Intervention de Christiane Demontès

Réunion du 12 février 2013 à 22h00
Création du contrat de génération — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Christiane DemontèsChristiane Demontès :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme de l’examen du projet de loi portant création du contrat de génération, qui a débuté à la fin du mois de décembre à l’Assemblée nationale.

Le Sénat a examiné ce texte en séance publique la semaine dernière et, malgré l’engagement de la procédure accélérée, justifié par la nécessité de combattre sans attendre le chômage qui frappe nos concitoyens, je crois pouvoir dire que le Parlement a pu débattre dans de bonnes conditions de ce texte. Je constate avec satisfaction que les modifications qui lui ont été apportées n’ont pas dénaturé, dans son esprit, l’accord national interprofessionnel du 19 octobre 2012 qui en constitue le fondement.

Je ne reviendrai pas sur le contenu du projet de loi, dont vous connaissez tous désormais l’architecture globale. Je voudrais en revanche évoquer, rapidement, les principaux apports de l’Assemblée nationale et du Sénat, avant de présenter les conclusions de la commission mixte paritaire qui s’est réunie ce matin.

L’Assemblée nationale a tout d’abord précisé le contenu du procès-verbal de désaccord, du diagnostic préalable, des accords collectifs et des plans d’action. Elle a ensuite prescrit le traitement, dans les accords et les plans, de la question des conditions d’emploi des seniors et renforcé les obligations en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de lutte contre les discriminations.

Les députés ont également imposé l’embauche en contrat à durée indéterminée à temps plein pour les jeunes et autorisé, sous conditions, le travail à temps partiel, sans pouvoir descendre en dessous de 80 % du temps de travail hebdomadaire. Les conditions de suppression de l’aide ont en outre été élargies et la transmission des entreprises de moins de cinquante salariés a été facilitée.

Par ailleurs, les députés ont demandé au Gouvernement deux rapports : l’un sur l’application du contrat de génération, l’autre spécifique à l’outre-mer. Ils ont également souhaité éviter que des entreprises ne retardent leurs embauches et ont donc prévu, pour celles qui emploient moins de cinquante salariés, que l’aide porterait sur les recrutements effectués depuis le 1er janvier 2013. Pour ne pas pénaliser les jeunes de plus de vingt-six ans déjà présents dans les entreprises et qui ont conclu, avant d’atteindre leurs vingt-six ans, un contrat à durée déterminée ou un contrat en alternance, l’Assemblée nationale a aussi prévu que leur recrutement en CDI pourrait se faire dans le cadre du contrat de génération.

Enfin, l’Assemblée nationale a institué, pendant une période de trois ans, un examen professionnel ouvert aux contrôleurs du travail pour accéder au corps des inspecteurs du travail.

J’en viens maintenant aux principales modifications apportées par le Sénat, que l’on peut résumer en cinq thèmes : la promotion du dialogue social, le renforcement du contenu des accords et des plans d’action, la clarification des conditions d’éligibilité aux aides financières, l’information du Parlement et la suppression de dispositions inutilisées.

En premier lieu, le Sénat a souhaité promouvoir le dialogue social dans l’entreprise en restreignant les possibilités de recourir au plan d’action unilatéral de l’employeur. Désormais, le procès-verbal de désaccord doit être signé avec les délégués syndicaux, s’ils sont présents dans l’entreprise, ou avec les membres des institutions représentatives du personnel, si des négociations ont été engagées avec eux, dans le cadre dérogatoire prévu par le code du travail.

En deuxième lieu, notre assemblée a renforcé le contenu des accords et plans d’action du contrat de génération sur quatre points.

Tout d’abord, les diagnostics doivent évaluer la mise en œuvre des accords « seniors » de 2009. En effet, pourquoi faire comme s’ils n’avaient pas existé ? À mon sens, le Sénat a réalisé une avancée intéressante sur ce point. Ensuite, les accords et plans d’action doivent comporter des engagements pour les jeunes les moins qualifiés et attacher une attention particulière à la formation des référents et des salariés âgés. Par ailleurs, ils assureront la réalisation des objectifs de lutte contre les discriminations non seulement à l’embauche, mais aussi durant le déroulement de la carrière des salariés. Enfin, ces documents traiteront obligatoirement de l’amélioration des conditions de travail des salariés âgés et de la prévention de la pénibilité.

L’Assemblée nationale avait introduit une négociation obligatoire sur le thème, plus restreint, des conditions d’emploi des salariés âgés, ce qui constituait déjà une avancée. Constatant que les accords « seniors » de 2009 avaient peu traité la question des conditions de travail, la commission des affaires sociales du Sénat a souhaité maintenir cette obligation, tout en reprenant fidèlement les termes mêmes de l’accord national interprofessionnel.

En troisième lieu, le Sénat a clarifié les conditions d’éligibilité à l’aide financière de l’État, afin de donner toutes ses chances au lancement du dispositif dès le mois de mars. Ainsi, pour la catégorie de postes sur laquelle est prévue l’embauche, l’aide sera interdite si l’entreprise a procédé, au cours des six derniers mois, à un licenciement économique. En revanche, pour le poste sur lequel est prévue l’embauche, les règles seront plus sévères : l’aide ne pourra être accordée si l’employeur a procédé à un licenciement pour un motif autre que la faute grave, la faute lourde ou l’inaptitude. Autrement dit, l’aide sera interdite, par exemple, en cas de licenciement économique ou pour faute simple.

Notre commission des affaires sociales avait également souhaité interdire l’aide si une rupture conventionnelle intervenait sur le poste concerné six mois avant l’embauche d’un jeune ou d’un senior. Contre l’avis de la commission, le Sénat a supprimé cette interdiction la semaine dernière en séance publique, je reviendrai tout à l’heure sur ce point.

Par ailleurs, notre assemblée a précisé que le montant de l’aide est calculé au prorata de la durée hebdomadaire du travail des salariés du binôme.

En quatrième lieu, le Sénat a souhaité que le Gouvernement rende un rapport unique et annuel au Parlement sur l’application du contrat de génération, rapport qui comprendra notamment une analyse spécifique des départements et régions d’outre-mer. Ce rapport évaluera en outre l’opportunité, trois ans après la promulgation de la loi, de modifier les bornes d’âge fixées pour bénéficier du contrat de génération et d’instaurer une pénalité à l’encontre des entreprises de cinquante salariés à trois cents salariés non couvertes par un accord d’entreprise ou un plan d’action.

Enfin, la commission des affaires sociales a supprimé un dispositif d’aide à l’emploi des seniors qui, créé par la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, n’a jamais été mis en œuvre, faute de décret d’application.

Au-delà des modifications apportées par notre commission, le Gouvernement a, je le rappelle, souhaité introduire un article additionnel qui prolonge jusqu’au 31 décembre 2013 des exonérations de cotisations sociales concernant le bonus exceptionnel versé aux salariés dans certaines collectivités ultra-marines.

La commission mixte paritaire, qui s’est réunie ce matin, a abouti à un accord, et dans de bonnes conditions. Dans un climat de dialogue très constructif avec nos collègues députés, et je tiens tout particulièrement à saluer ici le travail du rapporteur de l’Assemblée nationale, M. Christophe Sirugue, nous sommes parvenus à un accord qui nous satisfait pleinement sur tous les points qui restaient en discussion.

Nous avons tout d’abord souhaité renforcer la prise en compte des questions d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et favoriser ainsi la réalisation des objectifs qui devront être fixés dans les accords. C’est pourquoi le diagnostic préalable devra s’appuyer sur les objectifs et les mesures définis dans le cadre de la négociation obligatoire d’entreprise ou de branche sur le sujet.

En ce qui concerne, ensuite, les jeunes les moins qualifiés, une attention particulière devra leur être accordée dans le cadre du plan de formation de l’entreprise. Je le rappelle, les jeunes embauchés dans le cadre du contrat de génération ne sont pas soumis au régime des contrats aidés, ils sont des salariés comme les autres et bénéficient, à ce titre, du plan de formation de l’entreprise.

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