En fait, on peut même se demander si derrière ce brouillard de mots et plusieurs articles consacrés au sujet, au lieu d’une reconnaissance de la pénibilité, l’on n’est pas plutôt en présence d’un début de contournement de la législation relative aux accidents du travail et maladies professionnelles, ou AT-MP.
En effet, le système proposé, qu’il s’agisse de la prévention ou de la réparation conditionnée par une incapacité permanente de 10 %, est un « copié-collé » de celui qui concerne les AT-MP, et notamment les maladies professionnelles. Le texte du projet de loi emploie d’ailleurs plusieurs fois l’expression « exposition aux risques professionnels », utilisée habituellement dans la législation relative aux AT-MP, et non les mots « exposition à des travaux ou situations pénibles ». Il ne saurait s’agir d’un hasard.
Au lieu d’être assorti de la désagréable obligation de réintégration et de reclassement après que la maladie a été reconnue, le dispositif proposé prévoit, pour des salariés usés, des sorties progressives par temps partiel ou tutorat, et des compensations en temps et en numéraire.
De plus, rien n’est prévu pour les maladies à effet différé, dont l’explosion a commencé et va se poursuivre, ce qui engendrera à terme des coûts importants. Le projet de loi ne comporte donc pas vraiment une reconnaissance de la pénibilité, mais une anticipation des désagréments qui pourraient en résulter pour l’employeur, particulièrement si sa faute inexcusable était reconnue pour manquement à son obligation de résultat pour la santé et la sécurité des salariés.
Cet aspect de l’évolution du droit en la matière appelle au moins la vigilance, et ce d’autant plus que la France se distingue assez largement en Europe par son retard dans la prévention de l’usure au travail.