Madame la présidente, madame le ministre, mes chers collègues, revenons un peu au fond des choses, c’est-à-dire au cadre macroéconomique dans lequel se situe cette loi de finances pour 2013.
Lorsque nous avons débattu en première lecture, beaucoup d’entre nous se sont posé des questions sur l’hypothèse de croissance, que je considérais comme très optimiste, irréaliste. Aujourd’hui, à un mois de distance, compte tenu des nouveaux éléments d’information et de prévision dont nous disposons, cet irréalisme me semble encore plus avéré, au point qu’il entache, à mon sens, la loi de finances d’insincérité.
Rappelons que cette hypothèse de croissance est de 0, 8 % pour 2013 et que, lors du dépôt du projet de loi de finances, le consensus des conjoncturistes se situait à 0, 3 %.
Certes, le Gouvernement était volontariste, optimiste, mais, hélas ! pas plus que ce n’est habituellement le cas. On peut le regretter, mais les gouvernements, de diverses tendances, se sont en général facilité la tâche, ont évité de trop arbitrer dans les dépenses au moment d’élaborer un budget en se fondant sur une hypothèse de croissance optimiste, en moyenne supérieure de 0, 3 point à la prévision du consensus.
Aujourd’hui, nous sommes bien au-delà de ce décalage, car, selon les dernières parutions des instituts de prévision et de conjoncture, le consensus est de l’ordre de 0, 1 %. Vingt-deux organismes de prévision sont observés et les chiffres qui sont donnés, si l’on en exclut deux manifestement hors des ordres de grandeur de tous les autres, sont compris entre - 0, 5 % et + 0, 4 %.
Naturellement, personne d’entre nous n’a de boule de cristal. Cependant, les exigences de l’arithmétique existent et le taux de croissance de l’année n+1 résulte pour une bonne part, vous le savez, madame le ministre, de données déjà connues. En d’autres termes, si l’on s’appuie sur les estimations actuelles de l’INSEE pour les trois premiers trimestres de 2012 et si l’on suppose que la croissance sera nulle au quatrième trimestre, pour avoir une croissance de 0, 8 % l’année prochaine en moyenne annuelle, ce que prévoit toujours le Gouvernement, il faudrait une croissance de 0, 3 % de trimestre à trimestre tout au long de l’année 2013, ce qui équivaut à 1, 2 % en rythme annualisé, proche de la croissance potentielle qui est aujourd’hui estimée à environ 1, 6 %.
Je vous pose la question, madame le ministre : est-ce concevable, alors que le Gouvernement, d’ailleurs à juste titre, prévoit de réduire dans ce budget le déficit structurel de deux points, ce qui, selon les raisonnements habituellement suivis, devrait réduire la croissance d’environ un point ? Je crois qu’il faut parfois écouter, malgré nos différences tout à fait considérables, ce qui est dit à l’extrême gauche. Il est bien vrai que l’effort de convergence vers un déficit de 3 % implique un effort véritablement rigoureux pesant sur le peu de croissance que l’on peut encore prévoir.
Donc, au total, madame le ministre, le cadre dans lequel s’inscrit le projet de loi de finances pour 2013 paraît vraiment très loin de la réalité plausible.
À cela s’ajoute un second élément. Nous le savons tous, mes chers collègues, l’instauration du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi achève de vider de son sens aussi bien le projet de loi de finances pour 2013 que, par ailleurs, la loi de programmation des finances publiques pour la période 2012-2017. La loi de programmation n’intègre en rien le crédit d’impôt et son financement, car accepter, même à terme, une charge publique nouvelle de 20 milliards d’euros suppose que l’on établisse son financement de manière crédible.