Je remercie madame la ministre d'avoir répondu à notre invitation à évoquer sans tabou ce problème de santé publique et d'égalité entre nos concitoyens - car comment appeler autrement la situation actuelle, quand certains Français attendent un rendez-vous médical 18 jours et d'autres 18 mois ?
Je suis d'accord sur le fait qu'il n'existe pas de solution miracle. L'objectif de réduire à 30 minutes maximum le temps d'accès à des soins d'urgence est louable, mais pourquoi ne pas l'étendre à tous les types de soins ? Le problème est moins celui de la distance kilométrique ou du temps de trajet que celui du temps d'attente pour un rendez-vous.
Je vous suis sur le travail d'équipe et la réflexion que vous menez sur les rémunérations, comme sur d'autres questions, dont le champ d'application est hélas plus restreint : la télémédecine ne concerne que la dermatologie, le transfert de compétences l'ophtalmologie, le rapprochement entre maisons de santé et université se contente de recenser les meilleures pratiques...
Certaines solutions que vous évoquez existent déjà : l'obligation pour les étudiants d'effectuer un stage dans un cabinet de médecine de ville figure dans le droit positif. Comment comptez-vous la rendre effective ? Vous augmentez le nombre des bourses de service public : mais à quoi cela servira-t-il ? Les étudiants n'en veulent pas ! En rajouter n'y changera rien. Rapprocher l'hôpital de la médecine ambulatoire était déjà un objectif de la loi Bachelot, mais on ne parvient pas à l'atteindre car on manque de médecins dans les hôpitaux...
Je suis en désaccord sur votre projet de revenu garanti pour les médecins territoriaux. En zone isolée, ceux-ci sont débordés de travail et leurs revenus y sont donc corrects.
Vous n'avez pas évoqué la formation des futurs médecins. Nous sortons d'une audition dans laquelle on nous a dit explicitement qu'en France on ne formait pas des médecins, mais des médecins hospitaliers ! La gestion, la psychologie, l'économie de la santé sont absentes de l'enseignement.
La question de la coercition est taboue en France. A droite comme à gauche, le lobby médical empêche de prononcer le mot. J'ignore si coercition et régulation sont synonymes pour vous. Vous dites en tout cas que la coercition est injuste. Soit. Mais les inégalités dont souffrent les Français, sont-elles justes ? La coercition priverait les médecins de leur liberté d'installation. Soit. Mais dans ce cas, rendons la même liberté aux pharmaciens, aux kinésithérapeutes, aux infirmières ! Pardonnez-moi de m'emporter ainsi, c'est que j'ai à coeur de privilégier l'intérêt général sur celui des médecins, pour mettre un terme à la terrible situation que nous vivons, dans certains territoires, en matière d'accès aux soins.