Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je veux tout d’abord remercier Jacky Le Menn de l’énergie qu’il a consacrée à la réécriture, ô combien délicate ! de ce texte qui a connu tant de péripéties ; il nous a permis, grâce à sa remarquable capacité d’écoute, de parvenir à la meilleure solution possible sur ce sujet aussi politique que technique.
Les biologistes médicaux, on l’a rappelé, participent pour beaucoup au parcours de soins de nos concitoyens, puisqu’ils contribuent à établir 60 % du diagnostic des pathologies.
Reconnaissance de la dimension médicale exercée par les médecins et les pharmaciens, qualité des soins, proximité, égalité d’accès aux soins, efficience : tels sont les défis qu’il nous faut relever. Nous devons par ailleurs stabiliser la situation juridique des biologises médicaux en prévoyant une égalité de traitement entre laboratoires privés et publics.
Nous devons légiférer dans le cadre du droit européen, qui nous laisse deux voies alternatives en matière d’organisation de la biologie : il nous faut soit considérer la biologie comme une prestation susceptible de relever d’une définition très large de la communauté scientifique, soit réserver la possibilité de pratiquer les examens de biologie relatifs à la santé humaine aux seuls médecins et pharmaciens ayant suivi une spécialisation en biologie.
Nous avons choisi la seconde voie, celle la médicalisation de la biologie médicale. Il faut nous en féliciter, alors même que nous devons répondre à un double enjeu : garantir le haut niveau de qualité des examens pratiqués et limiter la possibilité pour des investisseurs soucieux du taux de retour de leur capital de contrôler l’activité de biologie médicale. Nous avons en effet la volonté de lutter contre la financiarisation de cette activité.
Notre marge de manœuvre est étroite. La Communauté européenne n’est certes pas habilitée à se prononcer sur l’opportunité du choix, par un État membre, de réserver l’exercice de certaines activités aux professions de santé, mais elle peut, en revanche, exiger que cette restriction ne constitue pas une entrave déguisée au droit de la concurrence.
Si notre marge de manœuvre est étroite, elle ne doit pas, pour autant, entraver notre détermination à lutter contre la financiarisation de la biologie médicale.
Défendre la qualité des examens biologiques, c’est mettre en place une méthodologie d’évaluation qualitative qui permette d’en déduire une preuve objective : l’accréditation de l’ensemble des laboratoires.
Cette procédure inquiète une grande partie des biologistes. Nous devons les entendre et mettre en place des garde-fous afin que l’accréditation soit au service de la biologie médicale, et non une entrave à son développement, en particulier pour les jeunes biologistes qui souhaitent s’installer.
L’accréditation doit être généralisée afin de contrecarrer la tentation de qualifier différemment des laboratoires de tailles diverses, mais elle ne doit pas être uniforme. Elle doit tenir compte, entre autres choses, des familles d’examens biologiques médicaux.
Nous devons par ailleurs veiller à ce que ne soit pas validée l’idée selon laquelle l’accréditation impose une forme particulière d’exercice de la biologie médicale, impliquant une forte concentration de l’exercice autour d’appareils volumineux et très coûteux.
Pour être acceptée et réalisable dans de bonnes conditions, l’accréditation doit pouvoir être pratiquée de façon progressive, par paliers ; nous aurons l’occasion d’y revenir lors de la discussion des articles.
Au-delà des principes, nous avons à répondre de façon précise aux questions relatives à la pratique de l’accréditation.
Toute accréditation est conduite sous l’égide du Comité français d’accréditation, le COFRAC, chargé d’une mission de service public, qui dispose pour mener son action d’un monopole national.
Le coût de ses prestations est dénoncé par nombre de biologistes ; certains d’entre eux considèrent même qu’il peut mettre en cause la viabilité de leur laboratoire. Alors qu’il est censé représenter, en théorie, de 1 % à 2 % du chiffre d’affaires d’un laboratoire, il atteint en réalité, selon l’Ordre des médecins, plus du double de ce taux.
Si le coût de l’accréditation est un enjeu central, ses modalités pratiques, notamment la sélection des experts et l’établissement des normes, ne manquent pas non plus de nous interpeller.
La sélection des experts doit permettre de représenter l’ensemble de la profession. Il faut aussi des normes visant à prendre en compte les conditions de sécurité du prélèvement, de la réalisation de l’examen, mais aussi la qualité et la permanence de l’investissement humain. Doivent ainsi être appréciées la présence effective du biologiste dans son laboratoire, ainsi que la rapidité avec laquelle il transmet les examens.
Sans chercher de boucs émissaires, je salue donc votre volonté, monsieur le rapporteur, de demander à la commission des affaires sociales de solliciter auprès de la Cour des comptes un rapport d’évaluation relatif au COFRAC.
L’accréditation, dont la réussite dépendra de son efficacité, est la première priorité de cette proposition de loi ; le refus de la financiarisation est la seconde.
L’indépendance des biologistes de laboratoire est mieux garantie, grâce à la possibilité qui leur est réservée d’acquérir une fraction, voire la totalité, du laboratoire dans lequel ils travaillent. Cela semble une évidence ; d’ailleurs, 85 % des laboratoires sont d’ores et déjà détenus par des professionnels.
L’engagement que nous manifesterons au cours de nos débats sera déterminant pour faire obstacle à cette financiarisation, délétère pour la pérennisation de nos laboratoires, de proximité en particulier.
Je souhaite à présent évoquer certaines questions qui, je le crois, sont propres à susciter le débat.
Tel est le cas, tout d’abord, de la détermination de la responsabilité des différents intervenants lors de la phase dite « pré-analytique » de l’examen biologique, qui court du moment où l’on pratique le prélèvement jusqu’au transport de celui-ci, et qui précède la pratique de l’examen lui-même. Il me semble en effet important de déterminer à partir de quel moment la responsabilité du biologiste peut être engagée.
Nous devrons par ailleurs nous pencher et, partant, sans doute prendre position – négativement, en ce qui me concerne ! – sur la décision de ne pas confier à l’Établissement français du sang les examens biologiques du receveur. On constate en effet l’existence de doublons, sources de dépenses supplémentaires.