Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, qui s’est réunie à l’Assemblée nationale le 30 septembre dernier, est parvenue à un texte commun sur les dispositions restant en discussion du projet de loi complétant les dispositions relatives à la démocratie sociale issues de la loi du 20 août 2008.
Il me semble utile de rappeler en quelques mots l’objet de ce projet de loi, avant de vous présenter le compromis qui a été trouvé par la commission mixte paritaire.
Ce projet de loi vise à régler un problème qui avait été laissé en suspens lors de la réforme de la représentativité syndicale d’août 2008 : celui de la mesure de l’audience syndicale auprès des salariés des très petites entreprises, les TPE, c’est-à-dire les entreprises qui emploient moins de onze salariés.
On ne peut appliquer dans ces entreprises les mêmes règles de mesure de l’audience syndicale que dans les établissements de plus grande taille. En effet, ce sont les résultats des élections des délégués du personnel ou des élus au comité d’entreprise qui sont pris en compte dans les entreprises de plus de onze salariés. Or, vous le savez, les salariés des TPE n’élisent pas de représentants du personnel.
La solution proposée consiste à organiser, tous les quatre ans, une élection sur sigles qui permettra aux salariés des TPE de voter pour une étiquette syndicale et d’exprimer ainsi leur soutien à telle ou telle organisation. Les résultats obtenus par les syndicats lors de ce scrutin seront pris en compte pour établir la liste des syndicats représentatifs au niveau national et interprofessionnel et au niveau des branches.
Le projet de loi envisageait par ailleurs la création facultative, par voie d’accord collectif, de commissions paritaires régionales pour les TPE. Ces commissions auraient eu pour mission d’apporter une aide aux salariés et aux employeurs en matière de dialogue social et de veiller à l’application des accords collectifs. Les représentants des salariés au sein de ces commissions auraient été désignés par les syndicats, en tenant compte des résultats du scrutin organisé auprès des salariés des TPE.
Le Sénat, vous vous en souvenez certainement, avait approuvé le principe de la création de ces commissions, après avoir toutefois adopté quelques amendements destinés à bien en préciser le champ d’intervention et les prérogatives.
À l’Assemblée nationale, en revanche, la majorité s’est opposée à la création de ces commissions et a purement et simplement supprimé l’article qui leur était consacré, à savoir l’article 6.
La commission mixte paritaire a donc eu pour tâche principale de rechercher un compromis sur cette question, qui a donné lieu à des débats passionnés et sans doute disproportionnés au regard de la portée, finalement assez modeste, de la mesure proposée.
Avant la réunion de la commission mixte paritaire, j’ai consulté plusieurs organisations patronales et syndicales afin de recueillir leur point de vue. J’ai travaillé en lien étroit avec le rapporteur de l’Assemblée nationale, Dominique Dord, qui a beaucoup contribué à l’élaboration d’une solution consensuelle, acceptable par une majorité de nos collègues députés, ainsi qu’avec le ministre du travail, Éric Woerth, que je remercie de son écoute.
Deux idées directrices ont guidé notre réflexion.
Tout d’abord, il nous a semblé difficile d’imaginer que le scrutin sur sigles organisé auprès des salariés des TPE puisse n’avoir aucun débouché concret. Le risque aurait été trop grand que les salariés ne voient pas l’intérêt de voter et que le taux de participation à ce scrutin soit en conséquence très faible.
En même temps, nous avons voulu répondre aux inquiétudes qui se sont exprimées : beaucoup de chefs d’entreprise redoutaient que les commissions pour les TPE ne soient sources de contraintes et de charges nouvelles et qu’elles ne viennent s’immiscer dans le fonctionnement quotidien de leur entreprise.
Quelle solution avons-nous finalement mise au point ?
Il nous a semblé utile de partir des commissions paritaires territoriales déjà existantes. Depuis 2004, le code du travail prévoit en effet que des commissions paritaires professionnelles ou interprofessionnelles peuvent être instituées, par voie d’accord, au niveau local, départemental ou régional. Ces commissions peuvent négocier des accords collectifs d’intérêt local, examiner les réclamations individuelles et collectives et étudier toute question relative aux conditions d’emploi et de travail des salariés intéressés.
Là où elles ont été mises en place, ces commissions ont souvent joué un rôle utile, reconnu tant par les organisations syndicales que par les organisations d’employeurs. Nous avons donc estimé qu’elles pouvaient fournir un cadre approprié pour examiner, si les partenaires sociaux le souhaitent, les questions propres aux TPE.
Deux aménagements au régime juridique de ces commissions nous sont cependant apparus nécessaires.
D’abord, nous avons précisé que leur composition pourrait tenir compte des résultats de la mesure de l’audience syndicale, afin de donner au vote des salariés un débouché concret.
Ensuite, nous avons souhaité d’accorder une plus grande liberté aux partenaires sociaux pour définir les missions des commissions paritaires : il n’était pas prévu que les commissions pour les TPE aient le pouvoir de négocier des accords collectifs et il n’y avait donc pas de raison d’imposer aux partenaires sociaux une liste de missions préalables.
Ce compromis a été approuvé par la commission mixte paritaire. Il permettra, là où les partenaires sociaux le souhaitent, de créer des commissions qui se spécialiseront dans les problèmes propres aux TPE, sans multiplier pour autant les structures paritaires sur le territoire.
Concernant les autres dispositions du texte restant en discussion, la commission mixte paritaire les a approuvées dans leur rédaction issue de l’Assemblée nationale. Celle-ci avait en effet apporté des précisions utiles qui n’appelaient aucune réserve de notre part.
Je vous demanderai, en conclusion, mes chers collègues, d’approuver le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire, sous réserve de l’adoption d’un amendement de coordination que je vous présenterai dans quelques instants.
Je suis convaincu que le compromis ainsi élaboré nous permet de préserver l’essentiel, loin des caricatures que ce débat a pu susciter, et que l’adoption définitive de ce projet de loi marquera une nouvelle étape sur la voie du renouveau du dialogue social dans notre pays.