Monsieur le ministre, mes chers collègues, mesdames, messieurs, c’est avec une profonde tristesse que j’accomplis pour la première fois devant vous le pénible devoir qui revient au président du Sénat de saluer solennellement dans notre hémicycle la mémoire d’un collègue disparu. (M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)
Je prends aujourd’hui la parole devant notre assemblée réunie pour rendre hommage à notre collègue René Vestri, sénateur des Alpes-Maritimes, qui nous a quittés le 6 février dernier.
Rien ne laissait présager le malaise cardiaque qui l’a frappé dans la nuit précédente et qui lui a été fatal. La veille encore, il avait participé avec beaucoup d’intérêt aux travaux de la commission du développement durable consacrés à la présence médicale sur l’ensemble du territoire et à l’avenir de notre système énergétique, deux thèmes qui lui tenaient particulièrement à cœur et illustraient bien ses préoccupations d’élu de terrain proche de ses concitoyens et sensible aux questions d’environnement.
Le jour même de son malaise, son retard très inhabituel à un petit-déjeuner de travail a permis de donner l’alerte, mais les services de secours dépêchés sur place n’ont pu, hélas, que constater son décès... C’est ainsi avec stupeur et émotion que nous avons appris sa brutale disparition.
Les obsèques de René Vestri ont été célébrées le 9 février en l’église de Saint-Jean-Cap-Ferrat, dont il aura été le premier magistrat durant près de trente ans. Cette cérémonie se déroula dans la simplicité, au milieu de ses proches et de très nombreux Saint-Jeannois. Nos collègues Marc Daunis, membre du bureau du Sénat, et le président Jean-Claude Gaudin, que je remercie, ont tenu à assister à cette émouvante cérémonie.
Cet adieu, au milieu des siens, sur cette terre de Saint-Jean-Cap-Ferrat qui lui était si chère, devait trouver son écho aujourd’hui au Palais du Luxembourg, dans notre hémicycle, en présence de sa famille rassemblée dans nos tribunes.
Avant de devenir le parlementaire actif que nous connaissions, René Vestri fut d’abord un homme de convictions et un élu local passionné.
René Vestri avait fait son entrée au Sénat en septembre 2008 pour représenter son département de naissance des Alpes-Maritimes. Son élection à la Haute Assemblée couronnait une longue carrière d’élu local au service de son village, devenu l’un des lieux de villégiature les plus recherchés du littoral méditerranéen.
Issu d’une famille modeste, il n’hésitait pas à rappeler que son père avait été maçon et que sa mère ramassait des olives… Ayant très tôt commencé à travailler comme terrassier, il avait lui-même développé avec succès une entreprise de travaux publics, connaissant une incontestable réussite professionnelle grâce à sa détermination et à sa force de travail.
René Vestri avait parallèlement décidé de mettre son énergie et ses compétences au service de la collectivité. L’enracinement local, le sens des responsabilités et la force de ses convictions personnelles le conduisirent naturellement à s’engager dans la vie politique locale pour la défense de ses idées et de ses concitoyens. Dès 1983, il décidait de se présenter aux élections municipales à Saint-Jean-Cap-Ferrat. Élu sans interruption, il aura été le maire de l’une des plus belles communes de France, dont il défendit les intérêts jusqu’à son dernier souffle.
René Vestri aura toujours su garder un contact très étroit et chaleureux avec les Saint-Jeannois, qui, sans interruption, lui ont renouvelé leur confiance durant trois décennies.
Son engagement politique et son ancrage local le conduisirent aussi à participer aux élections cantonales en 1985, pour y représenter le canton de Villefranche-sur-Mer. Une nouvelle fois élu, il conserve ce mandat jusqu’en 2011 et exerce même, de 2004 à 2008, les fonctions de vice-président du conseil général, chargé de la façade maritime. Il fut également vice-président de la communauté urbaine Nice-Côte d’Azur de 2008 à 2011.
Même si la vie politique n’est pas toujours « un long fleuve tranquille », jamais elle n’entama la détermination de René Vestri, qui se plaisait à rappeler que « tout ce qui ne tue pas rend plus fort » et qui réagissait toujours en allant de l’avant face aux difficultés.
C’est, je l’ai dit, en 2008 qu’il décide de briguer l’un des cinq sièges de sénateur des Alpes-Maritimes en présentant une liste dénommée « Mer et montagne 06 », manifestant ainsi clairement son intérêt pour les questions environnementales et d’aménagement du territoire. C’est sous cette bannière qu’il fait son entrée dans notre hémicycle, au sein du groupe UMP.
Il choisit d’abord de rejoindre la commission des affaires sociales, avant de devenir membre de la commission de l’économie en octobre 2010. Son attention pour les questions d’environnement et d’aménagement du territoire le conduit enfin tout naturellement à rejoindre la nouvelle commission du développement durable, dès la création de notre septième commission permanente, en février 2012.
René Vestri met également son expérience d’élu local au service de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation et participe aux travaux de la délégation à la prospective, ainsi qu’à ceux du groupe de travail « mer et littoral ».
Sa passion pour l’univers marin et, tout particulièrement, pour la Méditerranée, René Vestri l’aura portée tout au long de sa carrière d’élu. Il milita pour la préservation de l’environnement en Méditerranée et pour la défense des espèces menacées qui vivent dans cet espace privilégié.
En 1989, s’indignant de l’indifférence dans laquelle sont décimées certaines espèces animales, notamment les dauphins, il décide de créer l’association SOS Grand Bleu. Dix ans plus tard, il aura la satisfaction de voir aboutir le projet Pelagos tendant à la création d’un espace maritime protégé de plus de 87 500 kilomètres carrés au large des côtes de la Corse.
Son action locale en faveur de la protection de la mer, René Vestri la relaie aussi au Sénat, en s’exprimant en faveur de la ratification de conventions internationales de défense des espèces menacées telles que le thon rouge ou lors des débats sur l’organisation de la politique de gestion des ressources halieutiques.
Lors des débats sur le Grenelle de l’environnement, il expose, avec conviction, tout l’intérêt d’une meilleure implication de nos concitoyens dans la lutte contre les pollutions marines.
Notre collègue ne méconnaissait pas pour autant les nécessités du développement économique de sa région et des activités maritimes qui la caractérisent. Il participa ainsi aux travaux de la mission sur la réforme portuaire, sans jamais toutefois perdre de vue la défense de l’environnement, essentielle à ses yeux.
Toujours tourné vers l’avenir, René Vestri était aussi persuadé que l’éducation des jeunes constitue un vecteur indispensable à la préservation de l’environnement. Il s’impliqua ainsi dans la création d’une école départementale de la mer, dont il était particulièrement fier, et qui permet chaque année à plus de 1 500 enfants du département des Alpes-Maritimes de découvrir leur environnement naturel proche et d’apprendre à le préserver.
Ses préoccupations en faveur de la préservation du domaine maritime l’avaient conduit à devenir membre, en décembre 2011, du Conseil national de la mer et des littoraux.
Désireux de convaincre ses interlocuteurs, René Vestri était soucieux de partager ses préoccupations dans les cadres les plus variés. Il se plaisait ainsi à échanger sur l’avenir de la Méditerranée avec ses collègues des groupes d’amitié France-Italie ou France-Monaco. Mais son intérêt pour les affaires internationales allait bien au-delà de notre région méditerranéenne.
Mes chers collègues, la disparition de René Vestri nous a tous laissés stupéfaits par son caractère brutal et soudain. Les sénatrices et les sénateurs perdent en sa personne un collègue chaleureux, qui restera longtemps présent dans leur mémoire.
L’heure est aujourd’hui au recueillement.
À ses collègues du groupe UMP, éprouvés par sa disparition, aux membres de la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, à laquelle il appartenait, j’adresse les sincères condoléances de la Haute Assemblée.
À vous particulièrement, madame, à vos filles Olivia et Marjorie, et à tous les vôtres, je renouvelle les condoléances très sincères de l’ensemble des sénatrices et des sénateurs et vous assure de ma profonde sympathie.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous invite maintenant à partager un moment de recueillement à la mémoire de René Vestri.