Intervention de Yves Daudigny

Réunion du 18 avril 2013 à 15h00
Sécurisation de l'emploi — Article 1er

Photo de Yves DaudignyYves Daudigny :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, contrairement à une idée reçue, la France a une culture conventionnelle en matière de relations du travail. Elle est plus ou moins mise à profit selon les gouvernements, et il est certes toujours plus facile de rester soi-même en ne faisant rien.

La négociation entre les partenaires sociaux est aujourd’hui favorisée. Il appartient au législateur de valoriser au mieux ces négociations, qui comportent, par définition, des compromis et ne peuvent exister que par eux.

Les dispositions de l’article 1er de ce projet de loi prévoient incontestablement de nouvelles adaptations favorables aux droits des salariés.

Au fond, les travaux de l’Assemblée nationale ont utilement contribué à améliorer le dispositif de cet article. Les apports de nos collègues députés sont de trois ordres : ils améliorent les prévisions initiales de l’accord national interprofessionnel inscrites dans le projet de loi ; ils clarifient la question importante, non traitée par l’accord, du régime d’Alsace-Moselle ; enfin, ils encadrent précisément la possibilité de désignation de l’organisme complémentaire.

Au titre des améliorations, notons que, par le biais de plusieurs amendements, nos collègues députés ont utilement ajouté aux modalités de mise en œuvre de la protection complémentaire santé l’information du salarié de la décision unilatérale de l’employeur, la mention du maintien de la garantie des droits dans le certificat de travail, le délai d’un mois imparti à l’organisme complémentaire pour proposer au salarié le maintien de ses droits après la cessation de son contrat de travail, l’assujettissement des contrats collectifs d’entreprise aux conditions applicables aux contrats dits responsables et solidaires.

À titre de clarification, compte tenu des difficultés d’articulation entre la généralisation de la complémentaire santé collective et les spécificités du régime local d’Alsace-Moselle, il est également prévu que seront définies des « adaptations » de la couverture des salariés relevant de ce régime.

Enfin, il convenait de clarifier une contradiction inscrite dans l’accord interprofessionnel, concernant la désignation de l’organisme complémentaire. Les partenaires sociaux ont laissé à la fois subsister, dans un même paragraphe, la mention du libre choix de l’entreprise et celle de la possibilité de recommander aux entreprises de s’adresser à un ou plusieurs organismes.

Les députés ont, à cet égard, utilement précisé les règles garantissant la transparence des appels d’offres pour les branches qui recommanderont ou prescriront un choix. Ils ont ainsi prévu une publicité préalable obligatoire, fixé les modalités garantissant le consentement éclairé des partenaires sociaux, ainsi que les règles relatives aux conflits d’intérêts et les modalités de suivi du contrat en cours.

Ces dispositions doivent être considérées pour ce qu’elles sont : un « plus » pour les salariés, inscrit dans un accord d’ensemble, sans préjuger de l’équilibre du système de protection sociale à recréer. Je me réfère sur ce point aux termes sans équivoque employés par le Gouvernement, pour lequel il reste encore à considérer de nouvelles règles de mutualisation, à préciser celles de l’octroi des avantages fiscaux et sociaux des différents contrats existants et à définir le contenu des contrats responsables et solidaires.

L’article 1er doit donc être resitué dans le cadre de la réflexion générale que le Gouvernement a engagée : le Président de la République a fixé à 2017 l’échéance pour la généralisation à tous d’une couverture complémentaire santé de qualité. Le Gouvernement a commandé au Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie un rapport, qui doit être rendu l’été prochain.

Nous pourrons alors concrètement poser la question de l’articulation de notre système de sécurité sociale, entre un régime de base obligatoire fort, mais qui s’est malheureusement effrité au cours des dernières années, et un niveau complémentaire qui existe depuis la création de la sécurité sociale, en 1945.

Nous ne devons pas nous diriger vers une répartition des risques entre régime de base et régime complémentaire : à la sécurité sociale, les risques lourds, aux complémentaires santé, les autres risques ! Une telle orientation irait à l’encontre de l’histoire de notre protection sociale et serait dommageable pour la solidarité nationale. Restons-en à la logique du « complément » et n’entrons pas dans celle du « remplacement » ! Nous devons trouver un équilibre qui passe non pas par la sélection des risques ou par la prise en compte de l’état de santé de chaque individu, mais par une juste répartition des charges.

Grâce à la mutualisation, l’occasion nous est offerte, avec la généralisation des contrats collectifs d’entreprise, de défendre cette vision de la sécurité sociale.

Pour ces raisons, dans ces conditions et, surtout, dans cette perspective, l’article 1er du projet de loi peut et doit être approuvé.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion