Merci de me recevoir. J'ai beaucoup participé à l'élaboration de ce texte. Dans un contexte économique et social dramatique, devait-il être audacieux ou fallait-il rechercher un compromis ? C'est cette deuxième option qui a été retenue. On était arrivé à une architecture qui tenait la route. A l'arrivée, nous avons un texte en trois parties. J'aurais souhaité un texte moins dense, qui renvoie au décret chaque fois que cela était nécessaire.
Ce qui a provoqué l'ire des départements, c'est l'ordre dans lequel les sujets sont traités : d'abord les métropoles, puis les régions, et enfin un texte sur les départements, renvoyé à 2016 et qui traiterait de la solidarité territoriale. Autant dire qu'il ne verra pas le jour, compte tenu des échéances électorales importantes qui se profileront à cette date...
Le mot « département » réapparaît dans la première partie du présent texte, c'est une satisfaction, d'autant que les ministres et le président du Sénat me disent que le département pourrait se retrouver également dans le second texte, qui devrait être examiné à l'automne.
La notion de chef de file nous convient. Nous verrions d'un bon oeil l'introduction de la notion de développement local, à côté du développement social. Je ne reviens pas sur le tourisme et sur le numérique...
Trois nouveaux principes guident ce texte : solidarité, subsidiarité et spécificité. Faut-il une même organisation en Bretagne, en Alsace, dans le département du Nord ? L'idée de conférence territoriale de l'action publique nous convient bien. Le B16 est un succès en Bretagne et a beaucoup apporté en termes de gouvernance territoriale. Certes, notre modèle n'est pas forcément exportable mais lorsque le maçon est au pied du mur, il faut bien qu'il s'attaque à l'ouvrage... Les conférences territoriales fonctionneront bien, j'en suis certain. Je les trouve cependant trop pléthorique. En Bretagne, nous passerons de 16 à 39, ce qui compliquera le fonctionnement de notre assemblée. Dans d'autres régions, le nombre de membres de ces conférences sera beaucoup plus pléthorique. De surcroît, dans une démocratie apaisée, le président de cette conférence doit-il absolument être le président du conseil régional ?
Moi qui reviens de Bruxelles, je trouve que la présidence tournante, qui a certes ses inconvénients, est néanmoins un bon moyen d'aboutir à des consensus. Voilà la position de l'Assemblée des départements de France.
J'en arrive à la partie « dure » du texte. Faut-il transférer les compétences d'action sociale à la métropole ?
Une parenthèse : la dimension européenne est absente de ce texte, comme elle l'était de la réforme des collectivités territoriales de décembre 2010. Il ne s'agit pas d'aller vers une république fédérale - seuls trois pays dans l'Union ont adopté une telle structure. On dit comme une évidence dans les médias que la France de demain sera bâtie autour des régions et des métropoles. Les Alsaciens se sont prononcés et ils ont donné tort à cette thèse, ce qui nous incite à davantage d'humilité...
Je reviens aux métropoles. Elles sont justifiées pour Paris, Lyon Marseille, Lille, Nantes ou Strasbourg, non en raison de la taille de ces agglomérations mais de leurs fonctions : Lille en raison de sa position géographique stratégique par rapport au lieu de décision européenne, Nantes parce qu'elle représente la porte de l'Ouest, Strasbourg parce qu'elle abrite le Parlement européen, Toulouse à cause d'Airbus, etc. Pour Rouen ou Bordeaux, cela se discute. Idem pour Grenoble... Demain, les départements auront des élus au sein des conseils métropolitains, mais quelle sera leur représentativité, compte tenu du nouveau mode de scrutin ?
La présidente de Lille Métropole veut des compétences stratégiques pour la métropole, non l'action sociale. Pour être efficace, celle-ci doit être menée à l'échelle d'un territoire à la taille critique. Seul le département peut assurer la solidarité entre monde rural et monde urbain. Comment s'organisera juridiquement le statut de chef de file des métropoles ?
Les départements de la première couronne parisienne attendent une clarification. Personne ne comprend d'où est sortie l'idée du seuil de 300 000 habitants pour l'intercommunalité en région parisienne. Sans la carotte de la loi Chevènement, y aurait-il eu autant d'intercommunalités en première couronne ?