Intervention de Josette Durrieu

Réunion du 17 janvier 2013 à 9h30
Élection des conseillers départementaux des conseillers municipaux et des délégués communautaires et modification du calendrier électoral — Article 2

Photo de Josette DurrieuJosette Durrieu :

Toutefois, il faut reconnaître que l’on a du mal à faire évoluer les choses, et je n’aime vraiment pas entendre des mots comme « gadgets » ou « potiches » – car j’ai bien entendu ces termes à propos des femmes qui pourraient être élues… Je regrette ces propos. Gardons-nous de toute agressivité !

Il me semble pour ma part que j’ai un certain recul pour apprécier la situation. J’ai en effet été, en 1985, l’une des premières femmes élues dans un conseil général d’un canton rural. Nous n’étions pas nombreuses en France et, dans mon département, je suis restée seule pendant plus de dix ans. Par ailleurs, je suis élue au Sénat depuis 1992.

Ce recul me donne la possibilité d’effectuer un bilan et de formuler un certain nombre d’observations. Rassurez-vous, mes chers collègues, je vous ferai grâce de la plupart d’entre elles.

Je soulignerai simplement que le mot « objectif » n’a guère de sens. Un peu comme dans les westerns, la frontière n’en finit pas de reculer. Voilà trente ans que j’attends qu’un rééquilibrage s’opère. Et il ne vient pas !

C’est le problème de la dualité entre les mœurs, qui évoluent ou n’évoluent pas, et la loi, qui passe ou ne passe pas.

Les mœurs n’évoluent pas dans notre pays, ou, en tout cas, elles le font bien moins vite que dans certains autres. Et, s’il en est ainsi, c’est tout simplement parce que les femmes sont absentes de l’espace politique, celui dans lequel on fait changer les choses. Le problème se pose en ces termes. C’est pour cela qu’il fallait accepter le principe du quota.

Malgré tout, on préfère payer des pénalités. Quelque part, nous sommes tous coupables, et je le regrette profondément. Mais voilà, la loi ne peut pas attendre l’évolution des mœurs ! C’est elle qui va les faire changer.

Oui, je pense que la réforme que nous vous proposons, au travers de cette formule effectivement assez inédite du binôme – félicitations à celles et ceux qui l’ont imaginée ! – a quelque chose de surprenant. Comme tout ce qui est très innovant, cette réforme peut faire peur.

Mes chers collègues, sachez que je respecte ces craintes. Je connais trop les sociétés masculines, voire exclusivement masculines, pour ne pas comprendre ce que les hommes peuvent ressentir et vivre. Cette parité sera nécessairement traumatisante et, à un moment donné, elle changera profondément la nature des choses.

J’ai envie de vous dire : faisons confiance aux femmes ! Et j’ai envie de dire à celles qui seront élues dans des conseils départementaux : ne vous laissez pas enfermer seulement dans la défense de la cause sociale et dans les politiques sociales. Il y a tellement de choses à accomplir dans les domaines économique et industriel, qui sont essentiels !

Il se trouve que j’ai aussi présidé un conseil général. Nous n’étions pas nombreuses à l’époque, et nous ne le sommes guère plus aujourd’hui. Croyez-moi, il y a beaucoup de choses à faire, dans tous les domaines !

Un mot enfin sur la réforme, notamment sur ses objectifs de redécoupage, de proximité et de parité.

Le problème de la parité sera réglé, et c’est heureux.

En ce qui concerne la proximité, je me permettrai tout de même de faire quelques observations. Élue de l’espace rural, je rejoins tous ceux qui pensent que, effectivement, on va s’éloigner des électeurs dès lors que l’on agrandit les cantons. La proximité sera traduite par le scrutin, dont nous avons souhaité qu’il reste uninominal. Le scrutin uninominal est en effet celui de la proximité, de la personnalisation, de la gestion d’un espace.

Toutefois, l’élu, incontestablement, va s’éloigner de son concitoyen dans l’espace rural. Soyons attentifs à cette difficulté, monsieur le ministre ! Vous devrez ainsi être sensible aux exceptions que certains feront valoir, notamment en termes démographiques ou géographiques.

Puisque je ne reprendrai pas la parole, je souhaite aborder en conclusion le problème des petites communes et des seuils : 3 500 habitants, 2 000, 1 500, 1 000, 500, zéro : où est le juste seuil ?

Il me semble que la justice consisterait à supprimer ce seuil, simplement parce que les communes sont, par principe, égales, et que c’est une forme d’inégalité que l’on pérennise. Cette réforme, si elle n’est pas menée jusqu’à son terme, aura un goût d’inachevé.

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