Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget de l’Union européenne est financé par trois types de ressources : des ressources propres, dites « traditionnelles », collectées par des États membres pour le compte de l’Union – droits de douanes et cotisations sur le sucre –, une ressource assise sur une assiette de TVA harmonisée et une ressource qui est en fonction du revenu national brut de chaque État membre.
La contribution de la France au budget européen prend la forme d’un prélèvement sur recettes, évalué en projet de loi de finances pour 2013 à un peu moins de 20 milliards d’euros, 19, 598 milliards d’euros pour être précis.
Il est prévu de soumettre au Parlement un prélèvement sur recettes en hausse de 720 millions d’euros par rapport à 2012, une augmentation qui marque l’attachement de la France à un budget européen consistant.
Cette hausse de 3, 8 % s’inscrit toutefois dans la trajectoire de redressement de nos finances publiques, puisque ce prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne, comme le prélèvement sur recettes en faveur des collectivités, fait partie du champ de la norme « zéro valeur ».
L’effort réalisé au profit du budget européen s’est donc accompagné d’un effort important de maîtrise de la dépense publique dans les autres ministères. Toute augmentation qui irait au-delà de celle qui est envisagée dans ce projet de loi de finances devra être compensée à due concurrence par une maîtrise des dépenses ou des économies dans d’autres domaines.
La contribution de la France en fait le deuxième pays contributeur, avec 17, 7 % du budget européen, derrière l’Allemagne, qui contribue à hauteur de 19, 9 %. Le solde net de la France, constitué de l’écart entre les fonds européens perçus et la contribution au budget de l’Union, est négatif et s’élève à 6, 5 milliards d’euros en 2010, ce qui place notre pays au troisième rang des contributeurs nets, derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni.
Le prélèvement sur recettes qui vous est présenté permet de financer la contribution de la France au budget 2013, mais également de prendre en compte les budgets rectificatifs au budget 2012.
Le budget 2013 de l’Union Européenne n’a pas encore été déterminé. Comme vous le savez, des négociations difficiles sont en cours, et ce budget résultera d’une procédure de « trilogue » entre la Commission, le Conseil et le Parlement, qui n’a pas encore abouti.
La Commission a présenté en avril 2012 un projet de budget pour 2013 s’élevant à 151 milliards d’euros en crédits d’engagement et 138 milliards d’euros en crédits de paiement, soit, par rapport au budget 2012, une augmentation de 2 % en crédits d’engagement et de 6, 8 % en crédits de paiement.
Le Conseil a arrêté sa position le 24 juillet. Jugeant la position de la Commission trop élevée et incompatible avec les contraintes budgétaires des États membres, il a proposé une hausse du budget ramenée à 2, 79 % pour les crédits de paiement, soit 132, 7 milliards d’euros.
Le Parlement européen a, pour sa part, adopté le 23 octobre une position qui revient sur les montants proposés par la Commission.
Pour établir le présent projet de loi de finances, le Gouvernement a retenu une progression du budget 2013 de 2, 79 %, correspondant à la position du Conseil.
Cette proposition d’un budget à 132, 7 milliards d’euros permet d’assurer les objectifs du budget européen, suivant les rubriques suivantes, que vous connaissez bien.
Les crédits regroupés au sein de la rubrique 1a « Compétitivité pour la croissance et l’emploi » s’élèvent à 11, 7 milliards d’euros. Ces crédits contribuent à la croissance et à l’emploi en Europe, cette rubrique intégrant notamment les programmes-cadres de recherche et développement technologique, le programme Erasmus d’échanges européens, ou des grands projets comme ITER ou Galileo.
À cet égard, sachez, monsieur Arthuis, que le programme ITER est aux yeux de la France un programme essentiel pour conduire des projets d’avenir structurants. Ces programmes sont intégrés dans le budget européen sous cette rubrique « Compétitivité pour la croissance et l’emploi ».
C’était un point majeur pour la France. En effet, la Commission européenne voulait, à l’inverse, les placer hors cadre, ce qui risquait à moyen terme de remettre en cause leur financement.
De la même manière, je veux rassurer M. Pozzo di Borgo : la continuité du programme Erasmus n’est pas menacée, ni pour 2013, ni au-delà, dans le prochain cadre financier.
En 2012, la Commission européenne a d’ailleurs demandé dans son budget rectificatif 90 millions d’euros pour ce programme. La France a d’ores et déjà donné son accord ; elle le rappellera lors des négociations qui s’engageront avec le Parlement européen dans les prochains jours.
Les crédits de la sous-rubrique 1b « Cohésion pour la croissance et l’emploi » s’élèvent à 47, 4 milliards d’euros. La vocation de la politique de cohésion, deuxième poste de dépense au sein du budget communautaire, est de renforcer la cohésion économique et sociale au sein de l’Union européenne, en réduisant les disparités de développement entre les régions.
Monsieur le rapporteur spécial Marc Massion, le programme européen d’aide aux plus démunis a fait l’objet d’une proposition de la part de la Commission européenne dans la rubrique 1b. Le montant envisagé était de 2, 5 milliards d’euros, somme réduite à 2, 1 milliards d’euros dans la proposition du président Van Rompuy. La France entend œuvrer avec détermination pour la reconduction de ce programme, qui est essentiel, mais, nous le savons, contesté par plusieurs de nos partenaires, dont l’Allemagne, du moins à ce stade des discussions.
Les crédits de la rubrique 2 « Conservation et gestion des ressources naturelles » sont de 57, 5 milliards d’euros. Cette rubrique regroupe les crédits de la politique agricole commune, la PAC, avec ses deux piliers, le premier étant constitué des mesures dites « de marché », ou aides directes, le second correspondant à la politique de développement rural. La France a bénéficié de 9, 9 milliards d’euros de retours au titre de la PAC, qui constitue plus de 70 % des retours français.
Monsieur le rapporteur spécial Jean Arthuis, vous avez exprimé votre attachement à l’enveloppe de la PAC. Vous le savez, la France demande, avec d’autres partenaires, que l’Union européenne conserve son indépendance alimentaire, essentielle dans un contexte de très forte volatilité, notamment du marché des matières premières alimentaires. Nous voulons aussi que s’engagent les réformes nécessaires de cette politique, par la convergence progressive des aides entre les États membres et par le « verdissement », démarche certes ancienne, mais que la France souhaite approfondir.
Les crédits de la rubrique 3 « Citoyenneté, liberté, sécurité et justice » sont de 1, 5 milliard d’euros.
La rubrique 4 « L’Union européenne en tant que partenaire mondial » regroupe les actions extérieures de l’Union. Ses crédits sont de 6, 3 milliards d’euros.
Enfin, les crédits de la rubrique 5 « Administration » s’élèvent à 8, 4 milliards d’euros. Cette rubrique assure le fonctionnement des institutions européennes. Et, on le sait, de très nombreux États souhaitent que les frais de fonctionnement soient mieux maîtrisés. D’ailleurs, il serait surprenant que la Commission, alors qu’elle demande à un certain nombre d’États membres de réaliser des économies et de veiller à ce que la progression des frais de fonctionnement ne soit pas déraisonnable, ne donne pas elle-même l’exemple en prouvant par son action qu’elle est également capable de maîtriser ses dépenses, au sein de ses propres services.
Après avoir évoqué le budget pour 2013, je dois aborder les budgets rectificatifs pour 2012.
La Commission a présenté deux budgets rectificatifs au mois d’octobre. Le budget rectificatif n° 5, d’un montant de 670 millions d’euros, prévoit un renforcement du fonds de soutien de l’Union européenne au profit de l’Italie au titre du tremblement de terre intervenu en Émilie-Romagne. Le budget rectificatif n° 6, d’un montant de près de 9 milliards d’euros, couvrira les besoins de crédits de paiement de fin d’année, principalement sur les fonds structurels.
Le budget rectificatif n° 5 ne posait pas de difficulté et a été adopté. En revanche, il n’en va pas de même du budget rectificatif n° 6. Son importance le rend inacceptable à plus d’un titre. D’une part, il a été annoncé extrêmement tardivement, alors que ses effets en paiement seraient massifs : plus de 1 milliard d’euros pour la France. D’autre part, son adoption placerait le budget 2012 au-delà de la proposition initiale de la Commission, donnant le fort sentiment d’un non-respect en exécution des arbitrages rendus sur le budget 2012.
La conciliation n’a pas permis d’aboutir à un compromis sur ce budget rectificatif, qui reste, à ce stade, sur la table des négociations. La France travaille à la recherche d’un compromis compatible avec les efforts budgétaires auxquels s’astreignent l’ensemble des États membres.
Voyons maintenant quelles sont les perspectives financières 2014-2020. Au-delà de la question du prélèvement sur recettes 2013, celle de la négociation en cours sur le cadre financier pluriannuel pour 2014-2020 doit aussi être évoquée.
Le Conseil européen des 22 et 23 novembre a été un Conseil européen « d’étape ». C’est ainsi que préfère le qualifier le Gouvernement, marquant ainsi son espérance de voir déboucher les discussions, qui, à ce stade, n’ont pas encore pu être conclusives.
Comme en 1998 et en 2005, il s’est révélé nécessaire d’avoir une première discussion au niveau des chefs d’État et de gouvernement, en vue d’un accord au début de l’année 2013.
Ce Conseil européen a été utile, à supposer que certains aient pu en douter. Il a permis de faire des progrès et de mieux comprendre les priorités de chacun. Un accord nous semble désormais possible, et nous sommes prêts à y contribuer.
La France a réaffirmé à l’occasion de ce sommet trois priorités.
Premièrement, nous avons exprimé le souhait d’un budget européen qui soit consistant et qui donne la possibilité de financer les politiques européennes. La proposition de M. Van Rompuy se situe au bon niveau de dépense globale, soit 1 % du RNB.
Deuxièmement, la répartition des dépenses doit être revue. Le niveau des crédits de la PAC doit permettre d’assurer à la fois la compétitivité de l’agriculture et, en même temps, le développement rural indispensable.