Monsieur le haut-commissaire, dans leur volonté de réformer les droits connexes, les rédacteurs du projet de loi se sont bien entendu attaqués à la prime pour l’emploi, au travers notamment de son articulation avec le revenu de solidarité active.
Faute d’avoir osé la supprimer ou la réformer, en raison de nos fortes protestations, ils ont fait de la prime pour l’emploi la première victime du projet de loi. Perçue par près de 9 millions de ménages en 2007, pour un montant total de 4, 5 milliards d’euros, elle était jusqu’à présent un soutien financier important, pour les ménages bénéficiaires, dans leur démarche de retour vers l’emploi.
Aux termes du projet de loi, la prime pour l’emploi sera minorée du montant du RSA « chapeau » perçu au cours de l’année par le bénéficiaire de l’allocation. Le RSA jouera ainsi le rôle d’un acompte de la prime pour l’emploi. Cette première mesure permettra de réduire de 700 millions d’euros les crédits consacrés à la prime pour l’emploi.
Une autre mesure d’économie, plus injuste encore, est en perspective pour l’année 2009. En effet, le projet de loi de finances pour 2009 ne prévoit pas d’indexer les seuils d’attribution de la prime pour l’emploi, ce qui aura pour effet d’exclure de son bénéfice plus de 300 000 ménages. Pour 90 % d’entre eux, qui ne seront pas éligibles au RSA, cela correspond à une perte nette comprise entre 130 et 350 euros par an.
La situation n’est pas plus favorable aux ménages qui continueront à percevoir la PPE. Le rapport de notre collègue Doligé le reconnaît d’ailleurs : sur les 5, 1 millions de ménages qui continueront à percevoir uniquement la PPE, 3, 9 millions, soit plus de 76 % des bénéficiaires, y perdront. Seuls 10 000 ménages pourraient tirer quelque bénéfice de cette non-indexation, mais seulement dans de faibles proportions : le gain serait en effet d’environ 5 euros par mois…
Par ailleurs, aucun des 300 000 ménages qui percevront à la fois le RSA en tant qu’acompte et un complément de PPE ne sera gagnant sur le plan financier à l’issue de la réforme.
Qui pis est, 260 000 ménages, soit 87 % de l’ensemble, perdront de l’argent, à hauteur d’environ 50 euros par an. Certes, une telle somme ne compte pas davantage qu’une pièce jaune pour un bénéficiaire du bouclier fiscal, je le sais bien, mais ce montant est important pour les personnes visées par le projet de loi…
Le comble est que cette non-indexation de la PPE, défavorable à tant de nos concitoyens, permettra dans le même temps à l’État d’économiser 400 millions d’euros.
Je remarque, une nouvelle fois, que tous les contribuables ne sont pas logés à la même enseigne et ne bénéficient pas des mêmes faveurs du Gouvernement. En effet, si le Gouvernement fige la PPE pour 2009, il ne supprime pas, pour autant, l’indexation automatique des seuils dont fait l’objet l’impôt de solidarité sur la fortune. Des contribuables bénéficiant déjà, pour la plupart, du bouclier fiscal cumuleront donc les avantages, tandis que les ménages les plus modestes verront leur contribution augmenter.
Au-delà de cette question de l’indexation des seuils, le projet de loi tend à supprimer les dispositifs d’acompte et de mensualisation de la PPE. En effet, l’article 6 prévoit de priver les personnes justifiant d’une activité professionnelle d’une durée au moins égale à quatre mois et qui étaient bénéficiaires d’aides sociales pendant les six mois précédents de la possibilité de demander à percevoir un acompte de PPE de 300 ou 400 euros.
Si cette suppression paraît cohérente s’agissant des ex-bénéficiaires de l’API et du RMI, dorénavant bénéficiaires du RSA, cette disposition ne semble pas justifiée pour les autres titulaires d’allocations sociales, telles que l’allocation aux adultes handicapés ou l’allocation parentale d’éducation, qui perdent également le droit de demander un acompte de PPE. Pourquoi supprimer un tel droit pour des personnes qui pouvaient ainsi bénéficier d’un coup de pouce financier dans leur démarche de retour vers l’emploi ?
Si, comme le souligne M. Doligé, ce versement pouvait générer des indus, ce n’est néanmoins pas une raison suffisante pour supprimer le dispositif. Un simple aménagement aurait sans doute été préférable. Cette lutte contre les indus s’apparente à une chasse aux sorcières ! On fait moins de difficultés aux plus riches !
S’agissant de la mensualisation de la PPE, l’’article 6 prévoit également de supprimer la possibilité de la demander, le versement mensuel du RSA étant supposé compenser la suppression de cette faculté. Or, comme je l’ai précédemment indiqué, 5, 1 millions de ménages ne percevront que la prime pour l’emploi et ne pourront donc plus, à l’avenir, demander sa mensualisation.
Monsieur le haut-commissaire, les bénéficiaires de la PPE ne doivent pas être pénalisés par la mise en place du RSA. C’est pourquoi nous demandons la suppression des mesures que j’ai évoquées.