Intervention de Pierre Moscovici

Réunion du 21 mars 2013 à 15h00
Séparation et régulation des activités bancaires — Article 7

Pierre Moscovici, ministre :

Je partage l’avis de M. le rapporteur.

Je soutiens moi aussi la philosophie de ces amendements, mais il me semble que l’inscription de ces mesures dans la loi n’est pas souhaitable à ce stade.

Premièrement, l’implication des créanciers seniors, c’est-à-dire les créanciers obligataires ne bénéficiant d’aucune garantie particulière, mais aussi des dépôts, est en cours de discussion au niveau européen dans le cadre de la directive « résolution ». Il me paraît donc plus sage d’attendre que les choses se consolident à Bruxelles.

Deuxièmement, si j’ai eu l’occasion d’affirmer publiquement, lors des débats à l’Assemblée nationale, en commission des finances comme en séance, que la France soutenait l’implication des créanciers seniors dans le processus de résolution, il ne me semble pas pour autant souhaitable d’inclure dès à présent cette disposition dans la loi, pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, attendons le consensus européen sur le périmètre du bail-in, sans aller au-delà de ce qui figure à ce stade dans le projet de loi. Ces débats européens, auxquels je participe, sont loin d’être stabilisés et il me paraît donc plus prudent d’attendre l’adoption de la directive.

Ensuite, le projet de directive lui-même prévoit des exceptions à l’endroit des dépôts couverts par des garanties afin de protéger les déposants et d’éviter les risques de panique ou de run, encore illustrés par les événements survenus récemment.

Ces exceptions sont nécessaires pour la stabilité financière et la protection des déposants et nous devons les prendre en compte.

Enfin, cette disposition peut avoir un effet important sur l’accès des banques au financement et sur son coût. Il faut prendre en compte l’impact d’une telle mesure sur le financement des banques, et donc sur le financement de l’économie.

À cet égard, mon souci est toujours le même : oui, réformer, contrôler, réguler, maîtriser, mais ne pas pénaliser unilatéralement le financement de l’économie française.

Le dispositif de directive lui-même prévoit un dispositif spécifique pour l’entrée en vigueur du bail-in. Le report à 2018 doit permettre de prendre en compte ses effets possibles sur le financement bancaire, car nous ne sommes pas en mesure de le prévoir immédiatement.

Dans le cadre des négociations en cours sur le projet de directive, nous participons activement aux travaux pour trouver rapidement un consensus sur ce sujet sensible. Je souhaite que la directive retienne un périmètre large, tout en reconnaissant des exceptions nécessaires pour la stabilité financière, notamment en excluant les dépôts des particuliers.

Sous le bénéfice de ces explications, je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, à retirer ces trois amendements. À défaut, et même si le Sénat est une assemblée sage, par définition, je dirais que ma sagesse est peut-être encore plus négative que la vôtre, monsieur le rapporteur.

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