Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi, pour commencer, de faire une remarque de forme : je veux exprimer mon regret que nous ayons dû examiner ce texte dans un délai aussi contraint, peu propice, convenons-en, à un travail législatif approfondi.
Certes, l’amélioration du fonctionnement du marché du travail au service de l’emploi ne peut attendre, car il s’agit de renforcer la compétitivité de notre pays, objectif qui est au centre de nos préoccupations. Mais il eût été souhaitable de nous accorder le temps nécessaire, un délai raisonnable, pour pouvoir traiter avec toute l’acuité et parfois la finesse de rédaction qu’ils méritent les nombreux sujets abordés par le projet de loi, afin de fournir le travail de qualité habituellement reconnu à notre assemblée.
Ce texte est le fruit de négociations longues, laborieuses, âpres, mais fructueuses, entre les partenaires sociaux, représentants des fédérations professionnelles et des organisations syndicales, qu’elles fussent patronales ou de salariés.
Il s’agit là, en effet, d’un succès de la démocratie sociale, que je tiens, comme d’autres avant moi, à saluer. Dans une France qui a bien du mal à se réformer, les corps intermédiaires montrent, s’il en était besoin, leur savoir-faire et leur utilité pour accompagner des évolutions nécessaires tant pour nos entreprises que pour leur personnel.
Sur le fond, ce projet de loi vient répondre à deux impératifs : la nécessité d’apporter aux salariés une sécurité complémentaire dans l’emploi ; la meilleure prise en compte des contraintes du monde du travail, qui a aussi, dans le même temps, besoin de flexibilité, d’adaptabilité et de souplesse, en contrepartie, bien sûr, des nouveaux droits individuels ou collectifs accordés aux salariés.
Le Président de la République lui-même, lors de la signature de l’accord national interprofessionnel de janvier dernier, a salué le succès du dialogue social, appelant son gouvernement à « transcrire fidèlement les dispositions d’ordre législatif prévues dans l’accord ».
Cela ne signifie pas que le Parlement se contente de donner un blanc-seing. La Haute Assemblée, en particulier, a une capacité d’écoute et d’analyse qu’il convient d’exploiter, afin d’enrichir ce texte au service des entreprises comme des salariés. Mais ce travail doit être accompli dans le respect non seulement de l’économie générale et de l’esprit de cet accord, mais aussi dans le respect de sa lettre, de toute sa lettre.
À cet égard, je déplore que le Gouvernement ait déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale un projet de loi sensiblement différent de l’accord sur certains points.
Il en est ainsi de la clause de désignation, prévue à l’article 1er, qui remet en cause et l’esprit et la lettre de l’ANI, lequel accordait une totale confiance aux entreprises pour choisir le prestataire le mieux adapté à leurs besoins. Elle pose, de surcroît, un problème juridique au regard du droit de la concurrence, consacré par le Conseil constitutionnel.