Intervention de Gérard Cornu

Réunion du 10 avril 2013 à 22h30
Ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe — Article 2

Photo de Gérard CornuGérard Cornu :

Cela ne surprendra sans doute personne, comme beaucoup de mes collègues, je considère que cette disposition, qui consiste à rendre expresse la déclaration d’attribution du nom du père, faute de quoi, les noms des deux parents seront transmis à leurs enfants, porte atteinte à la lisibilité généalogique qui permet à chacun de s’inscrire dans une histoire familiale cohérente. Mon collègue Dominique de Legge l’a très justement souligné, comme simplification, on ne fait pas mieux !

Cette modification fragilisera la présomption de paternité puisqu’elle entraînera une importante généralisation des noms doubles.

Avec un tel dispositif, nous obligeons les parents à procéder, de génération en génération, à un choix permanent alors que les familles sont, pour la plupart, déjà dépassées par les nombreuses démarches administratives qui font suite à la naissance de leurs enfants.

À mes yeux, il s’agit d’une atteinte non négligeable au droit de chacun d’accéder à ses origines. C’est tout simplement scandaleux !

Les Français ont manifesté massivement à ce sujet. Ils restent particulièrement attachés au nom de famille, et c’est probablement la raison pour laquelle ils n’ont eu que très rarement recours au dispositif permettant, depuis 2002, de transmettre un nom double à son enfant.

Nous ne comprenons pas pourquoi cette disposition qui ne concerne que les couples de personnes de même sexe serait applicable à tous les couples mariés.

Je conçois qu’il soit impossible de sortir de l’impasse du défaut de choix lorsqu’il s’agit de couples de personnes de même sexe, mais est-ce une raison pour imposer un dispositif qui ne concerne que ces couples à toutes les familles françaises ?

Mme la ministre chargée de la famille nous dit qu’il s’agit de mettre tout le monde sur un pied d’égalité. L’égalité, encore et toujours… Néanmoins, je lui rappelle qu’il ne s’agit pas d’égalité puisque les parents ont bel et bien le choix. Si les couples homosexuels veulent transmettre un nom en particulier, ils le peuvent.

Certes, on ne doit pas laisser les textes créer des zones d’ombre. Toutefois, dans ce cas, peut-être pourrions-nous profiter de la navette pour améliorer le dispositif en prévoyant une règle particulière pour les couples de personnes de même sexe ?

Très honnêtement, nous ne pouvons pas maintenir cet article en l’état, car nous allons assister à la disparition progressive – par erreur ou par dépit – de la transmission du patronyme qui constitue aujourd’hui la réalisation concrète de la présomption de paternité.

Ainsi, nous aurions préféré que le dispositif actuellement en vigueur reste applicable, non pas par convenance par rapport à un sexe en particulier ou par rapport à un type d’union, mais parce que la transmission du nom paternel permet aujourd’hui – et depuis plusieurs siècles ! – d’établir une généalogie claire et lisible, en consacrant concrètement, pour tous les pères de famille, la présomption de paternité. À ce titre, je rappelle que le lien paternel est beaucoup plus difficile à établir que celui qui noue la mère à l’enfant.

La naissance d’un enfant étant un moment fort dans la vie de chaque parent, je demande au Gouvernement de ne pas « assommer » les familles en alourdissant encore les procédures administratives.

La suppression de cette disposition évitera par ailleurs des coûts administratifs importants. Vous imaginez bien que l’ensemble des documents administratifs ne sont pas adaptés à un tel dispositif ! Avec cette mesure, il va donc falloir les modifier un à un. Est-ce là la simplification que M. le Président de la République appelle de ses vœux ?...

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