Intervention de Stéphane Mazars

Commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire — Réunion du 23 janvier 2013 : 2ème réunion
Zones d'exclusion pour les loups — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Stéphane MazarsStéphane Mazars, rapporteur :

Mais l'aggravation rapide de la situation démontre que ces règles ne suffisent pas. En 2011, on a enregistré 1 415 attaques, faisant 4 920 victimes : c'est très conséquent pour les territoires concernés, et dans une région comme Provence Alpes Côte d'Azur, le nombre d'attaques a bondi de 30 % en un an. Or, pour 2012, le ministère n'a autorisé que 11 prélèvements, et seulement 5 loups ont été effectivement tués ; encore, les prélèvements organisés n'ont-ils tué que deux loups, avec lesquels on a comptabilisé deux carcasses trouvées et un loup abattu par un berger en légitime défense.

Autres signes d'aggravation : en 2011, l'État a dépensé 1,6 million d'euros pour indemniser les éleveurs, c'est plus du triple qu'en 2004, et près de 8 millions ont été consacrés à la prévention, pris en charge pour moitié par l'Union européenne.

Face à cette situation, ce texte vise à créer des zones d'exclusion pour les loups, dans les territoires où les attaques, par leur nombre, menacent les activités agropastorales. En zones de montagne, ces activités sont importantes pour l'emploi des hommes et l'entretien des paysages, mais elles sont fragiles et les troupeaux sont une proie facile, surtout lorsqu'en moyenne montagne, leur dispersion les rend difficiles à protéger contre les loups. Les autorités publiques reconnaissent elles-mêmes la faible efficacité de la protection dans ces zones de moyenne montagne, ce qui n'est pas vrai pour la haute montagne où les estives sont plus courtes et les troupeaux plus importants. Un arrêt du Conseil d'État, en 2008, a constaté l'insuffisance des moyens de prévention, argument qui a compté dans l'indemnisation des éleveurs.

Pour être en conformité avec la convention de Berne et la directive « Habitats », ce texte soumet la création de ces zones d'exclusion à trois conditions : il faut que le risque soit établi, à partir des attaques constatées et qu'il menace l'activité pastorale ; les mesures de protection doivent avoir démontré leur insuffisance ; enfin, la mesure prescrite respecte l'équilibre entre l'activité pastorale et la protection des loups, puisqu'elle autorise, non pas bien sûr à éradiquer l'espèce dans les zones concernées, mais à en abattre un quota, pour endiguer les destructions.

Je vous proposerai deux amendements.

Le premier pour changer l'intitulé du texte : je vous suggèrerai de créer des « zones de protection renforcée » contre les loups, plutôt que des « zones d'exclusion » du loup, c'est plus conforme non seulement au droit international et communautaire, mais à l'objet du texte lui-même.

Ensuite, je vous proposerai que ces zones de protection renforcée soient définies chaque année par arrêté préfectoral. Je crois que l'inefficacité actuelle tient pour beaucoup au fait que les prélèvements sont décidés à l'échelon national, loin du terrain. Nous avons besoin de réponses locales, qui soient précisément fonction des sinistres constatés et du nombre de loups, département par département, zone par zone. La rédaction que je vous propose respecte pleinement les critères internationaux et européens de préservation de l'espèce, en précisant que « les zones de protection renforcée contre le loup ne peuvent nuire au maintien, dans un état de conservation favorable, de cette espèce sur le territoire national. »

Avec ce texte ainsi modifié, nous rétablirons l'équilibre entre les activités pastorales et la préservation des loups, car c'est bien cet équilibre qui a été rompu ces dernières années, du fait des prédateurs.

Je crois que nous faisons ici oeuvre utile. Mon premier juge, du reste, sera ma petite fille, qui, lorsqu'elle a appris que je vous présenterai cette proposition de loi sur les loups, m'a tout de suite demandé une explication de texte : c'est dire que je suis surveillé ! (Sourires)

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