Intervention de Pierre-Yves Collombat

Réunion du 20 mars 2013 à 14h30
Séparation et régulation des activités bancaires — Discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Pierre-Yves CollombatPierre-Yves Collombat :

Entre 2011 et 2012, donc en pleine crise, ses actifs financiers spéculatifs augmentent de 130 milliards d'euros, soit de 26, 5 %. Dans le même temps, les prêts baissent de 70 milliards d’euros, soit de 21 %. Baissent également les capitaux propres, qui n’atteignent même plus 2, 5 %, ce qui n’empêche pas le matelas des produits dérivés d’augmenter de 70 milliards d’euros, soit de 20 % !

Durant la crise, la fête spéculative continue !

Le véritable enjeu est donc non pas de séparer les activités bancaires utiles à l’économie réelle et celles qui ne le seraient pas, comme le prévoit le projet de loi, mais bien d’éviter que la prochaine crise systémique n’entraîne l’État et les déposants dans la débâcle de ceux qui l’auront provoquée, les chiffres cités parlent d’eux-mêmes. Je ne dis pas « éviter la crise », car bien malin qui dira comment y parvenir, mais éviter que, de catastrophe, elle ne tourne au cataclysme.

Comment ? Tout d’abord en séparant les banques de dépôts des banques d’investissement. Les auteurs du projet de loi préfèrent, eux, la filialisation d’une partie infime - quelques pour cent, selon les premiers intéressés -, des activités de marché des banques universelles, ce qui non seulement ôte tout intérêt au texte, mais aggrave la situation en créant une fausse impression de sécurité.

Or, en l’état actuel du texte, les difficultés des filiales directes pourront se transmettre à la maison mère. Vous me direz que, si elles n’en représentent qu’un à deux pour cent, ce n’est pas bien grave !

Contrairement à ce que l’on entend dire, une telle séparation serait bénéfique pour les banques de dépôts qui, délestées des risques inhérents à leurs activités spéculatives, pourraient se refinancer à meilleur compte. Contrairement aussi à ce qui se colporte ici ou là, la taille des établissements d’investissement français issus de cette séparation les rendrait très concurrentiels.

BNP-Paribas Investissement, c’est 830 milliards d’euros, plus que Goldman Sachs, première banque d’investissement américaine, qui pèse 740 milliards d’euros à la fin de 2011. Pour les seconds rôles, Goldman Sachs et Morgan Stanley, les chiffres sont respectivement de 524 milliards d’euros et 600 milliards d’euros, soit des ordres de grandeur très comparables.

Séparer strictement les établissements de crédit des banques d’investissement est donc non seulement une obligation de prudence, c’est aussi souhaitable pour le système bancaire lui-même et c’est donc parfaitement viable ! De là découle la série d’amendements que nous avons déposés pour palier les étonnantes déficiences de ce projet de loi.

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