L’article 5 du projet de loi est l’un des articles déterminants du texte, s’agissant notamment de la composition de la nouvelle autorité de contrôle prudentiel, dont les missions vont être élargies et les pouvoirs de sanction quelque peu renforcés, comme nous le verrons avec l’article 7. Nous avons souligné, hier, cette avancée.
À la vérité, nous sommes toujours circonspects dès lors qu’une partie des prérogatives naturelles du pouvoir législatif ou du pouvoir politique, légitimes et démocratiquement élus, est confiée à une autorité indépendante.
D’une certaine manière, la nouvelle autorité de contrôle prudentiel et de résolution participe de ce lent mais sûr démantèlement des champs d’intervention du pouvoir politique qui a accompagné une bonne partie de l’évolution des choses dans l’appréhension de bien des domaines de la vie sociale, qu’il s’agisse par exemple des questions sanitaires, avec la Haute Autorité de santé, des questions éthiques, du fonctionnement du secteur de l’audiovisuel ou de l’ensemble des secteurs d’activité et de production ouverts à la concurrence par la voie des directives européennes et pour lesquels l’arbitrage a été confié à une autorité administrative indépendante.
Cependant, dans le cas qui nous préoccupe, plusieurs observations essentielles doivent être formulées.
Le recrutement des membres de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution est pour le moins restreint, puisqu’aux côtés des hauts magistrats habituels, issus des grandes juridictions du pays, il est limité aux « professionnels de la profession ».
Alors même que la nouvelle ACPR va s’occuper de la garantie des dépôts, question essentielle au regard de la relation que les particuliers peuvent entretenir avec leur banque – on peut le dire d’autant plus aisément que se développe depuis quelques jours la controverse sur le traitement par l’Europe de la crise chypriote –, nous ne trouvons aucune trace, dans la composition du collège, et a fortiori dans les commissions spécialisées, d’une représentation des usagers du secteur bancaire, pas plus d’ailleurs que des salariés de ce même secteur.
Que les concepteurs originaux de l’autorité de régulation n’aient pas jugé utile que la société civile, dans sa diversité, soit justement représentée au sein du collège est une chose, mais que le projet de loi, en l’état, oublie quelque peu cette exigence de représentation et de transparence n’est pas acceptable et doit donc être corrigé.
L’autorité de régulation a beaucoup à gagner à éviter d’être assimilée, comme cela est à craindre, à un cercle d’initiés où l’on se retrouve « entre soi », pour parfois « laver son linge sale en famille », à l’abri des regards indiscrets.
Les événements qui se sont produits depuis 2007 sur les marchés financiers, la connaissance approfondie des errements des établissements bancaires que le grand public a fini par acquérir sont autant de facteurs qui justifient pleinement que nous franchissions l’étape de la démocratie et de la transparence en ce qui concerne le contrôle prudentiel des établissements de crédit, des compagnies d’assurance et des activités financières en général.
C’est à l’aune de ces observations que nous nous positionnerons dans le cadre de la discussion de cet article essentiel du projet de loi.