Intervention de Patrice Gélard

Réunion du 8 avril 2013 à 14h30
Ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe — Articles additionnels avant l'article 1er

Photo de Patrice GélardPatrice Gélard :

Madame le garde des sceaux, je ne suis pas d’accord avec vos conclusions.

Si nous proposons de créer une union civile, c’est parce que le mariage ne peut être modifié par la seule loi : il faut que la Constitution prévoie la possibilité, pour le législateur, d’intervenir sur ce sujet.

En effet, l'un des éléments essentiels qui fondent le mariage est l'altérité ; depuis deux millénaires, aucun mariage n'existe sans elle. Or le texte que vous nous proposez ne fait plus référence à l’altérité. Nous admettons parfaitement que les couples de personnes de même sexe puissent s’unir avec solennité. Ils ont droit à cette reconnaissance, mais, en réalité, il s’agit, avec ce projet de loi, de mettre en place un substitut qui aura la forme du mariage, la solennité du mariage, les effets du mariage, mais qui ne sera pas le mariage, faute d’altérité, cet élément nécessaire reconnu par les principes fondamentaux de la République. En somme, ce sera un mariage Canada Dry

Ce sera d’autant moins un véritable mariage que le couple ainsi formé ne pourra accéder à la parentalité de façon simple, « normale », si l’on peut dire. Il lui faudra recourir à l'adoption ou à des techniques médicales qui, pour l'instant, sont prohibées dans notre droit.

Le risque, je l’ai souligné, est qu’émergent trois statuts différents pour les enfants : certains pourront être adoptés de façon plénière, d’autres seront susceptibles de faire l’objet d’une adoption simple, du moins par l'un des époux, d’autres encore ne pourront pas du tout être adoptés, parce qu’ils auront déjà des parents.

Les juges et les avocats que nous avons entendus n’ont pas manqué de le souligner, le texte que vous nous proposez conduira à toute une série d'aventures.

J’estime que l’union civile était la seule formule pouvant permettre d’aboutir à un compromis. Malheureusement, en rejetant notre proposition, vous vous engagez dans une logique d’opposition évidemment néfaste. Cette opposition crée des tensions que nous ne souhaitons pas, mais que faire ? Vous nous entraînez dans une voie dans laquelle nous ne voulons pas vous suivre. Dès lors, l’affrontement est inévitable. Nous estimons que ce que vous proposez n'est pas un véritable mariage et, pour votre part, vous tenez l’union civile pour impraticable : nous ne pourrons pas nous entendre sur de telles bases. Il est déplorable qu’une concertation préalable beaucoup plus large n’ait pas été conduite.

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