Intervention de Richard Yung

Réunion du 11 avril 2013 à 15h00
Ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe — Article 22

Photo de Richard YungRichard Yung :

Je veux souligner l’importance de cet article 22, ayant été confronté, en tant que sénateur des Français établis hors de France, à plusieurs cas difficiles.

Je me rappelle, par exemple, du cas d’un Français qui a été déchu, en 2008, de la nationalité française, pour s’être marié aux Pays-Bas avec un Néerlandais, en acquérant de ce fait la nationalité néerlandaise. S'il avait épousé une Néerlandaise, il aurait pu conserver sa nationalité française. La France a préféré la lui retirer plutôt que de le considérer comme marié à un homme, violant par la même occasion la convention qui la lie aux Pays-Bas.

C’est peut-être un cas extrême, mais il n’est pas complètement isolé : les mariages de personnes de même sexe conclus à l'étranger en toute légalité, soit entre deux personnes de nationalité française, soit entre un ressortissant français et une personne d’une autre nationalité, ne sont pas reconnus en France et ne produisent donc pas d’effets.

Pourtant, le droit international privé oblige la France à reconnaître les mariages homosexuels célébrés à l'étranger entre deux étrangers dont la loi personnelle le permet. Nous sommes donc dans une situation ubuesque – si l’on peut dire – où les couples homosexuels étrangers mariés à l'étranger sont reconnus par la France et, par conséquent, sont mieux protégés par le droit français que les couples homosexuels français ou binationaux mariés à l'étranger. Comprenne qui pourra !

Devant cette injustice, j'avais déposé, en novembre 2008, une proposition de loi tendant à permettre la reconnaissance des unions conclues dans un autre État de l'Union européenne pour tous les couples, quelle que soit leur orientation sexuelle.

Le Sénat ne m’a pas suivi et, depuis, rien n'a bougé… jusqu'à aujourd'hui, puisque nous allons enfin donner aux couples de personnes de même sexe la possibilité de se marier.

Je défendrai, pour ma part, cet article 22, qui permettra aux mariages de couples homosexuels français et binationaux célébrés à l'étranger avant l'entrée en vigueur de la présente loi d'être reconnus en France, sous réserve, bien entendu, d'avoir été conclus dans le respect des conditions de validité requises en France.

Certains députés de l’opposition ont reproché à cet article d'instituer une sorte d’amnistie pour les couples de personnes de même sexe s'étant mariés à l'étranger dans le passé. Mais une telle critique est dénuée de tout fondement : il n'est pas question d'amnistier qui que ce soit, car, à l’époque, ces personnes n’ont pas contrevenu à une législation, puisqu’elles se sont mariées à l'étranger sous l’empire d’une loi étrangère le permettant.

Étant donné que les conditions de validité d'un mariage s'apprécient le jour de la célébration, les mariages célébrés à l'étranger avant l’entrée en vigueur de la loi, bien que tout à fait légaux et devenus conformes à notre code civil, ne seront toujours pas reconnus. Il faudrait donc que les couples concernés divorcent pour se remarier ! Vous en conviendrez, ce n’est pas une solution particulièrement facile, ni élégante…

Il s'agit donc de permettre une ratification de ces mariages conclus à l’étranger avant l’entrée en vigueur de la nouvelle législation.

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