Intervention de Frédérique Espagnac

Réunion du 24 avril 2013 à 14h30
Projet de programme de stabilité — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Frédérique EspagnacFrédérique Espagnac :

Vous en doutez, cher collègue ?...

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, en écho aux précédentes interventions, permettez-moi de faire le point sur les raisons qui nous conduisent à débattre des projets de programmes de stabilité et de réforme.

En octobre 2009, après une décennie de gouvernement conservateur, une nouvelle majorité arrive au pouvoir en Grèce. Quand cependant le Premier ministre nouvellement élu annonce que les comptes publics nationaux étaient maquillés, et ce avec l’aide d’établissements bancaires de renommée mondiale, c’est la stupeur.

Loin de moi l’idée d’établir un parallèle avec une autre situation, mais il me semblait bon de procéder à ce rappel. En effet, les gouvernements conservateurs européens ont une fâcheuse tendance, ces derniers temps, à laisser une note extrêmement salée à leurs successeurs, en matière de dette et de déficit publics !

La suite, nous la connaissons tous : l’Union européenne et la zone euro, déjà très fragilisées par la crise des subprimes américains et la crise économique mondiale, se trouvent plongées dans une spirale de défiance, alimentée, notamment, par les taux d’endettement considérables de nombreux États membres, dont la France.

La crise s’aggravant, les égoïsmes nationaux prennent le pas sur le nécessaire effort de solidarité collective, qui est pourtant l’esprit même de la construction européenne.

Des mois de tergiversations, pleinement alimentés par le gouvernement français de l’époque et la rigidité allemande, conduisent ce qui n’était qu’un petit incendie à devenir un embrasement général, obligeant l’Europe à injecter en urgence des centaines de milliards d’euros, le gouvernement grec à prendre des mesures d’austérités sévères, et contribuant à déstabiliser les pays dits « du Sud », qui pâtissent, aujourd’hui encore, d’une certaine défiance.

Mes chers collègues, cette catastrophe restera dans les mémoires comme l’un des exemples les plus patents de l’impuissance des politiques européens à se concerter et à mettre rapidement en œuvre une réponse commune face à un événement qui a embrasé l’ensemble du vieux continent.

En réaction à cela, l’idée d’une solidarité européenne a fait son chemin, d’abord timidement, puis, sous la pression de certains responsables politiques, économiques et financiers, de façon plus appuyée.

Cette solidarité, quand bien même elle serait imparfaite, s’accompagne aussi de contreparties. C’est ce que l’on appelle la « coordination budgétaire ». Elle consiste, notamment, à ce que chaque pays membre soumette à ses pairs européens, via la Commission européenne, un plan budgétaire national à moyen terme contenant des indications sur la manière dont les réformes et les mesures prévues sont censées contribuer à la satisfaction des objectifs et des engagements nationaux, fixés dans le cadre de la stratégie de l’Union pour la croissance et l’emploi.

Loin d’introniser un voyeurisme d’un nouveau genre, cela a notamment pour objectif de faire disparaître le double sentiment d’irresponsabilité : irresponsabilité, d’une part, des gouvernements qui, par leur laxisme budgétaire, feraient courir un risque à l’ensemble de la zone euro et de l’Union européenne ; irresponsabilité, d’autre part, des pays qui, si un autre État membre venait à se trouver menacé, considéreraient que ce n’est pas leur problème et détourneraient le regard en faisant comme si de rien n’était.

Or, avec la nouvelle procédure, c’en est fini de la logique du : « on ne savait pas » ! Aujourd’hui, chacun, citoyen, personnalité politique ou acteur économique, sera témoin de l’effort que nos pays font collectivement pour sortir de la spirale du déficit public chronique.

Ne l’oublions pas non plus, ce programme de stabilité des finances publiques, garant du sérieux de l’action de notre pays en la matière, ne peut qu’affirmer le rôle de la France dans les décisions européennes. À l’inverse de ce que pu être le cas précédemment, nous donnons ainsi du poids à notre volonté de réorienter les politiques ultralibérales, qui ont eu cours trop longtemps en Europe.

Cela commence d’ailleurs à porter ses fruits. Hier, le président de la Commission européenne a rejoint la position défendue par le Président de la République et le gouvernement français, en reconnaissant qu’il fallait « combiner l’indispensable correction budgétaire avec des mesures adaptées pour soutenir la croissance ».

Dès lors, à la lumière de cette prise de position nouvelle, nous sommes amenés à débattre des projets de programmes de stabilité et de réforme mis en œuvre par le Gouvernement et notre majorité.

Au lendemain de l’élection présidentielle, le Président de la République, le Gouvernement et la majorité ont entamé le nécessaire travail de restauration de nos comptes publics tout en permettant une relance de l’économie et, in fine, de l’emploi.

En dix mois, la majorité a mis en place des réformes ambitieuses, afin de renouer avec une croissance forte, équilibrée et solidaire. Grâce notamment au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, nous avons contribué à redonner des marges aux entreprises françaises pour leur permettre d’investir et d’embaucher.

En instaurant une réforme nécessaire du financement de l’économie, via la création de la Banque publique d’investissement, la loi bancaire, le plan de trésorerie, le soutien au financement de l’investissement des collectivités locales et, prochainement, la réforme de la fiscalité de l’épargne, nous avons remis la finance au service de l’investissement, de l’économie réelle, des PME et des entreprises de taille intermédiaire, ou ETI.

Mais tout cela serait insuffisant sans une politique forte en faveur de l’emploi : les 150 00 emplois d’avenir, les contrats de génération, le renforcement des moyens de Pôle emploi et l’accord des partenaires sociaux sur la sécurisation de l’emploi créent les conditions d’une inversion durable de la courbe du chômage.

Preuve, s’il en était besoin, de la justesse de l’effort national entrepris depuis ce début de mandature, des pays connus pour leur dogme libéral nous emboîtent le pas. Que dire ainsi du revirement de politique aux Pays-Bas, qui les amène à considérer la simple rigueur sans mesure d’accompagnement efficace de la croissance comme une vaine illusion ? Et, croyez-moi, ils seront nombreux, les champions d’une politique d’austérité froide et contre-productive, à suivre le sillon d’une politique responsable et juste initiée par la France !

Pièce maîtresse du redressement de notre économie nationale, le redressement de nos comptes publics doit être notre priorité, en se fondant sur les principes de justice sociale et d’efficacité économique.

Dès le mois de mai, le Gouvernement et la majorité ont pris les décisions nécessaires pour tenir nos engagements, gage impérieux de crédibilité et de responsabilité. Ainsi – faut-il le rappeler ? –, si nous n’avions pas agi rapidement, le déficit public aurait atteint 5, 5 % du PIB en 2012 !

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