Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 31 janvier 2013 à 15h00
Réforme de la biologie médicale — Discussion en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Marisol Touraine :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux tout d’abord vous remercier de la grande qualité de ce débat. Celui-ci montre qu’il existe une volonté partagée d’avancer sur ce sujet qui, vous l’avez souligné, fut trop longtemps laissé en jachère, pour des raisons diverses.

Je salue votre engagement à tous et je souhaite que nous puissions, lors du débat sur les articles, avancer ensemble.

Vos interventions, vos préoccupations, voire vos motifs d’interrogation et d’inquiétude, se concentrent autour de certains sujets : la financiarisation du modèle d’exercice de la biologie médicale, l’accréditation des laboratoires, la formation des professionnels. Nous aurons l’occasion de revenir plus en détail sur ces points lors de l’examen des amendements que vous avez déposés.

Gilbert Barbier a été le premier à poser clairement la question de la financiarisation.

Je tiens à lui dire que le Gouvernement partage les inquiétudes qui se sont exprimées, en des termes différents, sur l’ensemble de ces travées, et qui se rejoignent en ce qu’elles traduisent votre volonté de garantir la présence de laboratoires de biologie médicale sur l’ensemble du territoire national.

Allons-nous laisser libre cours, dans le domaine de la santé, à la logique de financiarisation ? Au reste, comme l’a souligné M. Barbier, celle-ci ne concerne d’ailleurs pas uniquement les laboratoires de biologie médicale.

Cette logique de pure rentabilité financière des capitaux investis, sans lien avec l’activité elle-même, est à l’œuvre dans d’autres secteurs d’activité, mais elle est inacceptable dans le secteur de la santé, qui touche au bien-être, aux soins, à l’avenir et à la vie même de nos concitoyens.

La logique capitalistique, je le réaffirme, est sans lien avec nos engagements et nos objectifs en matière de santé. C’est l’une des raisons majeures pour lesquelles le Gouvernement soutient cette proposition de loi : la volonté qui s’est exprimée sur toutes les travées du Sénat, il la fait sienne !

La question de l’accréditation a également été évoquée par tous les intervenants.

Madame Archimbaud, le Gouvernement partage votre point de vue : l’accréditation est en effet une condition de la qualité et de la transparence, et donc un élément socle d’une sécurité sanitaire renforcée et améliorée.

Je n’insisterai pas outre mesure sur les débats actuels sur l’usage de certains médicaments, mais l’enjeu est bien là : la sécurité sanitaire est directement liée à la capacité de garantir une information et des procédures transparentes, qui sont gages de confiance.

J’ai bien entendu, par ailleurs, que vous souteniez la démarche de l’accréditation par paliers.

Celle-ci permettra de répondre à la préoccupation que vous avez exprimée avec force, madame Cohen. J’en suis parfaitement d’accord avec vous, il ne faudrait pas que l’on assiste à un effet boomerang de l’accréditation et que les objectifs poursuivis ne soient pas atteints du fait même des instruments mis en place à cette fin.

Si tel devait être le cas, nous mettrions en effet en danger les petits laboratoires, mais il me semble que la mise en place de la démarche de l’accréditation par paliers, saluée comme un point positif par Mme Archimbaud, devrait éviter une telle évolution.

Si j’ai bien noté votre soutien en la matière, madame Archimbaud, j’ai également relevé vos inquiétudes, que vous partagez d’ailleurs avec plusieurs de vos collègues, concernant l’indépendance et les tarifs du Comité français d’accréditation.

M. le rapporteur a indiqué comment il entendait assurer la transparence du fonctionnement de ce comité. Je n’y vois pour ma part que des avantages. Nous avons besoin d’avoir confiance dans les instruments que nous mettons en place pour encadrer nos politiques et garantir la qualité de nos procédures et de nos institutions. Sinon, le doute subsistera. Je ne peux donc que me rallier aux propos tenus par M. Le Menn.

Monsieur Milon, j’ai été particulièrement sensible à votre intervention, dans laquelle vous avez affirmé votre soutien à la démarche d’ensemble. Vous avez très justement fait remarquer que la situation dans laquelle nous nous trouvions ne pouvait pas perdurer : elle est source d’insécurité tant juridique que sanitaire.

Vous avez par ailleurs souligné que les actes de biologie médicale étaient des actes médicaux. Nous ne pouvons pas, comme on l’a trop souvent fait par le passé, présenter la biologie médicale comme un secteur à part du système de santé. Elle est indissociable d’une chaîne de soins, qui va de la phase pré-analytique au soin et à son accompagnement.

Je souhaite que nous parvenions à trouver des solutions satisfaisantes pour l’ensemble de nos concitoyens, car c’est bien là notre préoccupation commune, afin d’effacer vos inquiétudes.

Madame Cohen, au-delà du point que je viens d’évoquer, je suis sensible, je le répète, à la démarche que vous avez prônée. Tout l’enjeu est de réussir à apporter des réponses sur les deux tableaux : d’une part, celui de la maîtrise d’un processus, qui, aujourd’hui livré à lui-même, nous conduit droit dans le mur d’une financiarisation excessive, dont l’objectif est non pas la santé de nos concitoyens, mais plutôt l’intérêt des actionnaires de différents groupes ; d’autre part, celui de la garantie de la qualité des actes, qui nous impose de ne pas laisser les procédures sans contrôle ni maîtrise.

Il nous faut trouver un équilibre satisfaisant entre ces deux impératifs. Tel est l’objet de ce texte. Sans doute pouvons-nous encore l’améliorer : ce sera tout l’enjeu de la discussion des articles, conformément à la volonté de M. le rapporteur.

Monsieur Vanlerenberghe, je ne reviendrai ni sur la financiarisation ni sur l’accréditation, dont je viens de parler.

Je vous remercie d’avoir apporté votre soutien à l’accréditation par paliers pour atteindre notre objectif de qualité. Il serait évidemment irréaliste et insensé de fixer un objectif à atteindre immédiatement !

Vous avez particulièrement insisté sur la formation des professionnels et l’accès à l’exercice de la biologie médicale dans les hôpitaux, sujets qui doivent, en effet, être liés à l’exigence d’une permanence des soins sur tout notre territoire.

Il s’agit non pas d’ouvrir sans contrôle la pratique d’une profession, mais de faire en sorte que celle-ci s’exerce dans des conditions et un cadre déterminés, comportant des exigences en matière de permanence des soins, par des professionnels aux compétences médicales identifiées possédant l’expérience nécessaire. On ne peut pas dire, d’un côté, que la biologie médicale fait partie de la chaîne des soins et, de l’autre, l’en détacher lorsque l’on parle d’assurer la permanence des soins de proximité.

Madame Génisson, j’ai bien entendu vos propos sur les contraintes juridiques extérieures, européennes notamment. Tout l’enjeu, pour nous, est de nous frayer un chemin entre nos propres exigences en matière de sécurité sanitaire et ces contraintes juridiques dont nous ne pouvons nous abstraire.

Comme vous l’avez dit, cet objectif nous oblige à faire preuve d’une ténacité et d’une volonté absolues : nous ne pouvons pas renoncer. Telle est bien, d’ailleurs, la volonté du Gouvernement. C’est la raison pour laquelle nous soutenons cette proposition de loi. Elle nous paraît en effet porter l’expression d’une volonté forte, notamment s’agissant de l’accréditation, que vous avez vous-même présentée comme une démarche positive.

Nous espérons mettre ainsi en place un cadre pour l’exercice de la biologie médiale, à la fois satisfaisant pour les professionnels et rassurant pour les patients.

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