Monsieur le ministre, lors de notre entretien, vous aviez souligné que le projet de loi retardait jusqu’à 67 ans l’âge de la liquidation à taux plein, mais qu’il maintenait à 65 ans l’âge d’obtention du minimum vieillesse.
Il s’agit là d’une importante mesure correctrice qui s’ajoute à celles qui sont explicitement prévues par le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale. Ces dernières ont été, pour l’essentiel, maintenues par la commission des affaires sociales. Compte tenu de la persistance des écarts de retraite, la délégation a recensé et approuvé ces correctifs. J’en citerai brièvement quatre.
Par l’article 23 du projet de loi, le régime transitoire est assoupli avant l’extinction du départ anticipé pour les fonctionnaires parents de trois enfants ayant quinze ans de service.
L’article 30 améliore la prise en compte du congé de maternité pour les droits à la retraite.
Par ailleurs, l’assurance veuvage est rétablie par l’article 29 bis. À ce sujet, les représentants de la FAVEC, la Fédération des associations de conjoints survivants, nous ont confirmé que cette assurance comportait une garantie de ressources mieux adaptée que la réversion à la situation des jeunes veuves ou veufs. Ils ont cependant exhorté les pouvoirs publics à modifier son montant, qui se limite aujourd’hui à 570 euros, pour le hisser à un « niveau de survie » qui permettrait de lutter contre la paupérisation de nombreuses jeunes veuves.
En outre, ils ont plaidé, comme beaucoup d’intervenants auditionnés sur la présente réforme, pour la suppression ou le rehaussement du plafond de ressources, qui interdit le cumul d’une pension de réversion du régime général de base et d’un revenu d’activité, ce qui peut dissuader le retour à l’emploi. L’ensemble de ces préoccupations est largement pris en compte dans les recommandations que je vous soumets, mes chers collègues, au nom de la délégation.
Je rappelle également que la délégation a approuvé l’inscription, à l’article 1er du texte adopté par l’Assemblée nationale, du principe de l’annulation des écarts de retraite entre femmes et hommes à l’horizon 2018, principe qui doit faire l’objet d’un suivi par le comité de pilotage des organismes de retraite.
Je note que la commission des affaires sociales a transformé l’architecture du projet de loi, en séparant, d’une part, les objectifs de notre système de retraite et, d’autre part, les modalités d’intervention du comité de pilotage des organismes de retraite, faisant ainsi disparaître la mention littérale de cet objectif, tout en prenant en considération la nécessité de limiter les simples déclarations d’intention dans notre législation.
Il m’appartient ici de rappeler combien la délégation est attachée à la réduction des écarts de rémunération et de pensions entre femmes et hommes.
Nos recommandations sont la traduction de trois grandes idées.
Premièrement, en analysant la situation actuelle des retraités et la dynamique future de notre système de retraites, on constate que les inégalités de rémunérations sont et ont vocation à rester le principal moteur des inégalités de retraites entre femmes et hommes.
Votre délégation en tire deux conclusions.
Elle a approuvé la nouvelle rédaction, adoptée par l’Assemblée nationale, de l’article 31, relatif à la sanction financière des entreprises ne respectant pas leurs obligations en matière d’égalité professionnelle, tout en regrettant que ces pénalités, envisagées dès 2006, n’aient pas été introduites dans la loi plus tôt.
Le texte adopté par l’Assemblée nationale « muscle » le dispositif, et met à la charge des entreprises, en matière d’égalité professionnelle et salariale, une obligation de résultat et non plus seulement de moyens, en substituant à la sanction du défaut de rapport de situation comparée une sanction applicable aux entreprises non couvertes par un accord sur l’égalité professionnelle ou, à défaut d’accord, par un plan unilatéral de réduction des inégalités.
Cette approbation est assortie de deux remarques.
La délégation souhaite que le Gouvernement – conformément à ce que vous nous avez dit, monsieur le ministre, lors de notre rencontre – puisse présenter, dans les meilleurs délais, un projet de loi sur l’égalité professionnelle et salariale. Celui-ci permettrait, en particulier, de simplifier le code du travail en fusionnant les deux filières de négociation, qui se sont additionnées dans la législation actuelle, l’une ayant trait à l’égalité professionnelle, l’autre aux écarts de rémunération.
S’agissant du dispositif inscrit à l’article 31 du projet de loi, nous invitons en outre le Gouvernement à définir, sur le plan réglementaire, des critères précis et opérationnels permettant de mesurer « les efforts constatés dans l’entreprise en matière d’égalité professionnelle ».
Je note enfin que la commission des affaires sociales n’a pas modifié l’essentiel de ce dispositif, tout en s’efforçant de simplifier et rendre plus efficace la publicité du plan d’action pour l’égalité professionnelle élaboré dans l’entreprise.
Deuxièmement, concernant l’amélioration de la prise en compte du temps partiel, la délégation a tout d’abord approuvé l’article 31 bis du texte, qui vise à mieux sensibiliser les employeurs et les salariés à la possibilité offerte par le droit en vigueur de surcotiser à l’assurance vieillesse en cas de temps partiel.
La délégation recommande également de déterminer le salaire de référence en calculant la moyenne des cent meilleurs trimestres, plutôt que celle des vingt-cinq dernières années. Cette approche plus fine dans la prise en compte des périodes de travail effectuées permettrait de réduire les handicaps résultant principalement pour les femmes, mais aussi pour les hommes, de carrières morcelées et du temps partiel.
Enfin, la troisième grande préoccupation de la délégation est de prendre en compte un certain nombre d’inégalités de fait, tout en respectant le cadre juridique communautaire qui s’impose au législateur.
S’agissant de la possibilité de fixer un âge de retraite différent pour les femmes et les hommes, on constate une tendance générale à l’alignement, et seuls quelques pays de l’Union européenne ont prévu, d’ici à 2020, de maintenir un âge légal de départ en retraite plus précoce pour les femmes que pour les hommes dans le régime général.
La délégation, se fondant sur cette analyse, préconise le maintien à 65 ans de l’âge de départ à la retraite à taux plein pour les personnes ayant interrompu leur activité professionnelle pour éduquer leurs enfants ou apporter des soins à un membre de leur famille handicapé, dépendant ou malade.