Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, avant d’expliciter le projet sur l’union civile que nous souhaitons soumettre au Gouvernement, permettez-moi de revenir sur les raisons qui nous amènent à nous opposer à l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe.
Vous les connaissez pour la plupart, et nous aurons l’occasion d’y revenir, mais, ces raisons fondant notre proposition, je ne crois pas que la répétition soit, en la circonstance, inutile. En tout état de cause, mieux vaut se répéter que se contredire, et cela nous permettra de relever publiquement, une nouvelle fois, la méprise du Gouvernement, qui nous dit, d’une part, que « seule l’ouverture du mariage aux couples de même sexe paraît être une réponse suffisante aux besoins d’évolution de la société », et, d’autre part, que cette réforme « ne remet pas en cause le droit des couples hétérosexuels ».
En réalité, nos compatriotes savent, pour la plupart, que la réforme que nous examinons depuis quelques jours entraînera un bouleversement très important de notre droit de la famille et qu’elle soulève un très grand nombre d’interrogations d’ordre bioéthique.
Pour votre majorité, la dualité des sexes, qui constitue pourtant la condition sine qua non de la procréation, n’est pas en soi un motif justifiant que le mariage soit réservé auxcouples hétérosexuels.
Pourtant, la préservation de cette caractéristique fondamentale du mariage ne peut se comprendre qu’au regard de deux autres principes avec lesquels elle s’articule, à savoir la présomption de paternité et la généalogie claire et lisible reposant sur le principe de la vraisemblance biologique. C’est pour préserver ces deux éléments essentiels qui constituent le socle de la cellule familiale classique que le groupe UMP ne s’est pas prononcé en faveur de l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe.
D’abord, en l’état, le projet de loi va fragiliser la présomption de paternité, qui permet à un père d’établir un lien important entre lui et son enfant, lien qu’il n’a pu créer, contrairement à la mère, durant le développement de l’enfant in utero. On trouve un signe important de cette fragilisation dans le changement de règles en matière de transmission du nom de famille prévu aux articles 2 et 3 du projet de loi.
C’est aussi la nécessité anthropologique d’établir une généalogie claire et lisible qui nous pousse à défendre la « vraisemblance biologique », à la suite de la majorité des psychiatres qui ont été entendus sur ce sujet.
Nous pensons que l’adoption ne devrait pas remettre en cause l’altérité sexuelle, qui permet à l’enfant, dès lors qu’il prend conscience de son adoption, de trouver sa place au sein d’un couple composé d’un homme et d’une femme, qui auraient pu avec vraisemblance être ses parents biologiques. L’enfant fragilisé par la perte de ses parents naturels trouve alors un réconfort dans la vraisemblance biologique de sa nouvelle filiation.
J’évoquerai enfin les questions bioéthiques liées au fait que, nous l’avons compris, le tarissement des offres d’adoption imposera le recours à des PMA et à des GPA « de confort ».
Des zones d’ombre juridiques entachent encore ce projet de loi. Nous pensons notamment qu’il pose des problèmes d’inconstitutionnalité, mais il est inutile de revenir sur ce point ; je ne saurais d'ailleurs me montrer plus clair que M. Gélard sur cette question.
Pour toutes ces raisons, nous proposons l’instauration d’une union civile qui aura l’avantage de sécuriser la situation des couples de personnes de même sexe, notamment à l’égard des enfants qui vivent avec eux, sans remettre en cause les droits légitimes des couples hétérosexuels.
Dans cette perspective, notre projet vise à rendre applicable le régime matrimonial aux couples homosexuels qui auraient conclu une union civile, par l’introduction d’un article mentionnant que « l’ensemble des dispositions du titre V du livre III du code civil s’appliquent aux personnes ayant contracté une union civile ». Quant aux conditions requises pour contracter une telle union et aux conséquences qui découleront de celle-ci, elles seront identiques à celles qui prévalent pour le mariage.
Les pouvoirs publics, au premier rang desquels se trouve le législateur, ont d’ailleurs le devoir de ne pas s’immiscer dans la vie privée des individus ; leur rôle est simplement de définir et d’organiser un modèle social assurant la stabilité et le renouvellement de la société. Voilà en quoi l’intérêt de la famille et celui de l’enfant rejoignent l’intérêt général, que les parlementaires ont mandat de défendre. Pour moi, la liberté des adultes s’arrête là où commence celle des enfants. §