Intervention de Bruno Retailleau

Réunion du 17 janvier 2013 à 9h30
Élection des conseillers départementaux des conseillers municipaux et des délégués communautaires et modification du calendrier électoral — Article 2

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

Monsieur le ministre, trois questions se posent.

Tout d'abord, on l’a dit, on l’a répété, c’est la survie même des départements qui se joue aujourd'hui. Vous êtes le ministre des collectivités : pouvez-vous nous donner une perspective, y compris financière, sur l’avenir des départements ?

Je n’avais pas voté la réforme territoriale ; je parle donc en toute liberté. Les débats du mois de décembre nous ont énormément inquiétés. Ils ont aussi inquiété le président de l’ADF, je vous l’ai dit hier. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner des indications sur cette question de la survie des départements ? C’est en effet l’enjeu le plus important.

La deuxième question concerne le mode de scrutin. Celui que vous proposez nous paraît bancal. Si votre système est mis en œuvre, des problèmes très concrets, des problèmes territoriaux, se poseront. Je pense, par exemple, aux spécificités des territoires insulaires. La Bretagne, la Vendée ou encore la Charente-Maritime sont concernées. Certaines îles vont-elles constituer à elles seules une circonscription territoriale ? Y aura-t-il deux conseillers départementaux pour représenter une même île ? Nous aimerions vous entendre sur cette question.

Par ailleurs, un bon mode de scrutin doit concilier un certain nombre d’objectifs : la parité en est un ; c’est même un objectif à valeur constitutionnelle. La représentation des territoires est un autre objectif puisque, je le rappelle, il s’agit d’élire des assemblées territoriales. On ne peut pas comparer les scrutins nationaux et les scrutins territoriaux. Outre ces deux objectifs de parité et de représentation territoriale – et notamment de prise en compte de la ruralité –, il y a l’objectif de pluralité. Or la pluralité sera moindre si votre système est retenu : alors que deux cantons peuvent avoir, l’un, un conseiller général de droite, l’autre, un conseiller général de gauche, deux conseillers ayant la même étiquette seront élus dans la circonscription qui réunira ces deux cantons.

Vous voyez bien qu’avec ce mode de scrutin on ne parvient pas à concilier ces trois objectifs que sont la parité, la territorialité et la pluralité.

S’agissant de la parité, je dirai que nous sommes tous d’accord sur le constat : 13, 5 % de femmes dans les assemblées départementales, c’est notoirement insuffisant. Simplement, je tiens à préciser que notre modèle républicain – j’y suis attaché, même si certains, hier soir, me contestaient la possibilité de parler de la République ! –, ne reconnaît que des citoyens.

Par ses décisions de 1982 et de 1999, le Conseil constitutionnel nous a dit que notre République s’opposait à la catégorisation des individus, électeurs comme éligibles. Or ce que vous nous proposez ressemble terriblement à une mesure de discrimination positive, car vous introduisez une obligation de résultat extrêmement contraignante, alors que d’autres modes de scrutin auraient plus facilement permis d’atteindre l’objectif.

Pour ma part, j’étais favorable à un scrutin mixte, proportionnel en milieu urbain et majoritaire uninominal en zone rurale. À mes yeux, il est possible, sans condamner tel ou tel sexe, de dire que la discrimination positive – curieux oxymore, d’ailleurs, révélateur d’ambiguïtés – ne convient pas à notre modèle républicain, lequel reconnaît non pas des citoyennes et des citoyens, mais seulement des citoyens, au-delà de toute considération de sexe, de religion, etc. Je pense qu’il est nécessaire de le réaffirmer.

Enfin, l’argument, entendu ici ou là, consistant à dire qu’il ne faut surtout pas laisser l’Assemblée nationale décider à notre place ne tient pas puisque ce texte n’est pas présenté en procédure accélérée et qu’il reviendra donc devant notre assemblée. Mes chers collègues, saisissons-nous de nos pleins pouvoirs et exerçons-les en pleine liberté ! §

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