Intervention de Catherine Deroche

Réunion du 31 janvier 2013 à 9h00
Cumul de l'allocation de solidarité aux personnes âgées avec des revenus professionnels — Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Catherine DerocheCatherine Deroche :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre assemblée examine en première lecture la proposition de loi de notre collègue Isabelle Debré visant à autoriser le cumul de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, l’ASPA, avec des revenus professionnels.

Le nombre d’allocataires de l’ASPA est en augmentation et pourrait s’accroître.

Dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale pour 2012, la Cour des comptes observe que « la dégradation récente des ressources moyennes des allocataires traduit une évolution préoccupante ». En effet, d’après une enquête réalisée par le Fonds de solidarité vieillesse sur les allocations du minimum vieillesse au 31 décembre 2010, le nombre de bénéficiaires de l’ASPA a connu une progression de près de 20 % par rapport à 2010. L’enquête révèle également que les femmes représentent plus des trois quarts de l’ensemble des allocataires isolés et 62 % des allocataires isolés âgés de 65 à 70 ans.

Je tiens à rappeler que, compte tenu de l’écart important qui s’était creusé entre le montant du minimum vieillesse et le seuil de pauvreté, le précédent gouvernement avait décidé, dans le cadre du « rendez-vous de 2008 sur les retraites », d’accroître de 25 % le montant de l’ASPA pour les personnes isolées et des deux allocations du minimum vieillesse pour les personnes seules.

L’arrivée à l’âge de la retraite de générations nombreuses aux carrières professionnelles plus discontinues que leurs devancières pourrait conduire à une augmentation à venir du nombre d’allocataires. Qui plus est, les effectifs d’allocataires demeurent probablement inférieurs au nombre de personnes éligibles, en raison d’un défaut d’information. Cette situation s’explique par la difficulté d’identifier les populations concernées. Certaines personnes âgées n’avaient en effet pas droit au minimum vieillesse quand elles ont liquidé leur retraite. Lorsque le plafond de cette aide sociale a été progressivement revalorisé, ces dernières n’ont pas forcément pensé – elles n’ont peut-être pas été alertées – qu’elles pouvaient bénéficier d’un complément de revenu via ce dispositif.

L’état actuel du droit place les allocataires du minimum vieillesse dans une situation d’iniquité par rapport aux autres retraités qui peuvent bénéficier, depuis 2003, du cumul emploi-retraite.

Comme vous le savez, le dispositif du cumul emploi-retraite permet de percevoir simultanément une pension de retraite et des revenus d’activité. D’abord soumis à certaines conditions, notamment de plafonnement, le cumul a été intégralement libéralisé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009. Dans le cadre de ses premiers travaux, le Conseil d’orientation des retraites faisait d’ailleurs valoir que « le droit à la retraite ne prive pas les retraités d’un droit fondamental, le droit au travail ».

Dans son rapport relatif à l’évaluation du cumul emploi-retraite, l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, note un développement très important du recours à ce dispositif depuis l’assouplissement intervenu en 2009. Selon les estimations les plus récentes, environ un demi-million de personnes y recourent à l’heure actuelle. Cela souligne l’effet bénéfique de cet assouplissement. Cependant, en l’état actuel du droit, lorsqu’ils perçoivent des revenus professionnels, les titulaires de l’ASPA sont particulièrement pénalisés : non seulement la sécurité sociale leur prélève des cotisations, mais elle retire aussi, mécaniquement, du montant de la prestation les revenus d’activité perçus, ce qui conduit à annuler le bénéfice financier de l’activité professionnelle.

Face à ces règles de calcul de l’ASPA, le texte qui nous est soumis aujourd’hui prévoit d’introduire davantage d’équité en ouvrant la possibilité aux titulaires du minimum vieillesse, lorsqu’ils souhaitent travailler et qu’ils sont bien évidemment en mesure de le faire, de cumuler cette allocation avec les revenus professionnels perçus sans être pénalisés. Je tiens d’ailleurs à rappeler que ce n’est qu’une faculté. Il n’y a bien évidemment rien d’obligatoire dans ce dispositif.

Ce système permettrait en outre de répondre à des demandes d’emploi non couvertes. Je pense par exemple au coup de main qui pourrait être apporté par une personne âgée un ou deux jours par semaine pour assurer l’ouverture d’un petit commerce dans nos campagnes. Et je pourrais multiplier les exemples de travaux qui ne trouvent pas forcément preneur !

Face à la situation injuste que je viens d’évoquer, la proposition de loi est pleinement cohérente avec une recommandation de l’IGAS, qui, dans un rapport publié au mois de juin dernier, affirmait qu’« un mécanisme d’intéressement pour le minimum vieillesse corrigerait un facteur d’inégalité dans l’accès au cumul emploi-retraite », ajoutant que cette évolution devait « intervenir dans une logique d’intéressement comparable à celle qui existe déjà pour d’autres minimums sociaux ».

De plus, cela n’entraînera aucun surcoût pour les finances sociales, puisque le minimum vieillesse aurait été payé de toute façon et que les activités donneront lieu à des cotisations supplémentaires qui seront versées aux caisses de sécurité sociale.

Il s’agit donc de permettre aux titulaires du minimum vieillesse de cumuler leur allocation avec des revenus d’activité dans la limite de 1, 2 SMIC pour une personne seule et de 1, 8 SMIC pour un couple. La fixation d’un plafond de cumul paraît nécessaire, puisqu’il s’agit d’une allocation qui relève de la solidarité nationale.

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