Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entrons dans la phase de traduction législative des doléances et des propositions formulées par les élus lors des états généraux de la démocratie territoriale.
En effet, après les deux textes que nous examinons aujourd’hui viendront les propositions de loi relatives à la diminution des normes applicables aux collectivités territoriales et au statut de l’élu, déposées par nos collègues Gourault et Sueur, le projet de loi sur la décentralisation annoncé par Mme Lebranchu constituant le point d’orgue de cette phase.
Tous ces textes, et particulièrement les deux que nous examinons ce soir, ont pour objet la modernisation de la démocratie locale. Monsieur le rapporteur, vous avez eu raison de souligner que celle-ci est à l’aube d’une nouvelle évolution. Pour les départements, ce sera même une révolution.
La féminisation accrue des conseils généraux que nous appelons de nos vœux n’est pas, comme vous l’avez indiqué, un simple ajustement, un « adjuvant cosmétique » : elle permettra un véritable enrichissement des politiques publiques. L’élection de binômes paritaires au conseil départemental sera une authentique innovation. C’est, à ma connaissance, la seule solution qui permette de garantir à la fois la parité et la proximité, c’est-à-dire le lien entre l’élu et le territoire qu’il représente.
S’agissant des élections municipales, je me réjouis que le projet de loi et le projet de loi organique prévoient l’abaissement du seuil démographique pour l’application du scrutin proportionnel de liste. Le renforcement de la parité au sein des conseils municipaux sera ainsi assuré, ce dont on ne peut que se féliciter.
En effet, c’est grâce à l’application du scrutin de liste, assorti de contraintes plus strictes que le scrutin uninominal, que la parité a pu devenir une réalité effective dans les conseils municipaux des villes de plus de 3 500 habitants. La loi du 6 juin 2000 a ouvert la voie à une modification profonde de la composition des conseils municipaux de ces communes à l’issue des élections de 2001 et de 2008 : la proportion de femmes, qui était seulement de 26 % en 1995, est passée à plus de 47 % en 2001 et à 48, 5 % en 2008, tandis que les progrès vers la parité sont restés très limités dans les conseils municipaux des communes de moins de 3 500 habitants.
Il fallait donc poursuivre l’effort en élargissant le champ d’application du scrutin proportionnel de liste. Dans cette perspective, quel seuil de population faut-il adopter ? Le Gouvernement et la commission des lois du Sénat ont retenu le seuil de 1 000 habitants. Il me semble qu’il s’agit d’une proposition de consensus et d’équilibre. Environ 6 550 communes seraient concernées par le passage au scrutin proportionnel de liste, ce qui entraînerait l’élection de près de 16 000 conseillères municipales supplémentaires. Par comparaison, si le seuil était fixé à 1 500 habitants, 3 730 communes seulement seraient concernées et l’on compterait à peine 9 500 femmes élues de plus.
En maintenant l’application du scrutin majoritaire en dessous de 1 000 habitants, on a voulu protéger les petites communes, où la constitution de listes complètes et paritaires présente de trop grandes difficultés.
À titre personnel, je fais confiance aux administrés : compte tenu de l’intérêt qu’ils portent à la vie de leur commune, aussi petite soit-elle, ils sauront franchir le pas de la candidature, d’autant que l’adoption, par la commission, du principe de la réduction de deux unités de l’effectif des conseils municipaux des communes de moins de 500 habitants facilitera la constitution de listes complètes.
En outre, je pense qu’il faut, autant que possible, tendre vers la suppression à la fois du panachage, qui s’apparente à un « tir au pigeon » souvent cruel et débouche sur un véritable défouloir dans l’isoloir, et de l’absence de déclaration, qui peut rendre l’élection pittoresque, certes, mais surtout très peu responsabilisante !
Enfin, dans le même esprit, je me réjouis de l’introduction concomitante de l’abaissement du seuil de population pour l’application du scrutin proportionnel de liste et de l’élection au suffrage universel des délégués communautaires par fléchage. Ce système, d’une part, ne brise pas le lien entre commune et intercommunalité, et, d’autre part, il respecte l’identité des communes. Il y a donc, d’un côté, une légitimité démocratique conférée aux EPCI à fiscalité propre par l’élection au suffrage direct – enfin ! –, et, de l’autre, une réelle bonification du scrutin municipal.
En conclusion, l’ancrage des EPCI dans la démocratie locale me semble assuré, tandis que l’objectif constitutionnel d’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives sera significativement mieux respecté. C’est là du très bon travail ! §