 7° de l’article L. 131-8 est ainsi modifié :
1° À la fin du a, le taux : « 58, 10 % » est remplacé par le taux : « 63, 47 % » ;
2° Le h est abrogé ;
B. – Au 3° de l’article L. 241-2, le taux : « 5, 75 % » est remplacé par le taux : « 5, 88 % » ;
C. – Le premier alinéa et les a à e de l’article L. 862-3 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Les recettes du fonds institué à l’article L. 862-1 sont constituées du produit de la taxe mentionnée au I de l’article L. 862-4 et du produit des contributions mentionnées aux articles 520 B et 520 C du code général des impôts. »
IV. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la fin du VI de l’article 520 B, les mots : « pour moitié à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés » sont remplacés par les mots : « au fonds institué à l’article L. 862-1 du code de la sécurité sociale » ;
2° L’article 520 C est complété par un VI ainsi rédigé :
« VI. – Le produit de la contribution mentionnée au I est affecté au fonds institué à l’article L. 862-1 du code de la sécurité sociale. »
V. – Le présent article s’applique à compter du 1er janvier 2013.
L'amendement n° I-438, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Du A du II bis du présent article.
II. – Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
II bis. – A.– Pour l’application des articles L. 131-7 et L. 139-2 du code de la sécurité sociale, la compensation intégrale par l’État de la réduction mentionnée au premier alinéa de l’article L. 133-7 du même code est effectuée, dans des conditions qui en assurent la neutralité financière pour la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, par l’affectation d’une fraction égale à 0, 14 % du montant de la taxe sur la valeur ajoutée nette correspondant aux montants de cette taxe enregistrés par les comptables publics, déduction faite des remboursements et restitutions effectués par les comptables assignataires.
B. – En cas d’écart constaté entre le montant de la recette affectée en application du A et le montant définitif de la perte de recettes que cette affectation doit compenser, cet écart est résorbé par la plus prochaine loi de finances suivant sa constatation. »
III. – Alinéa 19
Rédiger ainsi cet alinéa :
V. – Le II bis du présent article s’applique à compter du 1er février 2013. Les autres dispositions du présent article s’appliquent à compter du 1er janvier 2013. »
La parole est à M. le ministre délégué.
Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° I-437.
Je suis en effet saisi d’un amendement n° I-437, également présenté par le Gouvernement, et qui est ainsi libellé :
I. – Alinéas 10 et 11
Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :
1° Au a, le taux : « 58, 10 % » est remplacé par le taux : « 68, 14 % » ;
2° Au b, le taux : « 7, 86 % » est remplacé par le taux : « 7, 27 % » ;
3° Au c, le taux : « 15, 44 % » est remplacé par le taux : « 9, 46 % » ;
4° Après le mot : « article », la fin du h est ainsi rédigée : « L. 862-1 du présent code, pour une fraction correspondant à 3, 15 % » ;
5° Le i est abrogé.
II. – Alinéa 14
Après la référence :
L. 862-4
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
et d’une fraction, fixée à l’article L. 131-8, du produit du droit de consommation mentionné à l’article 575 du code général des impôts. »
III. – Alinéas 16 et 18
Remplacer les mots :
au fonds institué à l’article L. 862-1 du code de la sécurité sociale
par les mots :
à la branche mentionnée au 2° de l’article L. 722-8 du code rural et de la pêche maritime
Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.
L’amendement n° I-438 a pour objet d’assurer la compensation intégrale à la sécurité sociale de l’instauration en loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 d’une déduction forfaitaire de cotisations sociales dues par les particuliers employeurs, à hauteur de 0, 75 euro par heure travaillée, selon les mêmes modalités que pour les exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires, c’est-à-dire par affectation d’une fraction de TVA nette.
Cet amendement est la conséquence logique de l’adoption par l’Assemblée nationale de l’amendement de son rapporteur général tendant à prévoir, à la suite de la suppression du forfait et de son remplacement par le dispositif des frais réels, une diminution de ce montant-là du coût du travail pour les particuliers employeurs.
L’amendement n° I-437 est un amendement de coordination entre le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances. Il vise à renforcer la sécurité juridique des dispositions adoptées par l’Assemblée nationale lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.
En effet, l’Assemblée nationale a sensiblement amplifié le mouvement de rationalisation engagé par le Gouvernement dans cet article 38. Les dispositions relatives à l’affectation des droits de consommation sur les tabacs et aux ressources du « fonds CMU », le Fonds de financement de la CMU complémentaire, ont en effet été modifiées.
L’amendement n° I-437 tire les conséquences, dans le code général des impôts, de l’affectation des taxes sur les boissons sucrées et édulcorées à la branche maladie du régime des exploitants agricoles, décidée par l’Assemblée nationale dans le cadre de la discussion de ce même projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.
Vous vous en souvenez, mesdames, messieurs les sénateurs, la précédente majorité avait décidé de taxer les boissons sucrées ou contenant des édulcorants afin de diminuer le coût du travail pour les exploitants agricoles.
En vérité, cette diminution n’a jamais été mise en œuvre. Le gouvernement précédent avait fait voter la recette, mais il ne l’a pas affectée à la diminution du coût du travail, car cela aurait été assimilé à une aide d’État, aide que les bénéficiaires auraient dû rembourser. On sait ce qu’il en est aujourd'hui des aides appelées « plans de campagne » octroyées aux exploitants de vergers : leurs bénéficiaires doivent aujourd'hui les rembourser, car la Commission considère qu’il s’agit d’aides d’État.
Le gouvernement actuel maintient en revanche cette recette et ne propose pas au Parlement de revenir sur cette taxe, dont il prévoit d’affecter le produit au « fonds CMU ». Nous avons eu un débat intéressant à l’Assemblée nationale sur ce sujet, nous l’avons maintenant ici, au Sénat. J’espère que la Haute Assemblée suivra le Gouvernement concernant cette nouvelle affectation.
Je suis favorable à ces amendements. J’avais en effet indiqué dans mon rapport, concernant l’article 38, que le Gouvernement devrait très certainement tirer les conséquences des dispositions adoptées par nos collègues députés. C’est chose faite avec ces deux amendements, dont la nature et la justification nous ont été expliquées.
L'amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
L'article 38 est adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quatorze heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Jean-Léonce Dupont.