Souvenons-nous de l’état de l’économie britannique à l’époque où elle restait en dehors de l’Union européenne !
On ne peut résumer l’Europe à une contribution et à un « retour » budgétaire. J’ai déjà eu l’occasion de le dire à cette tribune : la politique de cohésion coûte certes cher à la France. Toutefois, m’exprimant devant une assemblée qui compte en son sein de nombreux élus locaux et qui représente les collectivités locales de notre pays, je pose la question suivante : sans cette politique, que resterait-il de la politique d’aménagement du territoire ? Et quelle serait aujourd’hui la situation de nos départements d’outre-mer ?
À cet égard, nous avons voté à l’unanimité, ce qui ne leur en a donné que plus de force, deux propositions de résolution européenne, voilà une dizaine de jours. Je crois savoir que, lors du dernier Conseil européen, des avancées se sont fait jour en la matière, ce qui est positif.
C’est pourquoi, pour ma part, contrairement à notre collègue Jean Bizet, je suis reconnaissant au Gouvernement d’avoir rééquilibré la position française en cessant de considérer la politique de cohésion comme une variable d’ajustement. C’était d’autant plus nécessaire au vu de la proposition du commissaire Johannes Hahn de créer la catégorie des « régions en transition », création que le Sénat a soutenue par le vote, là encore unanime, d’une proposition de résolution européenne. La création de cette catégorie permettrait aux régions métropolitaines les moins développées de recevoir des moyens accrus, sans que cela diminue, j’y insiste, l’enveloppe des autres régions françaises.
De même, où en serait aujourd’hui l’agriculture européenne sans la politique agricole commune ? Je n’ignore pas les injustices et les carences de cette politique commune, qui privilégie à l’excès les grandes cultures au détriment des autres productions, notamment les productions méditerranéennes – la vigne, les fruits et légumes –, et ce alors même que les cours mondiaux sont élevés, mais reconnaissons aussi ce que cette politique représente pour la sécurité alimentaire de l’Europe et l’entretien de son territoire.
Si nous avions fait confiance aux marchés internationaux pour notre approvisionnement, comme le voulaient les Britanniques, que se serait-il passé lors de la crise de 2007 ? L’Europe n’aurait pu s’approvisionner, à grands frais, qu’au détriment des pays d’Afrique et d’Asie les plus pauvres. Est-ce vraiment le rôle que nous voulons lui voir jouer ? Je pourrais continuer cet exercice d’« Europe fiction ».
À cet égard, je veux dire que j’ai beaucoup apprécié l’intervention de notre collègue Pierre Bernard-Reymond, que j’ai trouvée juste. Je ne doute pas que, un jour, ses propos se traduiront dans la réalité.
Il est de bon ton aujourd’hui de s’interroger sur la monnaie unique, mais imaginons l’Europe avec des monnaies nationales lors de la crise de 2008-2009 ! Nous aurions vu certaines d’entre elles s’effondrer tandis que d’autres se seraient trouvées complètement surévaluées ; le marché unique serait alors devenu une fiction.
Il faut donc arrêter de ramener l’Europe à une bonne – ou mauvaise – opération comptable et plutôt se demander ce que nous attendons d’elle, quelles orientations nous voulons retenir pour la construction commune et définir ensuite quels sont les moyens nécessaires pour les traduire.
Je ne surprendrai personne en disant que je soutiens les deux grandes orientations défendues par le Président de la République, « l’intégration solidaire » et le soutien à la croissance. Mais je crois – en tout cas, je l’espère – que ce n’est pas par esprit partisan, car il me semble que ces orientations doivent pouvoir recueillir une large adhésion, au-delà des clivages politique nationaux. Lorsqu’il s’agit de l’Europe, ces clivages ne sont pas l’alpha et l’oméga et nous devons être capables de les dépasser.
Nous avons besoin de plus d’intégration. Nous savons désormais que la zone euro ne pourra fonctionner dans la durée sans une coordination bien plus étroite des politiques économiques et budgétaires.
Nous savons qu’il est indispensable de réaliser l’union bancaire pour ne pas retomber dans une crise analogue à celle dont nous subissons aujourd’hui les séquelles.
Et, sans relancer les controverses idéologiques, il faudra bien tirer les conséquences institutionnelles de cette exigence d’intégration renforcée.
Je voudrais à cet égard rappeler que, pour nous, tant le Parlement européen que les parlements nationaux doivent pouvoir jouer pleinement leur fonction de contrôle, y compris par des dispositifs interparlementaires appropriés.