Intervention de Michel Le Scouarnec

Réunion du 20 avril 2013 à 14h30
Sécurisation de l'emploi — Article 6

Photo de Michel Le ScouarnecMichel Le Scouarnec :

L’article 6 a suscité un débat important lors de son examen par l’Assemblée nationale.

Il s’agit de créer ce que l’on appelle couramment les « droits rechargeables » à l’assurance chômage. Cela permettra aux salariés privés d’emploi qui en retrouvent un puis retombent dans le chômage de cumuler les droits d’indemnisation non consommés lors de la première période de chômage. Cette mesure qui nous semble globalement positive. Monsieur le ministre, vous n’avez pas hésité à la présenter comme le « sixième article, sixième progrès » de ce projet de loi.

Ces progrès jusque-là timides sont sans commune mesure avec les articles suivants, qui actent des reculs pour l’ensemble des salariés.

J’en reviens à l’article 6. La présentation que vous avez faite nous soucie quelque peu et nous conduit à vous interroger, monsieur le ministre. En effet, vous avez affirmé que la sécurisation de l’emploi incitera demain à reprendre un travail. Est-ce à dire que vous considérez que les salariés privés de leur emploi auraient aujourd'hui besoin d’une incitation particulière à reprendre une activité professionnelle ? Si tel est le cas, permettez-moi de vous dire que telle n’est pas notre conviction !

Ce que nous constatons tous les jours, dans nos permanences, dans nos communes, dans nos mairies, aux côtés des associations qui luttent et accompagnent les salariés sans travail, c’est que, dans leur immense majorité, ces derniers sont d’abord et avant tout des femmes et des hommes qui sont bien entendu involontairement privés de leur emploi ! Le seul fait de perdre son travail, de voir son niveau de vie baisser et la crainte de tomber dans la spirale de la précarité suffit à inciter les salariés à reprendre une activité professionnelle.

Nous ne nous satisfaisons pas des thèses de certains économistes, pour qui le chômage serait en partie volontaire, puisqu’il traduirait le refus de certains salariés de reprendre une activité professionnelle, préférant la non-activité au travail. Je note d’ailleurs que M. Germain n’a pas eu la même appréciation que vous, monsieur le ministre. Vous aviez affirmé que « le dispositif tel qu’il existe aujourd’hui pousse à utiliser tous ses droits : cela coûte » ; lui a trouvé opportun de préciser, et il avait raison, qu’« il ne faudrait pas interpréter ce dispositif à tort, en laissant entendre que les chômeurs seraient dans une sorte de stratégie d’optimisation et qu’il faudrait leur donner des incitations financières pour reprendre un emploi. Un chômeur qui se voit offrir une opportunité d’emploi ne la refuse pas. C’est bien mal connaître la situation des chômeurs que de penser le contraire ». Nous partageons cette analyse, plus conforme à ce que nous voyons et ressentons quotidiennement.

Mais sans doute faudrait-il que l’on aille jusqu’au bout du raisonnement. Comment peut-on accepter d’un employeur qui recrute un salarié privé d’emploi qu’il l’embauche à une rémunération à un niveau moindre que son salaire précédent, alors que, durant ses périodes d’activités professionnelles, ce salarié a acquis des compétences et des connaissances, dont la nouvelle entreprise va bénéficier et qui doivent par conséquent être valorisées financièrement ?

Cela pose également la question de l’accès à la formation professionnelle des salariés privés d’emploi. Celle-ci doit être au cœur du projet professionnel de chaque chômeur et doit absolument se concentrer sur des formations qualifiantes ou permettant d’acquérir un niveau de qualification supérieur, afin, là encore, de lui permettre d’accéder à un emploi avec une rémunération à la hauteur de ses compétences.

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