Intervention de Christiane Demontès

Réunion du 5 février 2013 à 14h30
Création du contrat de génération — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission.

Photo de Christiane DemontèsChristiane Demontès, rapporteur :

Le contrat de génération et ses modalités d’application sont définis à l’article 1er du projet de loi. Le cœur du dispositif consiste à accorder une aide forfaitaire de 4 000 euros par an aux entreprises de moins de 300 salariés qui embaucheront en CDI et maintiendront en emploi un jeune de moins de 26 ans ou un jeune travailleur handicapé de moins de 30 ans, à la condition qu’elles maintiennent aussi en emploi un senior de plus de 57 ans, ou un travailleur handicapé de plus de 55 ans ou une personne embauchée de plus de 55 ans.

À propos de ce contrat, je tiens à dissiper deux malentendus. D’une part, le contrat de génération n’est pas un emploi aidé, contrairement aux emplois d’avenir : embauchés en CDI, ses bénéficiaires seront des salariés comme les autres et bénéficieront des mêmes droits que leurs collègues, notamment dans le cadre du plan de formation.D’autre part, le contrat de génération n’est pas un contrat de formation en alternance.

Le contrat de génération prendra des formes différentes selon la taille des entreprises. Par pragmatisme et par souci d’efficacité, il a été décidé qu’aucune obligation spécifique ne serait imposée aux entreprises de moins de 50 salariés pour qu’elles puissent bénéficier de l’aide. Reste que l’État ne signera pas de chèques en blanc : les dispositions concernant l’éligibilité à l’aide, notamment en cas de licenciement d’un salarié, seront applicables à ces entreprises.

Je souligne que, dans les entreprises de moins de 50 salariés, l’aide pourra également être versée lorsqu’un chef d’entreprise âgé d’au moins 57 ans embauchera un jeune de moins de 26 ans en vue de lui transmettre son entreprise. On ne peut que saluer cet aménagement du dispositif car nous savons tous à quel point les chefs de très petites entreprises et les artisans peinent à assurer leur succession quand vient pour eux l’heure de la retraite.

Les entreprises qui emploient entre 50 et 300 salariés ne pourront bénéficier de l’aide que si elles ont conclu un accord collectif d’entreprise « intergénérationnel » – pour reprendre la formulation de l’ANI – ou, à défaut, si un plan d’action a été arrêté par l’employeur. En cas d’absence d’accord collectif d’entreprise ou de plan d’action, ces entreprises pourront malgré tout bénéficier de l’aide si elles sont couvertes par un accord de branche étendu.

Dans tous les cas, l’accord collectif d’entreprise, l’accord de branche ou le plan d’action devront être précédés d’un diagnostic. Je vous signale qu’il s’agit d’une avancée par rapport aux accords seniors prévus en 2009, qui n’imposaient pas cette étape du diagnostic.

Les accords et les plans d’action comprendront trois parties : premièrement, des objectifs assortis d’indicateurs chiffrés et déclinés en trois volets – jeunes, travailleurs âgés, transmission des savoirs et des compétences ; deuxièmement, un échéancier des mesures prises sur trois ans maximum et les modalités de leur suivi ; troisièmement, les modalités de publicité de l’accord.

Quant aux entreprises et établissements publics industriels et commerciaux qui comptent plus de 300 salariés, ils n’auront pas droit à l’aide de 4 000 euros mais devront conclure un accord collectif d’entreprise ou élaborer un plan d’action ; dans les deux cas, le contenu du document devra répondre aux règles que je viens de présenter. L’absence de ces documents ou leur non-conformité aux dispositions légales sera sanctionnée par une pénalité, dont le montant ne pourra dépasser le plus élevé de ces deux plafonds : 1 % de la masse salariale ou 10 % des réductions de cotisations patronales.

Dans sa rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, le projet de loi comporte six articles en plus de l’article 1er.

L’article 1er bis impose au Gouvernement de réaliser un rapport sur l’application du contrat de génération en outre-mer ; je reviendrai sur cette question dans quelques instants.

L’article 2 concerne l’articulation entre les accords sur le contrat de génération et les obligations de négociation triennale qui existent déjà sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, la GPEC. Il prévoit que les accords sur la GPEC pourront intégrer le contrat de génération, s’ils sont conformes aux dispositions de l’article 1er.

L’article 3 supprime les accords seniors, qui s’accompagnaient d’une pénalité de 1 % de la masse salariale pour les entreprises n’ayant pas conclu un accord ou, à défaut, élaboré un plan d’action. Dans la mesure où le projet de loi met en place une nouvelle négociation qui portera sur le maintien dans l’emploi des salariés âgés, il n’est pas nécessaire de laisser subsister cette mesure.

L’article 4 habilite le Gouvernement à adapter la loi par ordonnance pour la rendre applicable à Mayotte.

L’article 5 fixe les conditions d’entrée en vigueur du contrat de génération. Il prévoit que les entreprises disposeront de six mois pour négocier avant que la pénalité ne s’applique ; ce délai me semble raisonnable. En outre, dans les entreprises de moins de 50 salariés, les aides seront versées, de manière rétroactive, pour les embauches réalisées à compter du 1er janvier 2013. Enfin, pour ne pas pénaliser les jeunes de plus de 26 ans déjà présents dans les entreprises en CDD, en CTT ou dans le cadre d’une formation en alternance au moment de la promulgation de la loi, l’Assemblée nationale a prévu que leur recrutement en CDI pourrait avoir lieu dans le cadre du contrat de génération.

L’article 5 bis autorise l’ouverture pendant trois ans d’un examen professionnel permettant aux contrôleurs du travail d’accéder au corps de l’inspection du travail ; je n’insiste pas sur cette mesure, dont M. le ministre a longuement parlé.

Enfin, l’article 6 prévoit la réalisation d’un rapport annuel sur la mise en œuvre du contrat de génération.

Pour terminer, je vais vous présenter les modifications que la commission des affaires sociales a apportées au projet de loi, avec le souci de respecter son équilibre dans le cadre fixé par l’accord national interprofessionnel du 19 octobre 2012.

Tout d’abord, la commission a souhaité renforcer le dialogue social dans l’entreprise en limitant la possibilité pour l’employeur de recourir au plan d’action unilatéral. Nous proposons que le procès-verbal de désaccord soit signé avec les délégués syndicaux, s’il y en a dans l’entreprise, ou avec les membres des institutions représentatives du personnel, les IRP, c’est-à-dire les délégués du personnel et les membres élus au comité d’entreprise ou à la délégation unique du personnel, si des négociations ont été engagées avec eux, dans le cadre dérogatoire prévu par le code du travail. Autrement dit, dans les entreprises de moins de 200 salariés dépourvues de délégués syndicaux mais dotées d’IRP, l’employeur ne pourra élaborer un plan d’action unilatéral qu’après avoir épuisé la voie de la négociation avec les représentants des salariés.

Ensuite, notre commission a renforcé le contenu des accords et des plans d’action du contrat de génération sur quatre points.

Premièrement, comme M. le ministre Repentin l’a souligné, une attention particulière devra être accordée dans les accords et dans les plans d’action à la formation des référents chargés de la transmission des savoirs et des compétences, ainsi qu’à la formation des salariés âgés, notamment ceux de plus de 45 ans faiblement qualifiés. §En effet, si les plans de formation des entreprises s’adressent en théorie à l’ensemble des salariés, nous savons tous que les actions de formation ne bénéficient pas toujours, tant s’en faut, à ceux qui en auraient le plus besoin.

Deuxièmement, les accords et plans d’action doivent évaluer la mise en œuvre des accords seniors de 2009, dans le cadre du diagnostic obligatoire prévu par la loi. Sur l’initiative de notre collègue Jean Desessard

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