Intervention de André Gattolin

Réunion du 28 mars 2013 à 9h00
Journée nationale de la résistance — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Elle ne traduit aucune intention de récupération politique d’un événement ou d’une période historique. Elle ne s’inscrit pas non plus dans une perspective de nature nationaliste ou cocardière, tant l’évocation de la Résistance renvoie automatiquement et en parallèle au passé collaborationniste d’une partie de notre pays à la même époque. Et « notre » Résistance renvoie aussi et naturellement à toutes les composantes extranationales qui y participèrent, ainsi qu’aux résistances antitotalitaires qui virent le jour à la même époque dans de nombreux pays d’Europe, Allemagne comprise.

Cette journée n’est pas non plus un nouveau jour férié ou chômé dans un calendrier déjà chargé en la matière au printemps. Non, c’est d’abord un jour intense de travail de mémoire mis au service du présent pour aider les jeunes générations à mieux s’approprier leur avenir de personne libre et de futur citoyen.

Le choix d’une date pour ce type de journée est souvent délicat et suspecté d’une volonté de donner une orientation partisane particulière à l’événement consacré.

Deux possibilités s’offraient à nous : celle du 27 mai 1943, marquant la première réunion du Conseil national de la Résistance, le CNR, et celle du 15 mars 1944, jour d’adoption du premier programme dudit CNR. C’est la première date qui a été retenue, et ce choix est, à mon sens, judicieux à un double titre.

Tout d’abord, il est judicieux parce que Jean Moulin, la cheville ouvrière du CNR, était à l’époque bel et bien vivant, ce qui n’était plus le cas le 15 mars 1944.

Ensuite, il l’est également, de manière plus prosaïque, parce que cette date se situe en dehors des périodes de vacances scolaires. Or l’objet premier de cette journée est précisément de sensibiliser nos enfants à cette période de notre histoire récente et ô combien porteuse de valeurs civiques à préserver et à entretenir.

Cependant se pose une question : ce débat sur les valeurs de la Résistance doit-il rester limité à l’enceinte des écoles ? Si la discussion ne se fait pas aussi dans d’autres lieux, comment combattre efficacement les idées populistes et démagogiques qui se développent aujourd'hui en France et en Europe ? Le 27 mai doit être un jour permettant à toutes et à tous d’y réfléchir.

Au titre des améliorations que je propose, il conviendrait de dépasser une autre limite.

En effet, cette célébration intelligente et judicieuse ne doit pas être limitée dans les écoles au seul champ des cours d’histoire, de géographie et d’éducation civique. Les thèmes de la Résistance peuvent également être abordés pendant les cours de français, de langues étrangères ou encore d’arts, de poésie et de philosophie. Ne serait-ce pas l’occasion de découvrir les écrits de Jacques Decour, les peintures d’André Girard, fondateur du réseau Carte, les poèmes sublimes de René Char dans son recueil intitulé Feuillets d’Hypnos ou encore Le Chant des Marais du musicien allemand Rudi Goguel, œuvre née dans l’univers concentrationnaire de Börgermoor ?

Pour donner toute son actualité à cette réflexion, il serait également souhaitable de diffuser et d’étudier l’Appel des Résistants aux jeunes générations, cet appel formidable et trop peu connu lancé, le 8 mars 2004, par les grands résistants que j’ai évoqués au début de mon intervention et qui ont aujourd'hui, pour la plupart, disparu.

Ce texte est un passage de témoin. L’ensemble des acteurs de la vie publique, mais aussi les simples citoyens, les exploités et les humiliés sont appelés à ne pas démissionner et à ne pas se laisser impressionner par les dérives du temps présent qui menacent la paix et la démocratie.

Les remarques que je viens de formuler ne viennent évidemment ébranler en rien le soutien que le groupe écologiste accorde à cette proposition de loi : il votera à l’unanimité en sa faveur. §

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