… auxquels nous devons faire face avec détermination.
Si nous avons le devoir de mener un combat résolu contre ce fléau, nous ne devons pas pour autant agir sans prendre certaines précautions, conformément à la tradition constante du pays des droits de l’homme et de la femme que la France entend être.
Je souhaite réaffirmer aujourd’hui, comme l’a fait mon collègue écologiste Paul Molac à l’Assemblée nationale, qu’il est surtout urgent de s’attaquer aux causes profondes de l’émergence d’un terrorisme désormais endogène.
À ce titre, il est indispensable de se donner les moyens d’inventer des solutions pratiques – et non de pur principe – à l’école, en prison, dans la vie de tous les jours, pour que la laïcité ouverte qui nous rassemble retrouve tout son sens.
Il convient de développer à nouveau, dans les zones sensibles, une police de proximité, auxiliaire indispensable pour cerner à temps les problèmes et pour prévenir le basculement de certains de la délinquance dans une forme de radicalité religieuse pouvant mener au terrorisme.
Monsieur le ministre, il est tout aussi impératif de remédier aux effets du grippage de notre ascenseur social et à l’abandon de nos quartiers populaires. Si aucune action concertée, énergique et efficace n’est rapidement engagée, ces territoires risquent, à la longue, de se transformer en réservoirs de terroristes.
J’ai la certitude que, sans une prise de conscience de ces problèmes, notre combat contre le terrorisme pourrait être perdu d’avance, quel que soit le nombre de projets ou de propositions de loi dont nous serons conduits à débattre.
Considérant que la rédaction initiale du présent texte n’était pas satisfaisante au regard de la protection des libertés individuelles, le groupe écologiste s’était abstenu lors de la première lecture ; nous constatons à regret que celle du texte de la commission mixte paritaire ne l’est pas davantage.
L’article 3 a trait aux droits des étrangers et tend à modifier l’article L. 522-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA, en assouplissant la procédure devant la commission d’expulsion via l’ajout d’un alinéa. Si cette commission n’a pas émis son avis sur l’expulsion dans un délai d’un mois, celui-ci est réputé rendu. Cette mesure est loin d’être anodine puisque, en cas de carence de la commission, laquelle statue en général dans des délais bien supérieurs à un mois, l’administration sera libre de décider.
Peut-être pour rester dans l’esprit d’une loi relative à la lutte contre le terrorisme, le Sénat – je le rappelle – avait restreint le champ de cette disposition aux seuls cas d’activités terroristes. Le texte de la CMP revient hélas sur cette restriction. Tous les étrangers seront concernés par cette modification du CESEDA et pourront donc faire l’objet d’une mesure d’expulsion sans avoir pu s’exprimer et se défendre devant la commission.
Les lois antiterroristes sont nécessaires, monsieur le ministre, mais elles ne doivent pas avoir d’autres objectifs que la lutte contre le terrorisme ni pouvoir être instrumentalisées à d’autres fins.
Que penser, à cet égard, d’une loi antiterroriste qui modifie la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ?
L’article 2 ter du texte de la CMP prévoit en effet la possibilité de placer en détention provisoire les personnes mises en examen pour apologie des actes de terrorisme ou provocation à commettre de tels actes. Cette disposition vient déroger au principe selon lequel la détention provisoire n’est pas possible en matière de délits de presse.
C’est la liberté d’expression qui est ici en jeu, monsieur le ministre, ainsi que la liberté de la presse, deux des libertés les plus précieuses et les plus nécessaires à notre démocratie ; des libertés dont la protection est aussi un rempart contre toutes les formes d’intégrisme et d’extrémisme.
Si la loi de 1881 a sans doute besoin d’être réformée, particulièrement son régime procédural, cela mérite certainement réflexion et concertation, et cela justifie surtout que l’on prenne les plus grandes précautions.
Les dispositions que je viens d’évoquer, ainsi que d’autres de ce texte, ont toutes des conséquences sur les garanties offertes aux individus pour la protection de leurs libertés et droits fondamentaux.
Je dois le dire : je ne suis pas convaincue que le texte qui est soumis à notre vote aujourd’hui permettra de nous protéger contre les Mohamed Merah de demain.
En l’état, les écologistes considèrent que la rédaction retenue par la CMP ne garantit pas un juste équilibre entre les exceptions au droit commun qu’elle prévoit et la protection des libertés fondamentales. Notre groupe s’abstiendra donc sur ce texte.