Ces amendements relatifs à la tenue de marché sont essentiels.
La principale critique adressée au dispositif du projet de loi tel qu’il est issu des travaux de l’Assemblée nationale est qu’il n’opère guère, en pratique, la séparation des activités, comme ont d’ailleurs pu le souligner un certain nombre d’acteurs du secteur bancaire, évoquant une filialisation forcée d’une part négligeable de leur activité.
D’autres amendements déposés sur l’article 1er, notamment les amendements n° 36 rectifié et 219, mettent en exergue une volonté de marquer plus nettement la séparation entre banques de détail et banques d’investissement, allant jusqu’à prévoir une distinction comptable du capital dont la pertinence est, au fond, assez discutable ; mais là n’est pas le propos.
Je ne peux que rappeler, s’agissant de la tenue de marché, ce que nous disait la professeure Laurence Scialom lors de la table ronde de la commission des finances tenue le 30 janvier dernier :
« Dans le projet de loi actuel, les dérivés de crédit, du fait de la définition de ce qui constitue une opération utile, ne sont pas du tout touchés par la filialisation. Or, ce sont les dérivés de crédit qui font l’interconnexion dans le système et ont connu une progression totalement déconnectée de l’économie réelle. J’aurais beaucoup de mal à croire que les 750 milliards d’euros de dérivés de crédit qui se trouvent au bilan de BNP-Paribas y sont uniquement pour le financement de l’économie.
« Le projet de loi ne répond pas à ces risques. L’article 1er est à la fois son cœur et son talon d’Achille. Les autres articles seront efficaces seulement si la filialisation est étendue à la tenue de marché, comme le préconise le rapport Liikanen. Il faut une simplification de la structure des groupes bancaires et une autonomie des activités. Une véritable réforme de la structure des banques passe obligatoirement par là et est indispensable pour protéger la communauté nationale des risques que je viens de décrire. Cela est d’autant plus important que la situation des finances publiques ne nous permet plus aujourd’hui de faire face à une crise bancaire du type de celle de 2007. La crise de la dette souveraine en Europe est largement le résultat de la crise financière. Nous ne pourrions plus, en l’état actuel, soutenir nos banques universelles. Si nous ne procédons pas à une véritable réforme structurelle, nous pourrons dire que nous avons souffert du syndrome des “ habits neufs de l’Empereur ”, en référence au conte d’Andersen : le roi est nu, mais personne n’ose le dire. »
En vertu de ces observations tout à fait judicieuses, je vous invite, mes chers collègues, à adopter l’amendement n° 74.