Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi pour une fiscalité numérique neutre et équitable, présentée par Philippe Marini, a le mérite de rappeler la nécessité de l’équité fiscale, alors que les grands groupes de l’Internet, tels que Google, Apple, Facebook, Amazon ou eBay, ne paient pas, ou quasiment pas, l’impôt sur les sociétés en France, parce qu’ils ont fait le choix de s’établir en Irlande ou au Luxembourg.
Ces entreprises dissocient presque systématiquement leur lieu d’établissement des lieux de consommation. Comme l’indique le rapport commandé par le Gouvernement à MM. Pierre Collin et Nicolas Colin, ces entreprises « sont d’emblée organisées en vue de tirer le meilleur parti des différences de systèmes fiscaux ». En conséquence, il est difficile de fiscaliser leurs bénéfices.
Ainsi, le texte de Philippe Marini vise à instaurer une taxe sur la publicité en ligne et une autre taxe sur les services de commerce électronique, dans le cadre d’une obligation de déclaration d’activité pour les acteurs de services en ligne basés à l’étranger.
Ces propositions s’inscrivent dans une logique d’équité fiscale, dans la mesure où les acteurs de l’économie numérique établis en France, et soumis à l’impôt, sont concurrencés par des sites internet basés à l’étranger, qui ne supportent ni les mêmes charges fiscales en matière de TVA et d’impôt sur les sociétés ni les taxations spécifiques à la France, et destinées à financer les réseaux ou encore l’audiovisuel public.
Assujettir les sites internet basés à l’étranger à la fiscalité présenterait, en outre, le grand intérêt d’augmenter les recettes fiscales, dans une période où les contraintes budgétaires sont très fortes et où l’État doit pourtant faire face à des dépenses d’investissement essentielles. Je pense en particulier à la couverture de l’ensemble du territoire par le très haut débit, action majeure pour laquelle le Gouvernement vient de présenter une feuille de route pour les dix ans à venir. Il y est prévu que l’État apporte trois milliards d’euros, sur l’ensemble de la période, pour aider les collectivités locales à déployer des réseaux de communication électronique dans les secteurs les moins denses démographiquement.
La fiscalisation des recettes de la « bande GAFA » – Google, Amazon, Facebook et Apple – est donc non seulement une question d’équité fiscale, mais aussi une nécessité pour redonner des marges financières à l’action publique.
Tous les avis convergent donc sur la nécessité de mettre en place une fiscalité numérique, neutre et équitable. Cependant, d’autres solutions que celles de Philippe Marini ont été proposées. Ainsi, le rapport d’expertise précité tend à mettre en place une fiscalité incitative en matière de collecte, de gestion et d’exploitation des données personnelles.
Dès lors, la motion de renvoi à la commission, adoptée par la commission des finances du Sénat, paraît parfaitement adaptée. Elle permet de disposer du temps nécessaire pour étudier les diverses solutions envisagées, et ce dans la perspective d’une réforme plus globale.