L’article L. 225-25 du code de commerce, que notre amendement a pour objet de supprimer, prévoit que, dans certains cas, les représentants des salariés ne sont autorisés à siéger au sein des instances de gouvernance des sociétés anonymes qu’à la condition de posséder des actions de l’entreprise.
D’aucuns ont voulu déceler un esprit socialiste dans une telle disposition : la possession d’actions permettrait aux salariés de poursuivre des objectifs communs avec le patronat, abolissant ainsi les intérêts divergents qui existent entre ces deux catégorises d’acteurs du monde du travail, voire entre ces deux classes.
Voilà une étonnante conception ! En réalité, le salarié n’a pas besoin d’espérer quelques dividendes pour être attentif et intéressé au devenir de son entreprise. La qualité de son travail, son investissement personnel, son attachement même à l’entreprise résident non pas dans l’actionnariat, mais dans la nécessité qu’il a de préserver son emploi pour conserver son salaire. C’est d’ailleurs toute la différence entre le salarié et l’actionnaire, qui peut se défaire comme bon lui semble de ses titres s’il espère en retirer une plus-value. L’attachement de l’actionnaire à l’entreprise peut n’être que temporaire. Il dépend principalement du cours de la bourse.
Nous souhaitons que les salariés puissent participer à la direction des conseils d’administration et autres instances de gouvernance, car, pour nous, les entreprises ne sont pas composées seulement d’actionnaires et de patrons. Il y a aussi des salariés. Rien ne serait plus légitime que celles et ceux qui, par leurs efforts, créent de la richesse, participent sans condition à la prise de décisions.
Or, en contraignant les salariés à se porter acquéreurs d’actions, on exige d’eux de cautionner sur leurs fonds propres une logique économique et spéculative qu’ils peuvent par ailleurs refuser. Les salariés doivent participer à la gouvernance des sociétés anonymes, non pas parce qu’ils posséderaient une ou plusieurs actions, mais parce que la démocratie sociale rénovée que le Gouvernement appelle de ses vœux depuis le débat de nos travaux exige qu’ils soient représentés, entendus et associés aux décisions. En effet, ils sont la première richesse de l’entreprise et les décisions qui sont prises s’imposent à eux, plus qu’aux actionnaires.