Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis un an, notre hémicycle attendait la grande loi sur la décentralisation, avec l’espoir d'une réorganisation territoriale de la France qui soit à la hauteur des enjeux sociétaux et économiques.
Comment, face à la mondialisation, à la prégnance de plus en plus grande de l'Europe, faire en sorte que la France soit encore et toujours un modèle d'organisation démocratique ?
Comment, face au désenchantement de nos concitoyens et de nos concitoyennes lors des élections, qui sont au cœur même de la démocratie, qui sont ontologiquement la démocratie, leur redonner l'envie d'aller voter et, surtout, d’être eux-mêmes acteurs de la vie sociale ?
Voter, ce n'est pas se soumettre, c'est prendre part, c'est croire encore et toujours qu'un autre monde est possible, parce que chaque voix, chaque bulletin compte, parce qu'il n'y a pas de bulletins de riches et de bulletins de pauvres, de bulletins de chômeurs et de bulletins d'exilés fiscaux… Voter, c'est croire que, dans l'alchimie de l'urne, la volonté du peuple se fait entendre et c'est savoir qu'elle sera entendue.
Ainsi, nous abordons enfin la réforme promise par l'élection de François Hollande avec l'appui des écologistes.
Nous commençons par le mode d'élection : ce choix peut se discuter. Gageons que le texte était peut-être plus simple à rédiger, même si le sujet des modes de scrutin est toujours particulièrement sensible, car tous les partis ont bien entendu l'espoir de voir augmenter le nombre de leurs élus.
Nos concitoyens le savent et nous soupçonnent souvent de « magouiller », de « trafiquer » : lorsque nous votons les lois électorales, ne sommes-nous pas, en effet, à la fois juges et parties ?
Il faut compter, en outre, avec la démagogie ambiante et sa ritournelle lassante : les élus sont « coupés de la réalité », ils sont « tous pourris », ils « s'en mettent pleins les poches », ils coûtent cher, ils s'accrochent à leurs privilèges… Cette fascisation rampante des esprits rend difficile l'explication et la justification de l'exercice.
Il faut faire œuvre de pédagogie, et non de démagogie, en montrant la nécessité d'adapter les modes de scrutin à l'évolution de la démographie française. Mais il faut aussi permettre à de nouveaux citoyens, et surtout à de nouvelles citoyennes, d'être élus, afin que la démocratie ne soit pas le monopole de certains.
Mais comment être pédagogique quand on multiplie les modes de scrutin ? Alors qu’ils sont déjà au nombre de six, on veut en créer un septième, avec le binominal. Comment être pédagogique quand à chaque échelon de la démocratie correspond un mode de scrutin différent ?
Il nous faut donc faire preuve de pragmatisme et d’honnêteté.
Le pragmatisme consiste à regarder attentivement les différents échelons de nos structures politiques et à observer où et pourquoi cela fonctionne bien ou mal.
L’honnêteté, nous devons d’abord l’exiger de nous-mêmes, en ne cédant pas à la tentation de favoriser notre camp. Mais nous la devons aussi à l’ensemble de nos concitoyens et concitoyennes, en leur donnant une représentation politique qui soit à leur image.
Au fond, ce projet est taillé au cordeau afin de permettre la parité, et seulement la parité. Or, si la parité est un des moyens d'assurer la représentation de la société, elle n’en est pas un but.
Ce projet préserve donc le scrutin catholique, dans notre État laïc, qu'est le scrutin majoritaire à deux tours, écrasant les voix minoritaires…