Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 44 du présent projet de loi de finances, évaluant le montant du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au profit du budget de l’Union européenne, est soumis aujourd’hui à notre examen.
L’analyse du prélèvement européen permet une ouverture sur les finances publiques de l’Union. Il conduit également à faire le point sur les engagements budgétaires européens et sur la contribution des différents États membres de l’Union européenne.
Cet examen a lieu dans un contexte de crise, la Commission européenne ayant en effet présenté, le 26 novembre dernier, une nouvelle proposition pour le budget 2013. Identique à 99 % au texte pourtant rejeté il y a deux semaines, ce document nous fait courir le risque de raviver les tensions qui ont conduit à l’échec des négociations lors du Conseil européen des 22 et 23 novembre dernier, au titre du projet de budget européen prévu dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020.
C’est dans cette perspective de négociation du budget et dans l’objectif d’un compromis final que le Sénat souhaite rappeler au Gouvernement les grandes priorités qui doivent être défendues à Bruxelles par les autorités françaises.
La contribution de la France au budget de l’Union européenne est évaluée, par l’article 44 du présent projet de loi de finances, à 19, 6 milliards d’euros.
Ce montant – en hausse de 2, 9 % par rapport à 2012 – comprend 4, 049 milliards d’euros de ressources TVA – dont 1, 1 milliard d’euros au titre de la correction britannique – et 15, 6 milliards d’euros de contribution « RNB ». Dans le contexte actuel de redressement des finances publiques, un tel effort est difficilement compatible avec la stratégie adoptée par la France en vue d’un retour à l’équilibre.
De nombreux pays, comme la France ou l’Allemagne, grands contributeurs au budget européen, souhaitent voir ce débit contenu dans des limites raisonnables, tout en appelant de leurs vœux une politique ambitieuse pour l’Europe.
Personne sur les travées de notre Haute Assemblée ne souhaite que l’on abandonne la politique agricole commune. Il est impératif de ne pas réduire le soutien économique aux agriculteurs européens, confrontés à une forte volatilité des prix agricoles sur les marchés internationaux.
Personne ne souhaite que les fonds structurels, qui ont déjà vu leurs montants fortement diminués, délaissent les régions de France.
Personne ne se prononcera non plus contre une politique de croissance, d’innovation et de recherche, contre une politique culturelle ambitieuse.
Il convient de donner à l’Union européenne les moyens de déployer sa stratégie Europe 2020, d’assumer ses nouvelles compétences issues du traité de Lisbonne, notamment en matière de citoyenneté, de justice et d’action extérieure, tout en relevant les défis internationaux que constituent l’aide au développement, la politique de voisinage, la lutte contre le changement climatique ou l’aide humanitaire.
La commission des affaires européennes du Sénat a présenté trois propositions de résolution européenne devenues, par la suite, résolutions du Sénat. La première a trait aux propositions de règlements relatifs à la politique européenne de cohésion 2014-2020. La deuxième porte sur le mécanisme pour l’interconnexion en Europe. La troisième a pour objet « Erasmus pour tous », qui serait le nouveau programme de l’Union européenne pour l’éducation, la formation, la jeunesse et le sport. C’est sur ce dernier point que je souhaite insister.
Concernant les investissements d’avenir, nous souhaitons que le Gouvernement affirme son soutien à l’augmentation des crédits proposée pour le nouveau programme « Erasmus pour tous », de manière à permettre à ce dispositif, qui contribue à forger la conscience européenne et à préparer l’avenir, d’atteindre sa pleine efficacité. À cet égard, nous plaidons pour que les engagements pris au titre de ce programme pour 2014-2020 se traduisent annuellement en crédits de paiement suffisants, afin que ce programme ne souffre pas à l’avenir des sous-financements que nous avons hélas ! pu déplorer en cette fin d’année 2012.
Pour mémoire, le programme Erasmus, créé en 1987, a permis à près de trois millions d’étudiants de trente-trois pays d’étudier à l’étranger tout en conservant le bénéfice des droits sociaux acquis dans leur pays d’origine. Erasmus a été mis en images avec humour par Cédric Klapisch dans L’Auberge espagnole.
Désormais, ce programme devrait s’intituler « Erasmus pour tous », et s’ouvrir à d’autres catégories : Comenius pour les écoles, Leonardo da Vinci pour l’enseignement technologique et la formation professionnelle, Gruntvig pour l’éducation des adultes. Ce dispositif regrouperait l’ensemble de ces programmes, qui s’ajouteraient au dispositif Erasmus, destiné aux études supérieures.
Ainsi, le programme « Erasmus pour tous » deviendrait plus visible et développerait la conscience européenne à tous les niveaux.
Au cours de l’année scolaire 2012-2013, 270 000 étudiants peuvent bénéficier de ce programme, grâce à un budget annuel de 450 millions d’euros. En France, l’État y a consacré 52 millions d’euros en 2012 et 31 000 étudiants de notre pays y ont participé.
Ce programme est essentiel pour l’avenir. Il assure l’équivalence des diplômes, l’émulation des universités, la mobilité et l’intégration culturelle européenne au meilleur niveau : celui de la jeunesse. C’est un instrument incontournable dans la perspective de la réalisation des objectifs « Europe 2020 », suscitant l’adhésion des citoyens autour du projet européen. Il s’agit là d’un dispositif dont on pourrait regretter qu’il soit, à l’avenir, remis en cause. À cet égard, je déplore que la France fasse partie des sept États membres qui refusent l’augmentation du budget demandée par la Commission, pour l’année 2013.
De fait, les États contributeurs refusent de fournir de nouveaux crédits pour combler le déficit des 8, 9 milliards d’euros manquant au titre du budget 2012.
Même si ce refus ne vise pas spécifiquement le programme Erasmus, il nous faut veiller à ce que l’avenir ne soit pas une fois de plus sacrifié à des considérations budgétaires, notamment dans la négociation du projet de budget pluriannuel pour la période 2014-2020.
Le groupe UMP se prononce en faveur de l’adoption de l’article 44 du projet de loi de finances pour 2013. Toutefois, cet avis favorable à l’adoption du prélèvement européen est indissociable de l’appel à une véritable réforme du système actuel de ressources propres.
À plus long terme, il faut envisager une réforme plus profonde qui mettra un terme aux contributions nationales et aux rabais qui, aujourd’hui, ne sont plus justifiés. Cette réforme instaurerait enfin des sources de financement en rapport avec les politiques de l’Union.
De fait, l’architecture financière de l’Union européenne est aujourd’hui à bout de souffle, au moment même où les dirigeants des États membres ont échoué à s’entendre sur un projet de budget pluriannuel pour la période 2014-2020, lors du Conseil européen des 22 et 23 novembre dernier. §