Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je dois l’avouer, ce débat sur la participation de la France au budget de l’Union européenne prend ces jours-ci un relief assez particulier.
Il intervient quasiment au terme de la discussion d’un projet de loi de finances qui vise notamment à consacrer la progression de la participation de notre pays, première étape d’une hausse qui ira de pair, soulignons-le, avec une réduction du prélèvement sur recettes effectué en direction des collectivités locales.
Il est évident que cette progression de la contribution française va au-delà de la simple prise en compte de l’apparition prochaine d’un vingt-huitième invité à la table européenne, à savoir nos amis de la République de Croatie. La part de la population de ce pays et celle de son PIB ne représentent respectivement, dans le cadre de l’Union européenne, qu’à peine 0, 8 % et 0, 7 %, soit bien moins que la progression de notre contribution.
Clairement, il existe donc d’autres raisons pour lesquelles la contribution de la France est amenée à croître, quand bien même l’adhésion de la République de Croatie, au demeurant actuellement gouvernée par une alliance de centre gauche, devrait se traduire pour ce pays par un versement d’aides communautaires supérieur à son propre apport au budget.
Le problème est que la nécessaire mise à plat du mode de financement de l’Union européenne, même si nous ne doutons pas de la volonté du Gouvernement de peser dans un certain sens en la matière, se déroule dans le cadre d’une négociation intergouvernementale où tout se passe plutôt mal. De fait, on aurait pu croire que, dans le contexte de crise économique et sociale aggravée que connaît l’Europe depuis 2008 – la situation antérieure n’était, à la vérité, guère meilleure –, la solidarité entre les États prendrait le pas sur toute autre considération. Ce n’est pas tout à fait le cas, chacun ici en conviendra aisément.
M. Cameron, Premier ministre britannique, veut absolument garder son « chèque », jadis négocié par Margaret Thatcher et qui permet au Royaume-Uni de ne pas payer ce qu’il devrait payer. Mme Merkel souhaite que le budget connaisse une inflexion à la baisse plus marquée, et en profite pour s’attaquer à certaines dépenses d’action sociale et caritative, notamment, nous l’avons vu, aux aides alimentaires. Quelques-uns des pays du Sud, ces éternels dépensiers aux yeux de certains de nos partenaires européens peu charitables, se battent pour maintenir à peu près à flot une politique agricole commune dont leurs agricultures ont le plus grand besoin.
Au cœur de la crise, donc, et alors même que semblent s’accumuler les nuages les plus sombres sur le devenir des économies européennes, que le concours d’austérité qui s’est déclenché de Gibraltar à la Carélie et du Donegal au Dodécanèse fait de l’Union européenne un objet de risée ou d’inquiétude, ou des deux à la fois, pour les autres économies du monde, prime une fois encore le chacun pour soi, très loin de l’indispensable solidarité qui devrait prévaloir en son sein, mais très près, à l’inverse, des principes de concurrence libre et non faussée inscrits au cœur même de ses traités.
Concours d’austérité, disais-je. Hélas ! car aucun signe ne semble pouvoir soustraire le moindre pays de l’Union à cette logique mortifère appliquée aux objectifs généreux et généraux de la construction européenne.
Aujourd’hui, quel que soit le pays considéré, les recettes appliquées sont un peu trop souvent les mêmes : hausse de la fiscalité indirecte, réduction des dépenses publiques, baisse des prestations sociales, mise en cause des salaires et des éléments de rémunération des agents du service public, privatisation des entreprises publiques dans certains cas. Toute la palette des politiques d’austérité se dévoile et se déploie, sans le moindre résultat concret.
L’euro, la monnaie sur laquelle beaucoup fondaient quelques espoirs, est en difficulté, perdant des points face au dollar ou au franc suisse, devenant l’objet d’une spéculation souvent menée à partir des plateformes boursières situées sur le territoire même de l’Union, comme celles de Londres ou de Luxembourg. Il est temps de changer d’ère en Europe !
Plus que d’un budget européen, les peuples de l’Union ont désormais besoin d’un projet facilitant la pleine expression des compétences et des potentiels de chaque pays et permettant des avancées sociales, économiques et environnementales, l’harmonisation fiscale serait également la bienvenue, le Vieux continent en a besoin.
Nous ne voterons pas l’article de prélèvement européen en l’état, les attendus de la politique menée par la Commission européenne et les lobbies bruxellois ne répondant aucunement aux attentes des peuples européens. §