Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la réforme de la taxe professionnelle n’est pas plus un épiphénomène qu’elle n’est anodine.
Je pense que, avant de s’interroger sur ses conséquences, il est primordial d’examiner sa genèse et de mesurer le cadre dans lequel elle s’inscrit, pour voir ensuite le bouleversement qu’elle entraîne, dans nos modes de pensée comme dans la réalité de la gestion de nos collectivités.
Dans un second temps, nous jugerons de ses conséquences immédiates, des insuffisances qu’elle porte, comme des ajustements et des corrections qu’il conviendrait d’apporter, pour apprécier ensuite ce qui a été fait et ce qu’il reste à faire.
En même temps, en tant que fiscaliste, j’aimerais vous convaincre, comme me l’a appris mon maître, Maurice Cozian, que la matière fiscale n’est pas qu’un outil technique et qu’elle reflète aussi les exigences de son temps.
Tout d’abord, je rappellerai le cadre de cette réforme majeure, qui visait à supprimer la taxe professionnelle instituée en 1975. Chacun se souvient du contexte de cette suppression, ou plutôt du « remplacement » d’un « impôt insensé et imbécile » qui pénalisait l’outil industriel, un impôt devenu illisible et dont la prise en charge par l’État devenait insupportable.
Pour mémoire, cette taxe avait déjà été sévèrement « impactée » par la suppression de la part salaires, intervenue en deux temps, en 1987 puis en 1999, pour le malheur des finances de l’État, puis par la réforme et la prise en compte de la valeur ajoutée lors de deux modifications, en 1979 puis en 2006. Ces mesures introduisaient les germes de la réforme.
Portée par les seuls investissements, la taxe, ainsi que l’avait déjà révélé le rapport Fouquet, était condamnée. Elle fut, au nom de la compétitivité industrielle, sacrifiée au profit de la cotisation économique territoriale par la loi de finances de 2010, qui s’appuyait notamment sur les travaux et les consultations de la mission Durieux -Subremon.
Elle a également fait l’objet, en 2010, d’un rapport au Premier ministre de l’époque, François Fillon, dans le cadre de la mission confiée à nos collègues sénateurs François-Noël Buffet, Alain Chatillon et Charles Guené ainsi qu’à trois de nos collègues députés, et, bien sûr, du rapport sénatorial que j’ai commis sous la présidence avisée d’Anne-Marie Escoffier, alors sénatrice et aujourd'hui ministre, avec le concours de plusieurs de nos collègues, dans le cadre d’une mission sénatoriale remarquée, et peut-être remarquable.