Intervention de Éric Bocquet

Réunion du 21 mars 2013 à 15h00
Séparation et régulation des activités bancaires — Article 7

Photo de Éric BocquetÉric Bocquet :

Cet article porte sur l’une des questions essentielles posées par le contrôle prudentiel des établissements de crédit, celle de la réalité des sanctions qui pourront être prises, selon la gravité des situations qui aura été relevée par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

L’éventail des opérations de contrôle et de sanction que peut prendre l’Autorité indépendante est globalement renforcé par cet article 7, et l’échelle des mesures prises est fixée avec relativement de précision et de sérieux.

Faisons une remarque d’emblée, qui n’est pas qu’incidente.

On pourrait s’étonner que les mesures de résolution ne prévoient qu’assez peu de moyens pour assurer la garantie des dépôts, ce qui constitue sans doute la préoccupation essentielle des usagers des banques, et tentent surtout de repousser autant que faire se peut toute démarche mobilisant des fonds publics, privilégiant de fait le financement interne des dispositifs éventuels de redressement.

Avec ce texte, nous sortons donc a priori du schéma privilégié ces dernières années qui, la plupart du temps, a consisté à solliciter les puissances publiques pour résoudre les crises de liquidité qu’ont traversées les marchés financiers, en particulier les établissements de crédit.

Pour autant, il nous semble que l’une des questions qui n’est pas encore résolue se pose directement dans le cadre de cet article relatif aux procédures de résolution.

Depuis la loi bancaire de 1984, et singulièrement depuis l’alternance politique de 1986, notre secteur financier a connu de profondes transformations, conduisant à la privatisation forcenée de l’essentiel des établissements de crédit, qu’il s’agisse des banques nationalisées en 1981 comme des entités historiques de la Libération. Cette privatisation est allée de pair avec des changements de structure assez fondamentaux au sein des établissements à statut particulier, comme l’a montré, par exemple, la fusion entre les Banques populaires et les Caisses d’épargne telle qu’elle a été mise en œuvre sous la législature précédente.

Observons d'ailleurs qu'aucune disposition du texte n’est venue mettre en question la loi de fusion et que le Groupe BPCE a quelque peu anticipé la séparation des activités bancaires en détachant Natixis de l’ensemble BPCE.

Pour autant, et cela en surprendra certains, dans ce maelström de la privatisation du secteur financier, quels sont les établissements considérés comme les plus sûrs du monde, ceux dans lesquels le risque systémique est faible ? Étonnamment, il s’agit d’établissements dont le caractère public est plus ou moins clairement affirmé, c’est-à-dire qui assurent pour l’essentiel des missions d’intérêt général.

En tête de gondole – si je puis dire – du classement établi par le magazine Global Finance, référence en la matière, la banque allemande KfW, Kreditanstalt für Wiederaufbau, littéralement Établissement de crédit pour la reconstruction, dont nous avions eu l’occasion de parler lors de l’examen du projet de loi relatif à la création de la Banque publique d’investissement et qui constitue la référence en la matière.

La KfW devance la banque néerlandaise BNG, Bank Nederlandse Gemeenten, littéralement Banque néerlandaise des communes, c’est-à-dire l’établissement finançant les investissements des collectivités locales aux Pays-Bas.

En troisième position se trouve la Zürcher Kantonalbank, Banque cantonale de Zurich, entité placée sous le contrôle direct et la supervision du conseil cantonal de Zurich.

Suivent les deux institutions spécialisées que constituent la Landwirtschaftliche Rentenbank et la Landesbank Baden-Württemberg, deux établissements de propriété publique intervenant l’un dans le champ du financement des activités agricoles et agroalimentaires, l’autre dans celui de l’économie générale, singulièrement dans la partie sud de l’Allemagne.

Arrive ensuite notre bonne vieille Caisse des dépôts et consignations, dont les activités, celles de la Section générale en fait, sont suffisamment sérieusement conduites pour que l’établissement, placé sous le contrôle des parlementaires, figure en bonne position dans cette liste des établissements « sûrs ».

La suite du classement publié par Global Finance continue d’égréner les entités publiques, avec des noms aussi surprenants que la Nederlandse Waterschapsbank N.V., qui ressemble quelque peu à la structure que d’aucuns souhaiteraient mettre en place dans notre pays pour le financement local, DBS, la Banque de développement de Singapour, ou la Caisse centrale Desjardins, sorte de Caisse d’épargne version canadienne. Quel tour du monde ! §

La première banque privée figurant dans la liste est la Rabobank néerlandaise, même s’il convient de rappeler que cette structure présente un caractère coopératif.

La première banque française privée figurant dans ce classement est la Banque fédérative du Crédit mutuel, structure particulière du point de vue de l’actionnariat et de l’organisation, classée en 36e position, devant La Banque Postale en 43e position et BNP Paribas en 47e position.

Ces statistiques ne sont pas inintéressantes.

Nous sommes donc en présence d’un univers financier où la plupart des grands établissements privés, européens ou américains, portent en eux-mêmes l’essentiel des risques systémiques et où, la plupart du temps, les circuits de financement du développement local et de la finance au service de l’économie – ménages, collectivités ou entreprises – font la démonstration de leur qualité.

Nous ne pouvions que souligner cet aspect à ce stade du débat.

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