Intervention de Éric Bocquet

Réunion du 20 mars 2013 à 14h30
Séparation et régulation des activités bancaires — Article 1er A

Photo de Éric BocquetÉric Bocquet :

Cet article liminaire, de portée quasiment déclarative, appelle quelques observations de notre part. Si l’on en croit ses termes, il s’agit d’analyser la compétitivité de notre secteur financier et bancaire au regard de la concurrence, prioritairement américaine et européenne.

C’est cette sorte d’ethnocentrisme économique qu’il nous faudrait éviter à l’avenir. Les marchés financiers n’ont pas forcément de visage et constituent l’ennemi dont tout gouvernement devrait se méfier. Le fait est qu’ils ont connu, ces dernières années, une évolution sensible. Nous avons ainsi vu apparaître de nouveaux acteurs, les fonds souverains, émanations de certaines monarchies du Golfe ou de pays émergents dont les capacités financières sont parfois largement aussi importantes que celles de certaines banques privées européennes.

Le milieu bancaire connaît aussi d’autres acteurs, singulièrement dans les pays émergents. En 2011, parmi les cinquante premières banques mondiales en termes de résultat net, on trouvait treize banques chinoises, quatre banques brésiliennes, deux banques russes, une banque hongkongaise et un établissement singapourien. Ajoutons-y, pour faire bonne mesure, trois banques japonaises et quatre banques australiennes : nous sommes face à un paysage financier et bancaire international quelque peu polycentrique. De surcroît, toujours en 2011, les quatre premières banques au monde étaient chinoises ; la présence de ces établissements parmi les cinquante principales banques mondiales est particulièrement significative.

La France n’a sans doute pas à rougir de la douzième position qu’occupe le groupe BNP-Paribas dans ce classement, même si son résultat s’est affaissé en 2012. Si le total de bilan est important – pratiquement 2 000 milliards d’euros, soit l’équivalent du PIB marchand de la France –, la capitalisation du groupe – environ 85 milliards d’euros – est considérée comme insuffisante. Cela étant, la question de la compétitivité de nos établissements de crédit est problématique ; il faut d’abord savoir ce que l’on entend par compétitivité.

Nous pouvons attendre du rapport prévu par ce projet de loi qu’il nous permette de faire le tri entre les activités spéculatives et les activités dites « utiles » de nos établissements de crédit : utiles du point de vue de ce que l’on appelle un peu abusivement l’« économie réelle », alors même que, dans le système libéral, la réalité économique recouvre aussi l’industrie et l’activité financières.

Il me semble que l’utilité de notre secteur financier se mesurera pleinement à l’aune de l’implication de celui-ci dans le développement de l’activité, dans la croissance économique, dans le recul tant attendu de notre taux de chômage et de la précarité de l’emploi.

L’objectif n’est pas forcément que nos banques n’aient pas à rougir de la comparaison avec les établissements de crédit américains, qui vont se voir appliquer la Volcker Rule, ou avec les banques britanniques, qui devront prendre en compte les recommandations du dispositif Vickers ; l’essentiel est qu’elles deviennent ou redeviennent les partenaires de l’essor économique, de l’activité, de la croissance des entreprises, des projets des ménages salariés.

Nous attendons de nos banques qu’elles rendent à nouveau le service qu’en attendent les entreprises et les citoyens dans une économie moderne : rien de plus, rien de moins.

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