Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ces dernières années, le nombre de policiers municipaux a connu une nette augmentation. On compte aujourd’hui quelque 18 000 agents, dont 715 dans les départements d’outre-mer, soit environ trois fois plus qu’il y a vingt-cinq ans.
Alors que, à l’origine, la police municipale avait une dimension essentiellement préventive et intervenait surtout en complément de la police nationale, ses missions se sont développées au point de l’ériger parfois en « police nationale bis ». Ce phénomène s’explique en grande partie par la réduction des effectifs des forces de sécurité de l’État – police et gendarmerie nationales – dans le cadre de la révision générale des politiques publiques et du fait de l’application de textes comme la LOPPSI.
Le reflux des forces nationales, combiné au développement et à l’intensification des phénomènes de délinquance, a contraint de nombreux maires à pallier, quand ils le pouvaient, les carences de l’État. On observe ainsi une grande diversité de pratiques sur le terrain, selon que les communes ont eu ou non les moyens de créer une police municipale et de l’équiper convenablement. Cette situation aboutit à un traitement différencié des administrés, à une police municipale à géométrie variable.
Je pense pouvoir affirmer que, au sein de cette assemblée, nous rejetons tous une telle dérive. Aucun recul des missions régaliennes exercées par l’État ni aucun système inégalitaire ne sauraient être tolérés.
Comment améliorer la situation ? Sur la base du rapport de nos collègues, qui établit un état des lieux et propose des pistes pour éclaircir les enjeux de la répartition des attributions et des moyens, la commission des lois a décidé d’engager un débat sur la police municipale, même s’il eût été plus approprié de parler de débat sur « les » polices municipales, comme cela a dit tout à l'heure.
Je tiens tout d’abord à féliciter nos collègues pour la qualité de leur rapport. Je n’ai qu’un seul regret à formuler : les territoires ultramarins semblent avoir été encore une fois oubliés…
À mon sens, les différences d’opinion entre nous se rapportent moins aux clivages politiques qu’aux réalités locales. Comment prendre en compte les inégalités locales ? Le rapport préconise d’encourager la mutualisation intercommunale. C’est une excellente idée, même si je m’interroge sur la possibilité de sa mise en œuvre dans les départements caractérisés par une grande fragilité budgétaire.
L’amélioration du dispositif de formation va également dans le bon sens. Cependant, le financement de la formation initiale peut être un frein et s’avérer discriminant. La situation financière d’une grande partie des communes ne leur permet pas d’assurer une formation correcte, ni même de doter leurs policiers d’un équipement plus approprié. Dans mon département, où 11 communes sur 17 sont aujourd’hui sous le contrôle de la chambre régionale des comptes, l’instauration d’un mécanisme de péréquation n’y changera rien.
À Mayotte, 140 policiers municipaux sont en exercice. D’après le dernier recensement, l’île compte 212 600 habitants, auxquels il faut ajouter les personnes en situation irrégulière, qui sont, vous le savez, très nombreuses sur ce territoire. Les effectifs sont donc loin de répondre aux besoins de cette île frappée par une forte délinquance et qui souffre de l’absence de structures d’accueil et d’encadrement d’une jeunesse parfois à la dérive. Par ailleurs, une partie de l’activité des policiers municipaux consiste à prêter main-forte aux forces de police et de gendarmerie – qui sont, faut-il le rappeler, en situation de sous-effectif – pour les reconduites à la frontière.
Quant à la formation des policiers municipaux mahorais, elle est très récente puisqu’il a fallu attendre la création de la délégation régionale du CNFPT, à Mayotte, en 2005, pour légaliser une activité qui existait depuis 1977.
Il paraît également indispensable de recentrer les polices municipales sur ce qui fait leur véritable singularité, à savoir leur connaissance du terrain, et de développer leur savoir-faire en matière d’îlotage, de prévention et de médiation. Les propositions formulées par les rapporteurs qui visent à améliorer les nouvelles conventions de coordination devraient permettre de clarifier le rôle de chacun et de rappeler la spécificité des différentes missions.
Monsieur le ministre, vous avez récemment confié à Jean-Louis Blanchou, préfet délégué à la sécurité privée, le pilotage d’un groupe de travail sur les polices municipales. Je souhaiterais que ce groupe de travail puisse tenir compte des situations spécifiques des territoires ultramarins. §