Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, une étude publiée au mois de décembre dernier nous rappelle, s’il en était nécessaire, la priorité absolue que constitue la lutte contre les facteurs d’exclusion sociale et de pauvreté. Au début de ce mois, Eurostat relayait le même message, soulignant que, en 2011, près d’un quart de la population européenne, soit 120 millions de personnes, était menacé par ces deux tragiques phénomènes.
Ces chiffres, réalité glaciale sans concession, viennent heurter de plein fouet la chaleureuse illusion qu’a fait naître notre modèle économique, celle d’un bien-être et d’une prospérité partagés. Il n’en est rien. Au contraire, comme le démontre une récente étude de l’INSEE – la péroraison ne surprendra personne –, les inégalités se sont encore creusées sous l’effet de la crise économique.
Ainsi, comment s’étonner qu’au-delà de la pauvreté monétaire et matérielle la perception du sentiment de pauvreté progresse inexorablement au sein de la société française, des classes populaires aux classes moyennes, de la jeunesse aux personnes âgées ? L’incertitude du lendemain, la peur du déclassement créent une angoisse qui peut être « anéantissante ». Au bout de cet obscur tunnel, l’anxiété provoque cette perte d’espoir dans l’avenir dont le sentiment de devenir pauvre est l’une des nombreuses facettes, au même titre que la perte de croyance dans notre système de protection sociale ou cette sensation qu’aucun horizon ne se lève devant notre jeunesse. Heureusement, des mesures sont prises par le Gouvernement pour pallier ces difficultés.
Parmi ceux qui estiment vivre dans l’indigence, les seniors et les personnes âgées sont malheureusement au premier plan. Aussi, les allocataires du minimum vieillesse, destinataires de la proposition de loi présentement soumise à notre examen, sont par essence affectés par la pauvreté et l’exclusion sociale. En effet, ce dispositif de solidarité, fortement remanié en 2007 avec la création de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, vise à garantir un revenu minimal aux personnes âgées d’au moins 65 ans n’ayant pas suffisamment cotisé, ou n’ayant pas pu le faire, aux régimes de retraite au cours de leur carrière. Pour bénéficier de cette allocation de dernier ressort, les titulaires doivent faire valoir en priorité l’ensemble de leurs droits en matière de pensions de retraite avant de recourir éventuellement au minimum vieillesse. Depuis le mois d’avril dernier, ce minimum vieillesse s’établit à 777 euros par mois et concerne environ 580 000 personnes, soit 4 % des 60 ans et plus.
Pour autant, les revalorisations successives de cette allocation ne masquent pas l’écart persistant avec le seuil de pauvreté, fixé à 60 % du revenu médian, c’est-à-dire 964 euros. En d’autres termes, eu égard au renchérissement général du coût de la vie, bénéficier du minimum vieillesse ne garantit aucunement de sortir de la pauvreté ; tout au plus, permet-il de mieux y faire face, de mieux survivre.